Anouar CHENNOUFI
Africa-Press – Niger. L’Etat nigérien ne semble pas confiant dans le succès de la nouvelle stratégie que la France a développée après le retrait de ses forces du Mali, qui ne se contente pas de sa présence au sein du nouveau bloc alternatif à la force conjointe Sahel, mais tend également à diversifier les moyens et les partenariats, en prévision des pires scénarios possibles avec l’expansion de l’activité des groupes armés.
Sur la base d’un accord avec Niamey, Paris a redéployé ses forces retirées du Mali au Niger, et un certain nombre d’entre elles pourraient se diriger vers le Tchad et la Mauritanie, et leur nombre varie entre 2 500 et 3 000 soldats français.
Le président nigérien Bazoum craignait que la nouvelle stratégie française au Sahel africain ne subisse d’autres transformations vers une plus grande réduction de sa présence militaire, et comme il se retirait du Mali, il pourrait se retirer du Niger à l’avenir, exposant son pays à de hautes menaces sécuritaires si laissés exposés et face à des groupes armés seuls sans soutien.
Par conséquent, il a présenté son approche pacifique avec certaines factions armées et la tendance à former une force opérationnelle interarmées multinationale dans le lac Tchad, en plus d’accueillir les forces françaises qui se retirent du Mali.
Toujours dans le même contexte sécuritaire, Mohamed Bazoum a souligné que son pays se dirige vers la victoire dans la guerre qu’il mène, avec le soutien régional et occidental, contre les groupes armés qu’il qualifie de terroristes, notamment Boko Haram et Daech en Afrique de l’Ouest. D’autre part, la fréquence des attaques sanglantes dans d’autres pays voisins de la région du Sahel, comme le Burkina Faso et le Mali, et la possibilité de leur expansion à travers la frontière sud vers les pays voisins, révèlent que contenir la menace de ces groupes est encore loin d’être atteint.
Rappelons que lors de sa visite effectuée dans la ville de Diffa à la frontière avec le Nigeria, Bazoum, qui assure la présidence du Niger depuis 2021, a évoqué les bons résultats obtenus par les forces de son pays face aux groupes armés, annonçant une « fin imminente » pour le groupe Boko Haram, qui continue de lancer des attaques dans la région du Sahel malgré la scission à laquelle il a été exposé, puisqu’il s’est scindé en une organisation affiliée à Al-Qaïda et une autre affiliée à l’organisation Daech.
Par ailleurs, en mai dernier, le président du Niger avait appelé la France et d’autres pays européens, lors d’une interview accordée au journal français « La Croix », à s’impliquer davantage dans la lutte contre les groupes armés infestant la région.
Ces dernières semaines, de nouvelles attaques sanglantes ont été enregistrées au Mali, au Burkina Faso, au Niger, au Nigeria et au Tchad, malgré les campagnes militaires successives lancées par les armées de la région, soit seules, soit dans le cadre de la force conjointe formée par plusieurs pays de la région.
Actuellement, des groupes armés liés à Al-Qaïda et à Daech sont actifs dans le nord du Mali, le nord et l’est du Burkina Faso, le nord-est du Nigeria et le sud-est du Niger. Ils ont également trouvé refuge dans le lac Tchad, qui est entouré par le Tchad, le Niger, le Nigéria et le Cameroun.
Avec le transfert de violence depuis le Mali à partir de 2012, des groupes armés ont pris le contrôle de certaines parties du territoire, profitant parfois de l’instabilité politique et de l’incapacité des gouvernements à se développer, notamment dans les zones éloignées des centres, comme c’est le cas dans le nord et l’est du Burkina Faso et le sud-est du Niger, sachant que les deux pays font partie des pays les plus pauvres.
Activités d’Al-Qaïda et Daech dans la région
Boko Haram
Actuellement, la « Jamaat Nusrat al-Islam wal-Muslimine », qui est liée à Al-Qaïda et à Daech en Afrique de l’Ouest, en plus de Boko Haram, est l’un des plus grands groupes actifs dans la région du Sahel africain, et les attaques sanglantes qui sont enregistrées de temps à autre indiquent que la menace de ces groupes n’a pas diminué en général malgré que certains d’entre eux, en particulier Boko Haram au Nigeria, se sont retirés en raison des coups qu’ils ont reçus ces dernières années.
Bien qu’il ait subi des défaites par le biais de Daech et de l’armée au Nigeria, le groupe Boko Haram contrôle toujours certains villages et poches dans la campagne, et il a changé de tactique en ayant eu recours à des attentats-suicides.
Dans un récent rapport de l’ONU, son secrétaire général Antonio Guterres a déclaré que le centre du Mali souffre d’un niveau élevé de violence, soulignant que le triangle frontalier avec le Niger et le Burkina Faso connaît une détérioration importante de la situation sécuritaire.
Pour sa part l’International Crisis Group affirme que « la violence s’est orientée vers le Burkina Faso depuis le Mali », et qu’il existe des facteurs internes qui l’alimentent, et ajoute que la majeure partie de la violence dans le nord du Burkina est derrière Jamaat Nusrat al-Islam wal-Muslimine.
Entre mars et juin de cette année, les forces conjointes, formées par le Tchad, le Niger, le Nigéria, le Cameroun et le Bénin, ont mené une opération militaire à grande échelle dans le lac Tchad, qui a entraîné la mort d’environ 800 membres de Boko Haram, selon à un communiqué rendu public par ladite force, qui est basée dans la ville de Diffa, au Niger.
Des analystes attribuent l’expansion des groupes armés à plusieurs raisons, notamment la faiblesse des institutions et la frustration de la population face à la négligence de leurs gouvernements à leur égard dans leurs régions, ce qui demeure un réel motif pour rejoindre ces groupes, d’autant plus que la nature de la région désertique rend difficile le contrôle de ce phénomène.
Surtout que les craintes de la montée du phénomène armé de la région du Sahel au sud, notamment après le retrait de la plupart des forces françaises du Mali, malgré le fait que le président français Emmanuel Macron ait annoncé la formation d’une coalition internationale de lutte contre le terrorisme dans la région, pour remplacer la force « Barkhane ».
Ces mêmes craintes grandissent quant à l’expansion des groupes armés dans le sud, hors du triangle frontalier entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso, en particulier vers les pays riverains du golfe de Guinée.
Face à toutes ces situations, les services nigériens affirment que la menace extrémiste a décru dans le bassin du lac Tchad. Un affaiblissement dû à la mobilisation des armées des pays touchés par Boko Haram (Niger, Nigeria, Tchad, Cameroun) et aux luttes intestines meurtrières entre les différentes factions de ce groupe armé originaire du Nigeria.
Sept ans après la première attaque contre la ville nigérienne de Diffa et ses environs, une nouvelle ère, plus prometteuse, va-t-elle commencer au milieu de cette désolation ?
Pour Mohamed Bazoum, le président du Niger « OUI », car il estime que les conditions de sécurité sont désormais réunies pour organiser le retour de quelque 40.000 personnes déplacées de 45 villages du district de Gesekero.
« La fin de Boko Haram est imminente », a-t-il souligné !
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