Inédit ! Voici la première cartographie des « centrales énergétiques » du cerveau

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Inédit ! Voici la première cartographie des
Inédit ! Voici la première cartographie des "centrales énergétiques" du cerveau

Africa-Press – Niger. On le sait: notre cerveau est l’organe de notre corps qui consomme le plus d’énergie. Beaucoup d’énergie: environ 1/5e des calories que nous consommons est utilisé pour le maintenir en fonctionnement. Mais comment cette énergie se répartit-elle ? Existe-t-il des régions qui consomment plus que d’autres ? Les centrales énergétiques qui alimentent ces régions sont-elles les mêmes partout ? Voilà le genre de questions auxquelles répond l’étude franco-américaine publiée ce mercredi 26 mars 2025 dans le journal Nature.

Mais tout d’abord, un point introductif: ce que l’on appelle « centrales énergétiques » chez un être vivant ce sont de microscopiques organites enchâssés à l’intérieur de chacune de ses cellules: les mitochondries. En fonction du type cellulaire, on en dénombre entre 300 et 2000 par cellule. À partir des nutriments que nous avalons, cette structure ovoïde est capable de produire du carburant cellulaire – l’ATP -, au terme de réactions biochimiques complexes. Tous les êtres vivants en disposent. Même les plantes à l’aide d’un organite analogue, le chloroplaste. On suppose que la mitochondrie est une ancienne bactérie qui aurait été intégrée – on parle d’endosymbiose – par une cellule animale primitive voilà au moins un milliard d’années.

703 cubes de cerveau

Jamais une carte établissant la répartition et la densité des mitochondries dans le corps humains, et à fortiori dans le cerveau, n’avait été réalisée. Pour ce faire, Michel Thiebaut de Schotten (Université de Bordeaux, CNRS) et son équipe ont commencé… par couper une tranche de cerveau ! “Plus exactement, explique le chercheur à Sciences et Avenir, une tranche passant au travers du lobe frontal. On l’a choisi car c’était l’une des plus grosses tranches que l’on pouvait obtenir passant par toutes les régions du cerveau ».

Une fois la tranche obtenue, le travail de tronçonnage n’en était qu’à ses débuts. « Ensuite, cette tranche a été découpée en cubes de 3 mm de côté. Ce qui nous a donné 703 petits morceaux nommés des voxels. Un peu l’équivalent en 3D des pixels informatiques pour le cerveau ».

Des voxels à l’organe complet

Pour chaque voxel ont été analysés le phénotype mitochondrial, différent niveaux enzymatiques, la densité des mitochondries et leur capacité de production d’énergie. Ensuite, afin de généraliser les résultats, il a fallu entrainer un modèle informatique à extrapoler les données obtenues à l’ensemble du cerveau. « Tous ces voxels, précise le chercheur, ont été comparés avec des images moyennes de différentes mesures d’imagerie cérébrale qui ont mesuré, soit l’activité dans le cerveau, soit la quantité d’oxygène, soit le mouvement des particules d’eau de façon microscopique etc. A partir de toutes ces images, un logiciel statistique les a combiné ensemble afin de reproduire les valeurs mesurées par la biologie cellulaire. Ce qui a pu nous donner une carte complète de l’activité mitochondriale dans l’intégralité de l’organe ».

Plus c’est récent, plus ça consomme

Trois enseignements majeurs ont pu être obtenus de cette recherche qui aura demandé 5 ans de travail à l’équipe de scientifiques. Premièrement, les mitochondries ne sont pas les mêmes selon leur localisation dans les différentes régions cérébrales. Ensuite, les mitochondries de la matière grise possèdent une capacité de production énergétique deux fois plus intense que celle de la matière blanche. Enfin, plus une région est récente dans l’évolution, plus la densité des mitochondries est élevée. Donc, plus ladite région a besoin d’énergie pour fonctionner correctement, signe de sa sophistication. « Les aires les plus récentes sont celles que l’on rencontre uniquement chez les êtres humains, précise le chercheur. Ce sont des régions absentes chez les autres primates ou qui se sont étendues de façon complètement extraordinaires chez nous. Il s’agit du gyrus frontal supérieur, plus exactement de sa partie dorsale, impliquée dans l’adaptation à la vie sociale, du sillon intrapariétal qui divise la partie haute et la partie basse du lobe parietal, et qui intervient notamment dans les mouvements oculaires et de préhension, et du gyrus temporal moyen qui joue un rôle dans le traitement auditif. Toutes ces régions consomment énormément d’énergie ».

Une recherche freinée par la politique

Maintenant que les chercheurs disposent de ce premier modèle, il devrait être possible d’analyser des sujets vivants et d’évaluer à partir de simples IRM la répartition et la densité de leurs mitochondries cérébrales. Et notamment d’étudier des patients qui souffriraient de maladies mitochondriales. Avec l’idée à terme d’utiliser ce type de cartographie comme un biomarqueur pour des pathologies pas uniquement mitochondriales mais également neurodégénératives et cardiovasculaires.

Du moins si les chercheurs ne sont pas empêchés par des considérations politiques… En effet, les travaux actuels ont été accomplis avec l’université Columbia qui a fourni le cerveau, s’est occupée du développement de l’ingénierie et de certaines mesures. Or, avec l’administration Trump actuellement en place, toute la recherche américaine se retrouve en plein chaos. Les projets de recherche des NIH, les instituts de santé américains, font l’objet de coupes budgétaires drastiques et de licenciements massifs. Et l’université Columbia est justement l’une de celles ayant subi les coups de boutoir les plus violents… « Nos collègues américains restent malgré tout confiants, s’efforce de positiver Michel Thiebaut de Schotten. Ils espèrent que c’est juste un mauvais moment à passer et que la situation rentrera dans l’ordre, tôt ou tard… »

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