Transformer du plomb en or : Alice l’a fait !

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Transformer du plomb en or : Alice l'a fait !
Transformer du plomb en or : Alice l'a fait !

Africa-Press – Niger. Alice a transformé du plomb en or. Mais Alice n’est pas une alchimiste. Alice — pour A Large Ion Collider Experiment — est l’un des quatre grands détecteurs du LHC (Large Hadron Collider), conçu pour explorer les états extrêmes de la matière lors de collisions d’ions lourds. Et c’est précisément en orchestrant des interactions entre noyaux de plomb lancés à des vitesses proches de celle de la lumière que l’or a jailli, un très bref instant, au cœur de l’expérience. Ces événements rarissimes ont eu lieu entre 2015 et 2018, mais leur analyse n’a abouti qu’en mai 2025, avec une publication dans la revue Physical Review C.

Trois protons en moins, et le plomb devient or

L’or et le plomb ne diffèrent que par trois petits protons: le noyau de l’or en compte 79, le plomb 82. Transformer le plomb en or, ce n’est donc rien d’autre qu’arracher ces trois protons au plomb. C’est donc cette opération, définitivement hors de portée des alchimistes, qui a eu lieu dans les entrailles du LHC. La véritable originalité de cette annonce tient surtout au mécanisme de production mis en évidence. Il ne s’agit pas ici de collisions frontales classiques, où les noyaux de plomb sont pulvérisés par le choc puis se recombinent pour former d’autres noyaux plus légers, notamment de l’or.

Ici, l’équipe d’Alice a mis en évidence des collisions dites « ultrapériphériques », au cours desquelles deux noyaux de plomb se frôlent sans se percuter. À ces vitesses proches de la lumière, leurs champs électromagnétiques deviennent intenses. Ils forment alors des photons, des particules de lumière. Parfois, l’un de ces photons frappe un noyau de plomb et provoque une secousse interne telle qu’elle éjecte jusqu’à trois protons. Il n’en reste alors plus que 79 dans le noyau. Bingo ! C’est de l’or…

Une production microscopique et éphémère

Aussi spectaculaire soit-elle, la transmutation observée par Alice reste d’une extrême rareté. Entre 2015 et 2018, les collisions ultrapériphériques analysées auraient produit environ 86 milliards de noyaux d’or. Un chiffre qui impressionne à première vue. Mais cela correspond à une masse totale d’à peine 29 picogrammes — soit 0,000 000 000 029 gramme. En comparaison, une simple bague en or contient plusieurs grammes du métal précieux. Il faudrait donc multiplier cette production par plusieurs milliers de milliards pour espérer fabriquer un bijou.

Et ce n’est pas le seul souci. Ces noyaux d’or, aussitôt formés, sont si instables qu’ils se désintègrent presque immédiatement, rendant toute récupération impossible. Quoi qu’il en soit, les chercheurs estiment que le LHC produit actuellement jusqu’à 89.000 noyaux d’or par seconde au point de collision d’Alice… Au-delà de l’anecdote, l’observation de ces noyaux formés par collisions ultrapériphériques va nourrir les modèles théoriques de « dissociation électromagnétique », le nom savant de ces interactions entre photons et noyaux, et offrir aux chercheurs un nouveau levier pour sonder les lois fondamentales de la matière… Et ça, ça vaut de l’or !

Illustration d’une collision ultrapériphérique où les deux faisceaux d’ions plomb (208 Pb) du LHC se croisent à proximité l’un de l’autre sans entrer en collision. Lors du processus de dissociation électromagnétique, l’interaction d’un photon avec un noyau peut provoquer des oscillations de sa structure interne et provoquer l’éjection d’un petit nombre de neutrons (deux) et de protons (trois), laissant derrière lui le noyau d’or ( 203 Au)

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