Africa-Press – Tchad. Les guêpes parasitoïdes sont connues pour pondre leurs œufs dans un hôte particulier, un insecte. L’objectif étant que les œufs et les larves puissent se développer sans subir les foudres du système immunitaire de l’hôte. Si ce dernier n’est pas adapté, les œufs sont généralement détruits.
Pourtant, certaines femelles pondent aussi dans des espèces qui ne font pas partie des hôtes auxquelles elles sont adaptées. Les biologistes qualifient ce comportement de « malentendus d’information », d' »accident » ou encore d' »erreur » conduisant à la mort obligatoire de la progéniture. Mais dans une étude publiée le 11 mars 2025 dans la revue Scientific Reports, des chercheurs japonais révèlent qu’il ne s’agit pas d’un simple comportement inadapté qui mène forcément à la mort des larves.
Ils se sont basés sur l’étude de la guêpe parasitoïde Cotesia kariyai qui s’attaque normalement aux chenilles de l’insecte Mythimna separata. Mais les femelles de cette guêpe se trompent parfois et pondent leurs œufs dans une espèce proche, Mythimna loreyi, ce qui ne donne aucun résultat. A l’inverse, l’insecte Meteorus pulchricornis est bien capable de s’attaquer à Mythimna loreyi.
Un système immunitaire paralysé
Des expériences en laboratoire révèlent finalement que l’entêtement des guêpes C. kariyai à vouloir pondre dans un hôte qui n’est pas le leur n’est pas complètement voué à l’échec. Leurs œufs peuvent réussir le développement larvaire dans Mythimna loreyi. Mais il faut pour cela que la chenille soit simultanément attaquée par Meteorus pulchricorni, son parasite attitré. Les auteurs de cette nouvelle étude ont baptisé ce phénomène « parasitisme pirate », C. kariyai devenant un « parasitoïde pirate ».
Pourquoi, dans ce cas, la ponte de C. kariyai fonctionne-t-elle? Si de futures études devront confirmer cette hypothèse, les chercheurs pensent que les composés que Meteorus pulchricorni injecte dans son hôte pour supprimer son immunité lors de la ponte protège ses œufs mais aussi ceux de C. kariyai. Le système immunitaire des chenilles laisse alors le champ libre aux deux parasites.
Un comportement inadapté qui pourrait, en réalité, être adaptatif
Ce phénomène pourrait se produire dans la nature, même s’il n’a pas encore été documenté. Il pourrait accroître le potentiel de reproduction d’une espèce, en lui permettant de se rabattre sur une autre cible si son hôte n’est pas disponible, par exemple à cause des températures trop basses.
De cette façon, l’espèce parasite peut à terme augmenter le nombre d’hôtes adaptés ou même changer complètement d’hôte car si la ponte réussit dans un hôte normalement inapproprié, « les guêpes nouvellement émergées apprennent l’odeur de ce nouvel hôte ou de son habitat, et manifestent ensuite une préférence pour la ponte sur celui-ci », souligne l’étude.
Cette découverte « suggère que le comportement apparemment inadapté des guêpes parasitoïdes pondant dans des organismes non hôtes pourrait en réalité représenter un comportement adaptatif », remarquent les chercheurs. Ces insectes ne sont décidément pas à sous-estimer même lorsqu’on pense qu’ils sont dans l’erreur.
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