Africa-Press – Togo. Lomé, 9 juin 2025 – Ce lundi matin, une manifestation spontanée de médecins togolais s’est tenue au Centre médico-social (CMS) de Djidjolé à Lomé. Blouse blanche sur le dos pour certains, indignation dans les regards pour tous, ces praticiens ont exprimé leur solidarité avec leur confrère, le Dr Hounonè-Adossi Ayitévi Firmin Elom, arrêté le 6 juin dernier alors qu’il manifestait pacifiquement.
Un cri de colère face à une arrestation jugée arbitraire
Réunis dans l’enceinte du CMS de Djidjolé, les médecins ont exigé la libération immédiate du Dr Hounonè-Adossi, mais aussi de tous les autres manifestants interpellés ces derniers jours. Pour eux, il s’agit d’un tournant inacceptable dans la gestion des libertés publiques au Togo.
« En tant que médecins, nous trouvons cela profondément injuste. Il est inadmissible qu’une personne soit arrêtée simplement parce qu’elle exprime son ras-le-bol ou qu’elle demande des opportunités pour sauver des vies, comme elle sait si bien le faire. Nous sommes indignés. C’est pourquoi nous sommes venus aujourd’hui lui apporter notre soutien et nous enquérir de ses conditions de détention. Malheureusement, vous avez vu ce qui s’est passé », a déclaré le Dr Meba, l’un des manifestants.
Un ultimatum de 48 h donné aux autorités
Il poursuit: « « Mais notre patience a des limites, pendant que notre frère est torturé dans un cachot où il n’a pas sa place. Sa place est dans un hôpital. Il n’aurait même pas dû se retrouver dans la rue, car s’il avait eu l’opportunité de travailler, il n’aurait pas eu besoin de manifester pour en réclamer. Nous attendons donc que le retour de l’Ordre des médecins et que des mesures soient prises dans les 48 heures. Si rien n’est fait, alors ensemble, nous déciderons de la suite à donner. »
Pour le porte-parole des manifestants: « Notre action de ce matin ne s’inscrit pas ne s’inscrit pas dans la démarche de l’Ordre ou dans la connotation que les gens sont en train de lui donner. Nous voulons simplement faire passer un message: « c’en est trop. Cela fait 20 ans, et qu’est-ce qui a vraiment changé dans ce pays? Nous sommes là pour exprimer notre ras-le-bol. On nous parle de loi, de loi… Mais eux-mêmes, quelle loi respectent-ils vraiment dans ce pays? », s’est-il indigné.
L’Ordre des médecins appelé à l’action
Face à cette mobilisation, le président de l’Ordre national des médecins du Togo, Dr Beketi Katanga Anthony, s’est adressé aux manifestants. Il a salué leur mobilisation tout en les appelant au respect des procédures administratives:
« J’ai bien entendu tout ce que vous avez dit. Vous souhaitez exprimer votre opinion et exercer vos droits en tant que citoyens — je vous comprends et je vous soutiens. Cependant, il y a des procédures administratives à respecter. Si vous souhaitez vous organiser, utilisez les canaux officiels prévus à cet effet », a déclaré le président de l’Ordre.
Il a promis que l’Ordre suivait de près l’affaire et que des actions étaient en cours pour aboutir à une issue favorable.
Des violences présumées dénoncées
Selon des témoignages de proches, le Dr Hounonè-Adossi, arrêté aux premières heures de la manifestation autour de 11h, aurait été victime de violences physiques pendant sa garde à vue. Une situation qui a choqué l’assistance, d’autant plus que l’accès à son lieu de détention, la section anti-gang de Djidjolé, leur a été refusé.
Le professeur David Dosseh appelle au calme
Présent sur les lieux, le Professeur David Ekoué Dosseh, figure respectée du corps médical togolais, a également pris la parole. Il a salué la mobilisation des médecins, tout en les invitant à faire confiance au président de l’Ordre.
« Nous aimons notre pays, et toutes les actions que nous mènerons iront dans le sens du changement. J’ai ressenti votre détermination, et je vous en remercie. Pour notre collègue, nos amis et tous ceux qui sont arrêtés, le fait de ne pas se sentir seuls leur donne du courage », a-t-il entamé.
Et de poursuivre: « L’Ordre ne nous a pas abandonnés. Dès le début, nous avons senti qu’il menait des actions. Par respect pour le Dr Bekete, je nous invite à suivre son conseil, du moins pour aujourd’hui. Il nous a assuré que des démarches sont en cours pour apaiser la situation et obtenir la libération de ceux qui ont été injustement arrêtés. Faisons-lui confiance: nous sommes unis. Cependant, si nous constatons qu’en dépit de notre bonne volonté rien ne change, alors nous nous réorganiserons et nous nous préparerons mieux. Le médecin togolais sait se faire entendre. Ce n’est pas parce qu’il se tait qu’il est inconscient ou qu’il manque de détermination. Écoutons donc ce que le professeur nous a dit, et pour aujourd’hui, rentrons chez nous dans le calme », a-t-il conclut.
Tensions palpables sur le terrain
Alors que la rencontre se poursuivait, la direction du CMS a demandé aux manifestants de quitter les lieux, sous la pression. Le président de l’Ordre a même reçu dans ce sens un appel du ministre de tutelle.
À l’extérieur, les forces de sécurité étaient massivement présentes, avec quatre véhicules de police et de gendarmerie visibles sur place. Malgré les tensions, les médecins ont quitté les lieux pacifiquement, promettant de rester mobilisés si leur appel à la justice et à la liberté n’est pas entendu.
A noter qu’au cours de la manifestation du 6 juin à l’appel des influenceurs togolais, une trentaine de personnes ont été arrêtées parmi lesquelles 3 du corps médical dont une sage-femme et un pharmacien.
Sauf autorisation de la rédaction ou partenariat pré-établi, la reprise des articles de togoscoop.tg, même partielle, est strictement interdite. Tout contrevenant s’expose à des poursuites.
Pour plus d’informations et d’analyses sur la Togo, suivez Africa-Press