Agrément De Trois Nouvelles Sociétés Pétrolières

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Agrément De Trois Nouvelles Sociétés Pétrolières
Agrément De Trois Nouvelles Sociétés Pétrolières

Africa-Press – CentrAfricaine.
Pourquoi accorder un agrément à trois sociétés pétrolières: Petro Express, Rock Trading et Blessing Petroleum, dans un secteur aussi stratégique que celui des hydrocarbures, alors que la République centrafricaine est déjà minée par l’opacité et les dysfonctionnements?

En effet, le Conseil des ministres du 15 mai 2025 a validé ces agréments, présentés comme une modernisation de la distribution des produits pétroliers. Mais cette décision, loin d’être un progrès, pousse à s’interroger sur la transparence, la rigueur et les véritables bénéficiaires de cette libéralisation. Dans un pays où les citoyens peinent à accéder à des produits de première nécessité, est-il raisonnable de confier un secteur vital à certains acteurs privés sans garanties solides?

Le gouvernement centrafricain a décidé d’agréer Petro Express, Rock Trading et Blessing Petroleum comme distributeurs de produits pétroliers et dérivés, dans le cadre d’une réforme visant à recentrer les marketeurs sur la distribution et le transport, l’importation étant désormais gérée par un mandataire mafieux désigné par l’État. Cette décision, validée lors de la 37e session de la commission interministérielle d’agrément le 11 mars 2025, est présentée comme une réponse aux besoins du marché. Mais la rapidité du processus, un avis favorable émis en une seule session, laisse perplexe. Comment une commission peut-elle évaluer en si peu de temps la fiabilité, la capacité technique et l’intégrité de trois sociétés dans un secteur aussi sensible? Ce empressement explique un manque de rigueur, voire une volonté de favoriser certains intérêts au détriment de l’intérêt public.

Le compte rendu reste muet sur les critères d’évaluation: quelles sont les références de ces sociétés? Ont-elles une expérience avérée dans la distribution pétrolière? Qui sont leurs actionnaires? Dans un pays où la corruption est endémique, l’absence de transparence sur l’identité des bénéficiaires réels alimente les soupçons de favoritisme ou de la mafia. Les Centrafricains ont le droit de savoir si ces agréments servent l’économie nationale ou enrichissent une élite bien connectée.

Il est à noter que le secteur pétrolier centrafricain est un terrain miné par les dysfonctionnements. Les pénuries récurrentes, les hausses de prix imprévisibles et les problèmes de qualité des carburants sont le lot quotidien des citoyens. La reprise de l’importation par un mandataire de l’État, censée stabiliser l’approvisionnement, n’a pas résolu ces problèmes. Au contraire, elle a concentré le pouvoir entre les mains d’un acteur unique, rendant les distributeurs dépendants du dépôt de Kolongo. Dans ce contexte, confier la distribution à trois sociétés privées, sans réforme préalable du secteur, risque d’aggraver les failles existantes.

Le compte rendu omet de préciser comment ces sociétés garantiront une distribution équitable sur l’ensemble du territoire. La RCA, avec ses infrastructures routières dégradées et ses zones rurales difficilement accessibles, exige des distributeurs dotés de capacités logistiques robustes. Rien n’indique que Petro Express, Rock Trading ou Blessing Petroleum disposent de telles ressources. Le risque est clair: une concentration de l’offre dans les grandes villes, laissant les provinces à la merci des pénuries et du marché noir. Cette libéralisation, loin de démocratiser l’accès au carburant, pourrait creuser les inégalités régionales.

En confiant la distribution à ces acteurs non connus, le gouvernement expose les consommateurs à des hausses de prix incontrôlées. Dans un marché où la concurrence est limitée à trois sociétés, le risque de collusion ou de pratiques anticoncurrentielles est élevé. Le compte rendu ne mentionne aucun mécanisme de régulation pour protéger les citoyens contre l’exploitation. L’Agence de stabilisation des prix des produits pétroliers, censée jouer ce rôle, est notoirement sous-financée et inefficace. Sans un cadre strict, ces sociétés pourraient imposer des marges exorbitantes, aggravant la précarité des ménages centrafricains.

L’impact environnemental est une autre omission criante. Le transport et la distribution de produits pétroliers comportent des risques majeurs: fuites, déversements, pollution des sols et des eaux. Pourtant, le gouvernement n’exige aucune garantie environnementale de la part des nouveaux distributeurs. Dans un pays où les capacités de réponse aux catastrophes écologiques sont quasi nulles, cette négligence est irresponsable. Les citoyens de Bangui, déjà confrontés à la pollution de la rivière Oubangui, n’ont pas besoin de nouveaux désastres causés par des opérateurs mal préparés.

L’opacité entourant ces agréments reflète une gouvernance défaillante. Le compte rendu se contente d’affirmer que les sociétés se sont acquittées des frais d’agrément, comme si le paiement d’une somme suffisait à garantir leur compétence. Cette approche purement administrative ignore les enjeux stratégiques du secteur pétrolier, qui représente une part significative de l’économie centrafricaine. En l’absence d’un débat public ou d’une consultation des acteurs locaux – transporteurs, consommateurs, associations –, le gouvernement agit en vase clos, renforçant le sentiment d’exclusion des citoyens.

Alors que la RCA lutte pour stabiliser son économie, peut-on sérieusement croire que l’agrément de trois sociétés pétrolières, dans un climat d’opacité et de dysfonctionnements, améliorera l’accès aux carburants? Cette décision, loin de moderniser le secteur, risque d’aggraver les pénuries, les inégalités et les risques environnementaux. Le gouvernement doit répondre à des questions cruciales: qui bénéficie réellement de ces agréments? Quelles garanties protègent les consommateurs et l’environnement? Sans transparence, régulation et accountability, cette libéralisation n’est qu’un mirage, laissant les Centrafricains face à un secteur pétrolier toujours plus opaque et dysfonctionnel….

 

Source: Corbeau News Centrafrique

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