Afrique Moins Sollicitée Par Meta Pour Données Utilisateurs

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Afrique Moins Sollicitée Par Meta Pour Données Utilisateurs
Afrique Moins Sollicitée Par Meta Pour Données Utilisateurs

Africa-Press – CentrAfricaine. Au fil du temps, les réseaux sociaux qui contribuent grandement à la liberté d’expression à travers le monde deviennent de plus en plus le champ de multiples dérives. Bien que plusieurs gouvernements songent à les réguler, trouver le juste milieu entre préservation de la liberté et restriction des abus fait débat.

Alors que les gouvernements du monde entier multiplient leurs requêtes auprès de Meta pour obtenir des informations sur les utilisateurs de Facebook, Instagram et WhatsApp, l’Afrique apparaît comme la région qui a sollicité le moins le géant américain en 2024. Une réalité qui interroge autant qu’elle révèle les disparités numériques et réglementaires du continent.

Des chiffres qui parlent d’eux-mêmes. Selon le dernier Rapport de transparence 2024 de Meta sur les demandes gouvernementales de données d’utilisateurs, l’Afrique est de loin la région qui enregistre le plus faible volume de requêtes. Là où les États-Unis, l’Europe et l’Inde adressent chaque semestre plusieurs dizaines de milliers de demandes, les requêtes des pays africains se comptent parfois en dizaines, rarement en centaines. Le Maroc fait figure d’exception, avec 1188 demandes de données en 2024, suivi par la Tunisie (121), la Libye (68), l’Algérie (54), le Ghana (38), l’Afrique du Sud (36) et le Kenya (35). Mais en dehors de ces quelques pays, la quasi-totalité du continent reste absente du tableau. À titre de comparaison, les États-Unis à eux seuls ont adressé plus de 150 000 requêtes en 2024.

Types d’informations divulguées

Les requêtes ciblent les comptes dont les contenus peuvent être considérés dangereux par les Etats. Selon Meta, « les représentants du gouvernement demandent parfois des données sur les utilisateurs de Facebook dans le cadre d’enquêtes officielles. La grande majorité de ces demandes concernent des affaires criminelles, telles que des vols ou des enlèvements. Dans de nombreux cas, ces demandes visent à obtenir des informations de base sur les abonnés, telles que leur nom, leur date d’inscription et leur ancienneté. D’autres demandes peuvent également porter sur les journaux d’adresses IP ou le contenu des comptes ».

« En cas d’urgence, les forces de l’ordre peuvent soumettre des demandes sans procédure judiciaire. Selon les circonstances, nous pouvons divulguer volontairement des informations aux forces de l’ordre si nous avons de bonnes raisons de croire que l’affaire implique un risque imminent de blessure physique grave ou de décès », ajoute Meta.

Une faible demande qui interroge

Au-delà de la poignée de pays qui ont émis des demandes d’informations, la quasi-totalité du continent où Facebook est pourtant utilisé n’a généré aucune requête. Ce contraste soulève de nombreuses questions sur les capacités institutionnelles des administrations africaines, des moyens techniques ou juridiques pour formuler des requêtes formelles et exploitables par Meta. Il y a aussi la question des cadres légaux adéquats, quand l’on sait que la régulation du numérique est encore en chantier dans nombre de pays, et que les procédures de demandes de données ne sont pas harmonisées. La judiciarisation du cyberespace est également une autre préoccupation. Contrairement à l’Europe ou aux États-Unis où les données numériques sont régulièrement utilisées comme preuves dans les enquêtes criminelles, ce réflexe reste marginal en Afrique. Les questions de souveraineté et de confiance des Etats africains sont aussi à prendre en considération. Certains gouvernements peuvent privilégier d’autres moyens (surveillance locale, restriction de services par les opérateurs télécoms) plutôt que de solliciter directement Meta.

Des enjeux multiples

Le faible volume de requêtes africaines auprès de Meta ne signifie pas absence de surveillance. Mais il traduit un décalage entre le poids croissant des réseaux sociaux dans la vie publique et la capacité des États à mieux encadrer leur usage alors que ces plateformes deviennent le champ de multiples dérives (prostitution et proxénétisme, cyberharcèlement, discours haineux, désinformation et propagande, etc.). Sur le plan juridique, cela peut illustrer la lente adaptation des systèmes judiciaires africains à l’ère digitale. Sur le plan sécuritaire, cette situation peut fragiliser les enquêtes contre la cybercriminalité ou le terrorisme numérique. C’est l’une des raisons pour lesquelles certains pays se sont dotés d’organismes spécialisés. En Côte d’Ivoire, la Plateforme de lutte contre la cybercriminalité (PLCC) a été créée en 2011 pour combattre la cybercriminalité à travers les enquêtes, la sensibilisation et le soutien aux victimes. C’est un organisme d’État, démembrement de la Direction de l’Informatique et des Traces Technologiques (DITT) de l’Agence Nationale de la Sécurité des Systèmes d’Information (ANSSI). Au Burkina Faso, des missions similaires ont été confiées à la Brigade centrale de lutte contre la cybercriminalité (BCLCC), créée en 2020 au sein du ministère de la Sécurité.

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