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Le 21 juillet 2025, le président camerounais Paul Biya a adressé un télégramme officiel à son homologue centrafricain Faustin-Archange Touadéra pour lui demander des clarifications urgentes sur le sort d’Armel Sayo, ancien ministre et chef rebelle centrafricain, extradé vers Bangui par les autorités judiciaires camerounaises en mai dernier. Une démarche exceptionnelle, révélatrice du caractère sensible et préoccupant de cette affaire.
Extradé le 5 mai 2025 à la demande des autorités centrafricaines, Armel Sayo avait été arrêté à Douala le 17 janvier dernier, puis transféré à Yaoundé. La justice camerounaise avait validé son extradition, sans intervention publique de l’exécutif. Mais depuis son retour en Centrafrique, aucune information fiable sur sa détention ou son état de santé n’a été rendue publique. Des rumeurs persistantes évoquent sa disparition, voire son assassinat, après son extraction de l’office central pour la répression du banditisme (OCRB) dans la nuit du 7 au 8 juillet.
Dans un État organisé comme le Cameroun, les extraditions sont encadrées par des procédures strictes. Lorsqu’un individu est remis à un pays tiers, le ministère de la Justice suit le dossier jusqu’à la clôture des poursuites ou jusqu’à la libération de l’intéressé. En cas de préoccupations: absence de nouvelles, violation présumée des droits, ou soupçon de disparition, , le ministre de la Justice peut transmettre ses observations au ministre des Affaires étrangères, qui prend le relais sur le plan diplomatique. C’est ce dernier qui contacte l’ambassade du pays concerné ou adresse une note verbale à son homologue pour obtenir des éclaircissements.
Lorsque ni la voie judiciaire ni la voie diplomatique ne permet d’éclaircir la situation, les ministres concernés rédigent un rapport à l’attention du président de la République. Si les faits apparaissent graves, ambigus ou susceptibles d’engendrer une crise bilatérale ou une pression internationale, le président peut alors s’impliquer personnellement, en adressant un message à son homologue étranger.
C’est ce qui s’est produit dans l’affaire Armel Sayo. Le message signé par Paul Biya évoque « des informations fragmentées et parfois contradictoires » concernant la situation de l’ex-rebelle extradé, et demande formellement à Bangui de fournir trois précisions essentielles: le lieu exact de détention de Sayo, l’état des procédures judiciaires engagées contre lui, et tout élément complémentaire utile à la compréhension de son statut actuel.
Le chef de l’État camerounais insiste aussi sur l’impact de cette affaire au Cameroun: l’opinion publique commence à s’interroger, les partenaires internationaux exigent des garanties, et la coordination sécuritaire entre les deux pays pourrait être affectée. En l’absence de réponses, le silence de Bangui pourrait être interprété comme un désaveu des engagements pris dans le cadre de la coopération judiciaire et sécuritaire régionale.
La gravité de cette démarche présidentielle souligne que le sort d’Armel Sayo n’est plus seulement une affaire judiciaire ou un dossier politique centrafricain. Il devient une question de confiance entre deux États voisins, partenaires dans la lutte contre les groupes armés. En écrivant lui-même à Touadéra, Paul Biya montre que Yaoundé n’entend pas rester silencieux face à un éventuel cas de disparition forcée d’un homme remis aux autorités centrafricaines en toute légalité….
Source: Corbeau News Centrafrique
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