BRDC Saisit Union Africaine Contre Nouvelle Constitution

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BRDC Saisit Union Africaine Contre Nouvelle Constitution
BRDC Saisit Union Africaine Contre Nouvelle Constitution

Africa-Press – CentrAfricaine. Le Bloc Républicain pour la Défense de la Constitution (BRDC) vient d’adresser une lettre officielle à l’Union africaine pour contester des dispositions de la nouvelle Constitution centrafricaine du 30 août 2023 qu’il juge discriminatoires. Martin Ziguelé , porte-parole du BRDC, dénonce l’introduction d’articles qui limitent l’éligibilité des citoyens en fonction de leur origine.

Les articles 10 et 67 de la nouvelle Constitution imposent la condition de “Centrafricain d’origine né de parents centrafricains d’origine” pour accéder à certaines fonctions, notamment la présidence de la République. Cette formulation crée une catégorie de citoyens de première classe, les “Centrafricains d’origine” nés de parents eux-mêmes “Centrafricains d’origine” – et relègue tous les autres au rang de citoyens de seconde zone.

Martin Ziguelé qualifie cette disposition d’“absurdité juridique”. Son argument est imparable: la République centrafricaine existe comme État indépendant seulement depuis le 13 août 1960. Avant cette date, le territoire était une colonie française. Comment peut-on exiger d’être “Centrafricain d’origine” né de parents “Centrafricains d’origine” dans un pays qui a moins de 65 ans d’existence?

Cette clause crée une impossibilité logique. Pour être “Centrafricain d’origine” selon cette définition, il faudrait que vos parents soient nés centrafricains. Mais si vos parents sont nés avant 1960, ils n’étaient pas centrafricains puisque le pays n’existait pas encore. Cette contradiction rend théoriquement tout le monde inéligible, y compris le président Touadéra lui-même qui a introduit cette réforme.

Le BRDC affirme que cette disposition instaure une “ségrégation entre citoyens” et l’assimile à une forme d’“apartheid juridique”. Cette comparaison peut sembler forte, mais elle correspond à la réalité: créer des catégories de citoyens avec des droits différents selon leur origine constitue bien une discrimination institutionnalisée.
Martin Ziguelé rappelle que la réforme constitutionnelle n’a pas seulement supprimé la limitation des mandats présidentiels – permettant à Touadéra de se présenter indéfiniment – mais a aussi introduit un critère inédit en Afrique qui menace l’unité nationale. Cette double manipulation constitutionnelle combine autoritarisme personnel et discrimination ethnique.

Dans sa correspondance à l’Union africaine, le BRDC exhorte l’organisation panafricaine à réagir pour empêcher l’aggravation de la crise politique et garantir un processus inclusif. Cette démarche s’inscrit dans la continuité des recommandations du Conseil Paix et Sécurité de l’UA qui, dès 2023, avait demandé aux autorités centrafricaines d’engager un dialogue avec toutes les parties prenantes.

Le mouvement d’opposition insiste sur les conséquences de cette dérive: laisser passer une telle réforme reviendrait à légitimer une exclusion institutionnelle et à fragiliser davantage la cohésion sociale dans un pays déjà déchiré par des décennies de conflits.

Cette saisie de l’Union africaine pose aussi la question de la crédibilité de cette organisation. Combien de fois le Conseil Paix et Sécurité a-t-il déjà appelé au dialogue en Centrafrique? Combien de résolutions ont été adoptées puis ignorées par le régime Touadéra? L’UA a-t-elle les moyens et la volonté d’imposer le respect de ses propres décisions?

L’expérience des dernières années enseigne le scepticisme. L’Union africaine émet régulièrement des communiqués et des recommandations sur la Centrafrique, mais le régime continue sa dérive autoritaire sans conséquence réelle. Cette passivité de l’organisation panafricaine encourage Touadéra à poursuivre ses violations constitutionnelles.

La disposition sur les “Centrafricains d’origine” pose également des questions pratiques pour les élections à venir. Comment vérifier que les candidats remplissent ce critère? Qui décidera si quelqu’un est “Centrafricain d’origine” ou non? Sur quels documents cette détermination se basera-t-elle? Ces questions ouvrent la porte à l’arbitraire le plus complet.

Le Conseil constitutionnel, désormais aux ordres du régime depuis le limogeage de Danièle Darlan, pourra disqualifier n’importe quel candidat gênant en invoquant cette clause floue. Cette arme juridique permet d’éliminer toute opposition sérieuse sans avoir à justifier la décision autrement que par une interprétation subjective de l’origine du candidat.

Cette discrimination institutionnalisée rappelle les heures les plus sombres de certains régimes africains qui avaient instauré des critères ethniques ou régionaux pour l’accès aux fonctions publiques. La Centrafrique rejoint malheureusement ce club peu glorieux des pays qui pratiquent l’exclusion constitutionnelle.

Le BRDC a raison de qualifier cette situation d’“apartheid juridique”. Quand la Constitution elle-même établit des catégories de citoyens avec des droits différents, quand l’accès aux plus hautes fonctions dépend d’un critère d’origine impossible à définir clairement, on entre effectivement dans une logique de ségrégation légale.

Cette dérive vient s’ajouter à toutes les autres violations du processus démocratique: convocation du corps électoral dans l’illégalité, absence de listes électorales vérifiables, refus du dialogue avec l’opposition, répression des voix dissidentes. Le régime Touadéra accumule les entorses aux règles démocratiques sans que personne ne l’arrête.

La saisine de l’Union africaine par le BRDC constitue une tentative de mobiliser la communauté continentale contre ces dérives. Mais cette démarche aboutira-t-elle? L’UA a-t-elle la capacité et la volonté d’imposer le respect des principes démocratiques qu’elle prône officiellement?

Les prochaines semaines donneront la réponse. Si l’Union africaine reste passive face à cette Constitution discriminatoire, elle validera implicitement l’introduction de critères d’apartheid juridique dans les textes fondamentaux des États membres. Si elle réagit fermement, elle pourrait contraindre le régime Touadéra à revoir ces dispositions problématiques.

Les Centrafricains attendent de voir si l’organisation panafricaine prendra au sérieux cette saisine ou si elle se contentera d’un communiqué de routine sans conséquence pratique. L’avenir de la démocratie en Centrafrique dépend aussi de la capacité des institutions régionales et continentales à faire respecter leurs propres principes.

Source: Corbeau News Centrafrique

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