Député Akovourou: Trois Mois de Garde à Vue

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Député Akovourou: Trois Mois de Garde à Vue
Député Akovourou: Trois Mois de Garde à Vue

Africa-Press – CentrAfricaine.
Depuis trois mois, le député Lambert Akovourou de Djéma dort sur du béton à l’Office central pour la répression du banditisme. Trois mois qu’un élu du peuple est enfermé sans que la justice puisse produire la moindre preuve contre lui. Son crime? Avoir été accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux. C’est tout. Pas de preuves matérielles, pas d’enquête sérieuse, juste une accusation en ligne qui a suffi pour expédier un parlementaire en prison.

L’histoire commence avec l’assassinat du sous-préfet de Djéma, Dieudonné Zangbe Nguilelo, enlevé le 14 avril 2025 et retrouvé égorgé le 17 mai. Michel Trogode, chef de centre de l’hôpital de Djéma, publie alors une vidéo accusant le député Akovourou et le maire d’avoir organisé ce crime. Le lendemain, les policiers débarquent au domicile du député à Bangui et l’arrêtent.

Voilà sur quoi repose cette arrestation: une vidéo sur internet. En la République centrafricaine de 2025, il suffit qu’une accusation circule sur les réseaux sociaux pour que le procureur décrète un “état de crime apparent” et envoie quelqu’un en prison. Plus besoin d’enquête préliminaire, plus besoin de vérifications, plus besoin de respecter l’immunité parlementaire. Une vidéo Facebook vaut désormais mandat d’arrêt.

Le procureur a parlé de “flagrant délit ” pour justifier cette arrestation. Mais de quel flagrant délit s’agit-il? Le député dormait tranquillement chez lui quand on est venu le chercher. Il n’était pas en train de commettre un délit, il n’avait pas d’arme sur lui, il ne fuyait pas la justice. Le seul élément “apparent” dans cette affaire, c’est l’incompétence de la justice centrafricaine.

Car rappelons les règles: un député jouit de l’immunité parlementaire. Cette protection ne peut être levée qu’après autorisation de l’Assemblée nationale. Mais le régime Touadéra s’assied sur ces principes. On arrête d’abord, on cherche les justifications juridiques plus tard. Et si on ne les trouve pas, tant pis, on garde le député en prison quand même.

Trois mois après cette arrestation spectacle, où en est l’enquête? Nulle part. Les enquêteurs n’ont rien trouvé qui puisse étayer les accusations de Michel Trogode. Aucune preuve matérielle, aucun témoignage crédible, aucun élément tangible. La justice reste bloquée, incapable de monter un dossier sérieux. Mais elle maintient Lambert Akovourou derrière les barreaux, sur du béton, dans des conditions déplorables.

Cette situation s’interroge: dans quel pays peut-on maintenir quelqu’un en prison pendant trois mois sans preuves? Dans quel système judiciaire une simple vidéo sur les réseaux sociaux suffit-elle à justifier une détention prolongée? La réponse est évidente: dans un pays où la justice sert d’instrument de répression politique.

L’ironie de cette histoire, c’est que Michel Trogode, l’auteur de la vidéo accusatrice, a lui aussi été arrêté. Des mercenaires russes sont venus le chercher à Djéma, l’ont embarqué dans un hélicoptère et transféré à Bangui où il est maintenant détenu. Donc l’accusateur et l’accusé se retrouvent tous les deux en prison. La justice centrafricaine dans toute sa splendeur: on arrête tout le monde et on verra bien qui est innocent.

Cette dérive ne surprend plus personne. Dans un régime qui modifie la Constitution à sa guise, qui ignore les décisions de sa propre Cour constitutionnelle, qui fait appel aux mercenaires pour gouverner, violer l’immunité parlementaire n’est qu’une étape de plus. Chaque jour, ce pouvoir repousse un peu plus les limites de l’acceptable.

Le député Lambert Akovourou paie aujourd’hui le prix de cette dérive. Il dort sur du béton depuis trois mois pour avoir été mentionné dans une vidéo. Pendant ce temps, les vrais responsables de l’insécurité à Djéma continuent leurs activités. Les soupçons qui pèsent sur l’implication de Wagner dans cet assassinat sont soigneusement évités par les enquêteurs. On préfère s’acharner sur un député que d’enquêter sur les mercenaires.

Cette justice sélective en dit long sur les priorités du régime. Quand il s’agit de poursuivre l’opposition ou les élus dérangeants, tous les moyens sont bons: violation de l’immunité, détention arbitraire, conditions inhumaines. Mais quand il s’agit d’enquêter sur les crimes des alliés du pouvoir, là, mystérieusement, la justice devient prudente.

Au final, l’affaire Akovourou résume tout ce qui ne va pas dans ce pays. Un député élu croupit en prison sur la base de rumeurs. La Constitution est piétinée quand elle gêne. Les droits humains sont ignorés quand ils protègent les opposants. Et tout cela se passe dans l’indifférence générale, comme si c’était devenu normal.

Trois mois que Lambert Akovourou attend qu’on lui présente des preuves de sa culpabilité. Trois mois que la justice centrafricaine démontre son mépris pour les procédures légales. Trois mois que ce régime prouve qu’il n’a de démocratique que le nom qu’il se donne.

Source: Corbeau News Centrafrique

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