Africa-Press – CentrAfricaine. À Bangui, le gouvernement présente sa Politique des droits de l’homme , face à une réalité traversée par des injustices et des exactions.
Le 7 mai 2025, le ministère de la Justice et de la Promotion des droits humains, en partenariat avec la MINUSCA, a lancé un atelier de deux jours à Bangui pour promouvoir la Politique nationale des droits de l’homme (PNDH), adoptée en 2023. Ce document est présenté comme un cadre pour protéger les droits des Centrafricains, notamment en période électorale. Mais dans un pays où les abus sont fréquents, cette initiative semble davantage servir des intérêts politiques que répondre aux besoins des citoyens.
Une vitrine électorale pour le pouvoir
Le gouvernement brandit la PNDH comme un étendard des droits humains, mais cette démarche apparaît opportuniste. À l’approche des élections, le président Baba Kongoboro et son entourage craignent les débats autour du troisième mandat, un sujet qui divise et inquiète. En période de tension, les droits humains deviennent un outil pour amadouer la population et apaiser les critiques, tant locales qu’internationales. Ruffin Julien Ngoadebaba , chargé de mission au ministère, a décrit la PNDH comme une « boussole », mais les Centrafricains y voient plutôt une manœuvre pour calmer les esprits. Quand les projecteurs électoraux s’éteignent, les engagements en faveur des droits humains s’estompent, réservés aux moments où ils servent les intérêts du pouvoir.
Des abus qui contredisent le discours
Les annonces sur la PNDH contrastent avec la réalité. Des organisations comme Human Rights Watch et Amnesty International documentent régulièrement des violations graves: exécutions sans procès, arrestations sans fondement, violences par les forces de l’État ou leurs alliés russes du groupe Wagner. En 2024, des rapports ont signalé des civils arrêtés sans motif clair, souvent pour des accusations floues comme « atteinte à la sécurité de l’État ». Ces pratiques, loin des principes de la PNDH, montrent que les droits humains restent un slogan plus qu’une priorité.
Le système judiciaire, censé protéger les citoyens, aggrave la situation. Les centrafricains parlent d’une « mafia judiciaire » où le ministère de la Justice protège les proches du pouvoir tout en ciblant les simples citoyens et les opposants. Cette partialité mine la crédibilité de la PNDH, qui promet pourtant de défendre les droits civils et politiques.
Une période électorale sous tension
L’atelier de Bangui met l’accent sur des élections respectueuses des droits, une nécessité après des scrutins marqués par des violences. La PNDH est censée garantir des votes libres et apaisés, mais le climat actuel rend cet objectif fragile. En 2023, des rapports de la MINUSCA ont pointé des pressions exercées par les forces de l’État sur des électeurs et des candidats lors des élections locales. Ces actes, rarement sanctionnés, montrent que le gouvernement parle de droits humains quand cela l’arrange, notamment pour séduire l’opinion en période électorale.
La MINUSCA, entre soutien et silence
La MINUSCA, partenaire de l’atelier, soutient la PNDH, mais son rôle interroge. Chargée de protéger les civils, la mission reste souvent silencieuse face aux abus de l’État ou de ses alliés, comme les mercenaires du groupe Wagner, impliqués dans des violences régulières depuis 2021 jusqu’à ce jour, selon des sources indépendantes. Elle critique plus volontiers les rebelles, ce qui alimente les soupçons de partialité. En appuyant la PNDH, la MINUSCA donne une légitimité au gouvernement, mais sans s’attaquer aux violations qui touchent les Centrafricains au quotidien.
Des familles prises pour cibles
Un aspect ignoré par la PNDH est la persécution de familles entières. Des informations crédibles rapportent que, lorsqu’une personne est soupçonnée d’opposition, ses proches, parents, siblings, sont arrêtés, même sans lien avec les faits reprochés. Le cas palpable est celle de la famille Sayo. Cette pratique, qui brise des foyers et viole les lois internationales sur la responsabilité individuelle, est absente des discussions officielles. Elle illustre à quel point la PNDH passe à côté des vraies souffrances des citoyens.
Une population sceptique
Ce qui est troublant, à la fin de cet atelier, un soi-disant membre de la société civile salue l’atelier, mais beaucoup de Centrafricains restent méfiants. Après des années d’injustices, les annonces du gouvernement peinent à convaincre. La promesse de traduire la PNDH en langues locales et de la diffuser dans les provinces est vue comme une tentative de communication, surtout en période électorale. Les citoyens, lassés par les discours, attendent des changements qu’ils ne voient pas venir….
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