Consommation Optimale des Légumineuses pour Bénéfices

0
Consommation Optimale des Légumineuses pour Bénéfices
Consommation Optimale des Légumineuses pour Bénéfices

Africa-Press – CentrAfricaine. Privilégier une salade de pois chiches à une soupe mixée à base de la même légumineuse permettrait non seulement d’éviter une digestion trop rapide — et donc une sensation de satiété trop brève —, mais aussi de limiter une élévation brutale du taux de sucre dans le sang. C’est la conclusion d’une étude menée par une équipe du département de recherche en nutrition de la faculté de médecine de l’Imperial College Hammersmith, à Londres.

Elle apporte une preuve supplémentaire à la notion d’ »effet matrice alimentaire »: l’idée selon laquelle la structure physique des aliments joue un rôle clé dans leur valeur nutritionnelle — au-delà de leur simple composition en nutriments (glucides, protéines, lipides, vitamines…).

Pour parvenir à ces résultats, les chercheurs, chercheuses ont équipé dix volontaires d’une sonde nasogastrique — un long tube introduit par le nez jusqu’au côlon — afin de suivre en temps réel le processus de digestion.Pendant trois jours, les participants ont consommé trois types de repas à base de pois chiches, identiques du point de vue des macronutriments, cuits puis transformés pour présenter des structures cellulaires différentes: dans la première version, les cellules de la légumineuse étaient intactes ; dans la deuxième, elles étaient dissociées ; dans la troisième, leurs parois cellulaires avaient été complètement détruites.


« La structure d’un aliment influence la qualité de la digestion »

Grâce à l’utilisation de sondes nasogastriques, les chercheuses et chercheurs ont pu prélever le contenu du tube digestif afin d’étudier la digestion des pois chiches. Ils y ont observé deux molécules: d’une part, l’amidon, principal glucide des pois chiches ; d’autre part, le maltose, un sucre simple résultant de la dégradation de cet amidon. Ces deux composés constituent des indicateurs clés pour évaluer l’avancement du processus digestif.

Ces observations ont été complétées par des analyses sanguines, mesurant à la fois le taux de sucre et les concentrations hormonales. Ces hormones, comme le GLP-1 ou le PYY, sont liées à la sensation de satiété, d’autres comme le GIP, participe à la régulation du glucose dans le sang. « C’est, à ma connaissance, l’étude la plus complète menée chez l’humain qui conforte encore plus le concept selon lequel la structure d’un aliment influence la qualité de la digestion: la destruction de la paroi cellulaire modifie profondément le processus digestif », explique Antony Fardet, chercheur à l’INRAE et auteur de nombreux travaux sur le sujet.

Il ajoute: « Nous sommes ici face à un protocole très rigoureux, avec un jeu de données particulièrement riche, qui vient compléter une toute première étude menée dès 1977 sur l’ « effet matrice » d’un fruit. À l’époque, dix participants avaient consommé soit un jus de pomme, soit une compote, soit une pomme entière. On avait alors mesuré le taux de sucre et d’insuline dans le sang à l’aide de prises sanguines, mais sans pouvoir observer précisément le déroulement complet de la digestion. »


Un retour précoce de la sensation de faim

Tout commence dès l’entrée de l’aliment dans la bouche. Les scientifiques londoniens ont montré que l’amidon — un glucide complexe composé de longues chaînes de molécules de glucose — présent dans les pois chiches commence à être dégradé par l’amylase, une enzyme présente dans la salive, lorsqu’il n’est pas protégé par la paroi cellulaire. Chez les participants ayant consommé des pois chiches très transformés, les auteurs et autrices de la publication ont ainsi observé, dès l’estomac, une forte présence de maltose, un sucre formé de deux unités de glucose, signe d’une digestion précoce.

A l’inverse, lorsque les pois chiches sont consommés entiers, les enzymes buccales ont peu d’effet: on retrouve dans l’estomac des volontaires une part importante d’amidon non digéré. Pour qu’il soit assimilé, l’organisme doit d’abord désagréger la paroi cellulaire, puis décomposer l’amidon en sucres simples grâce aux enzymes digestives de l’intestin. Ce processus plus long ralentit la digestion: l’amidon est moins biodisponible, et l’indice glycémique du pois chiche reste plus bas. Les analyses sanguines montrent alors une sécrétion progressive des hormones de la satiété, comme le GLP-1 et le PYY, ce qui prolonge la sensation de rassasiement.

A l’inverse, dans les pois chiches très déstructurés, dont la structure cellulaire est rompue, les sucres sont rapidement disponibles. Ils passent vite dans le sang, provoquant une libération rapide de l’hormone GIP, un pic d’insuline, puis un retour précoce de la sensation de faim.


« Il est important de consommer des aliments bruts ou peu transformés »

« Cette étude rappelle à quel point il est important de consommer des aliments bruts ou peu transformés, par exemple de préférer les céréales complètes aux produits raffinés ou des fruits entiers aux jus, commente Antony Fardet. Elle montre aussi que l’utilisation, par l’industrie agroalimentaire, d’ingrédients que je qualifie d’a-matriciels ou a-cellulaires — comme les isolats de fibres ou les sirops de glucose — modifie profondément la digestion, puis le métabolisme. »

Et il conclut: « Il faut toujours privilégier les aliments solides, comme les pois chiches entiers en salade, qui nécessitent d’être mastiqués et permettent une digestion de meilleure qualité pour l’organisme. Cela ne veut pas dire qu’il faut bannir des aliments semi-solides comme le houmous, qui reste intéressant, mais il convient de limiter une déstructuration trop poussée des aliments— par exemple sous forme liquide. »

L’effet des procédés industriels sur la valeur nutritionnelle d’un aliment

En 2022, les chercheurs Antony Fardet et Edmond Rock ont publié dans European Journal of Nutrition un article qui pose les bases théoriques de la notion de matrice alimentaire. Ils y analysent les données scientifiques disponibles à ce sujet.

Plutôt que de se focaliser uniquement sur les apports en calories ou en nutriments (glucides, lipides, protéines, vitamines…), les auteurs suggèrent que c’est la structure physique des aliments — leur matrice — qui joue un rôle déterminant. Cette matrice, lorsqu’elle est altérée par les procédés industriels (raffinage, extrusion, broyage, soufflage…), rend les nutriments trop facilement disponibles pour la digestion, ce qui modifie profondément les réponses physiologiques de l’organisme.

Fardet et Rock s’appuient sur plusieurs indicateurs pour étayer leur hypothèse:

– L’indice glycémique, qui mesure la vitesse à laquelle un aliment élève le taux de sucre dans le sang

– La biodisponibilité des nutriments, soit la proportion réellement assimilée par l’organisme

– Le potentiel de satiété

– Et les effets synergiques des composants d’un aliment entier, souvent perdus quand on le fractionne ou l’ultra-transforme.

Ils posent la preuve de concept que les matrices excessivement dégradées et/ou artificialisées seraient les premières responsables des maladies chroniques liées à l’alimentation, avant le contenu en nutriments de l’aliment. Un exemple emblématique est celui du diabète de type 2 (DT2). Bien qu’il soit souvent attribué à une consommation excessive de sucre, les auteurs rappellent qu’il ne s’agit pas seulement de quantité, mais de forme. Les sucres dits « libres », non intégrés à une matrice, sont absorbés trop rapidement. Résultat: pics de glycémie, hyperinsulinisme, puis insulino-résistance… jusqu’au diabète. Au final, les auteurs suggèrent que le DT2 est plus lié à un problème de glucides « libres » sans matrice qu’à un excès de glucides ou de sucres en tant que tels. À l’inverse, dans de nombreuses sociétés traditionnelles, où les glucides sont consommés sous des formes peu transformées (riz, millet, maïs complets…), le diabète reste peu fréquent, même lorsque les apports glucidiques sont élevés.

Pour plus d’informations et d’analyses sur la CentrAfricaine, suivez Africa-Press

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here