Maoulida Mbaé
Africa-Press – Comores. Dans son ordonnance rendue le 24 avril 2023, la présidente de tribunal judiciaire de Mamoudzou rejette la demande de renvoi formulée par la représentante du préfet de Mayotte et ordonne en même temps au préfet de Mayotte de cesser toute opération d’évacuation et de démolition des habitions. Une véritable douche hollandaise pour Thierry Suquet qui a assuré lors d’une conférence de presse que rien au monde n’arrêtera les opérations.
La présidente du tribunal de Mamoudzou Catherine Vannier vient de donner un coup d’arrêt aux opérations de démolition des habitions dans le cadre de l’opération de Wuambushu censée démarrer le mardi 25 avril 2023. Une vingtaine de personnes toutes résident à Mjicavo, Koropa et Talus II, assistées par une dizaine d’avocats de divers barreaux de France ont saisi la présidente du tribunal de Mamoudzou pour assigner le préfet de Mayotte devant le juge des référés.
Pour les avocats des requérants, les agissements de l’Etat constituent une voie de fait fondant la compétence du juge judiciaire. Tout comme, ces agissements constituent un trouble manifestement illicite et nécessite une intervention en urgence fondant la compétence du juge des référés.
Par conséquence dans leur requête, les requérants ont demandé au tribunal d’ordonner au préfet de Mayotte de cesser toute opération d’évacuation et de démolition des habitats visés dans le périmètre dans son arrêté en date du 2 décembre 2022. De proposer aux habitants des solutions de logement adaptées à leur composition familiale et leur situation de vulnérabilité et, en particulier leur situation médicale ou de handicap – condamner le préfet de Mayotte aux entiers dépens et à une somme de 2 000 euros pour chaque demandeur.
Dans l’audience, la représentante du préfet de Mayotte a sollicité le renvoi de l’affaire indiquant qu’il n’existe aucune urgence, les abris des requérants n’étant pas compris dans l’opération de démolition. Elle fera savoir que les architectes mandatés par les requérants n’ont pas fait le déplacement sur les lieux, contestant de ce fait, les conclusions de leur enquête.
Une demande rejetée par le tribunal notifiant que comme l’opération de démolition et d’évacuation doit débuter demain 25 avril (mardi : ndlr), un renvoi rendrait sans objet l’arrêt de démolition formée par les requérants.
Par contre la présidente du tribunal de justice de Mamoudzou Catherine Vannier retient presque tous les éléments versés par les avocats des requérants. Notamment les conclusions du rapport des cabinets d’architecte contacté sur cette affaire.
Sur la base du rapport d’enquête de l’agence régionale de la santé (ARS), un cabinet d’architecte à Rennes après études des documents et photographies, constate que les habitations du périmètre visé par l’arrêté du préfet sont imbriquées les uns avec les autres sans autres accès que des petits chemins en terre.
Pour opérer la démolition des logements, il est nécessaire de faire passer des engins notamment pour la démolition et l’évacuation des gravats. Le matériel utilisé risque de provoquer des vibrations et des secousses avec des conséquences sur les habitations non concernées par la démolition. Autre constat fait, c’est la menace pesant sur l’ensemble des constructions présentes sur le site avec des dommages inévitables. Dans son étude l’architecte avance que la déclivité importante rend l’opération encore plus risquée et « l’ensemble tient à la manière d’un jeu de mikado instable et fragile mais en équilibre. Modifier ce tissu aléatoire provoquera sans aucun doute des dommages collatéraux qu’il n’est pas possible d’évaluer aujourd’hui puisque ces constructions restantes après l’opération et donc la sécurité de leur occupants. »
Mêmes conclusions pour une autre architecte de Montreuil selon qui les éléments exposés démontrent que la démolition des habitations des voisins fragilisera celles de leurs clients.
Par ces éléments le tribunal délibère en faveur des requérants qui en plus ont obtenu l’arrêt des démolitions, ont vu le préfet condamné à verser la somme globale de 100 euros.
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