ce que l’ex-président Sambi a écrit à Azali Assoumani

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Comores : ce que l’ex-président Sambi a écrit à Azali Assoumani
Comores : ce que l’ex-président Sambi a écrit à Azali Assoumani

Africa-PressComores. En détention provisoire depuis août 2018, l’ancien président des Comores Ahmed Abdallah Sambi vit depuis reclus dans sa résidence de Voidjou, sur l’île de Grande-Comore. Dans une lettre de douze pages adressée au président Azali Assoumani, il réclame un geste.

Sur l’archipel des Comores, le provisoire s’inscrit parfois dans la durée. C’est particulièrement vrai pour la décision de justice prise à l’encontre de l’ex-président Ahmed Abdallah Sambi. Placé en résidence surveillée le 18 mai 2018, officiellement pour avoir troublé l’ordre public, celui qui a fut le chef d’État comorien entre 2006 et 2011 est maintenu en détention « provisoire » à son domicile depuis le 20 août de cette même année, suite à sa mise en examen pour détournement de deniers publics dans le cadre du programme de citoyenneté économique qu’il a initié en 2008.

La loi prévoyant un délai de quatre mois maximum renouvelable une fois, Ahmed Abdallah est donc depuis avril 2019 « séquestré par la justice, hors de tout droit pénal », selon la formule de Mahamoud Ahamada, son avocat.

Anjouanais d’origine, Ahmed Abdallah Sambi vit reclus depuis deux ans dans sa résidence de Voidjou, sur l’île de Grande-Comore – où il a eu 62 ans le 5 juin, sans téléphone et aucun droit de visite. Ses proches le disent malade, comme semble le confirmer une ordonnance signée le 2 janvier 2020 par le cabinet du juge d’instruction de Moroni l’autorisant à partir se faire soigner à l’étranger, mais aujourd’hui encore restée sans suite.

Comme l’ensemble de la procédure judiciaire le concernant, au point mort ces derniers mois malgré les nombreux pourvois de ses avocats pour le faire libérer. Lorsqu’il est interpellé sur le sujet, le président Azali Assoumani affirme laisser travailler la justice qui de son côté confirme qu’elle suit son cours. Et si la détention d’Ahmed Abdallah Sambi a été qualifiée d’ »arbitraire » dès novembre 2018 par l’ONU et l’UA, la situation du président d’honneur du principal parti d’opposition du pays, Juwa, ne provoque aucune émotion particulière dans les chancelleries, notamment à Paris.

Craignant autant l’oubli qu’un déni de justice qui ne feraient qu’entériner le fait accompli, l’ancien président a profiter de la date anniversaire de son incarcération pour se rappeler au bon souvenir de l’actuel locataire du palais de Beit Salam.

Il a pris sa plus belle plume pour lui adresser une lettre de douze pages, dans laquelle, après avoir rappelé son état de santé chancelant, il dénonce pèle-mêle le déroulement de la procédure judiciaire dont il fait l’objet, les conditions de sa détention et surtout les raisons de cette dernière. « Je n’ai pas peur de la justice mais de l’injustice », écrit-il pour conclure son courrier daté du 16 mai.

Victime selon ses avocats d’une « procédure plus politique que judiciaire », Ahmed Abdallah Sambi rappelle que sa dernière audition date du 19 avril 2019 et affirme que l’instruction en cours n’a toujours pas réussi à prouver les accusations dont il fait l’objet. Il feint d’ailleurs de s’interroger sur l’enquête elle-même : « concerne-t-elle seulement ma présidence ou les onze années d’application de la loi sur la citoyenneté économique ? », répondant lui-même à sa question, en rappelant que son successeur entre 2011 et 2016, Ikililou Dhoinine, n’avait jamais été convoqué par la justice.

Un rapport parlementaire remis au président Azali Assoumani début 2018 accuse Ahmed Abdallah Sambi d’avoir été le principal bénéficiaire du programme de citoyenneté économique, lancé entre 2008 et 2016 pour permettre de donner la nationalité comorienne à certaines populations apatrides des Émirats arabes unis. Quatre milles passeports devaient être distribués pour rapporter 200 millions de dollars à l’État comorien. Avant que le programme ne tourne au fiasco financier pour l’archipel.

Au final, plus de 48 000 documents auraient été émis, provoquant un manque à gagner estimé à près d’un milliard de dollars pour les finances comoriennes, dont 135 millions détournés par Ahmed Abdallah Sambi durant ses fonctions d’après l’enquête parlementaires. « Un rapport fantaisiste, qui énonce des faits sans jamais les prouver, mais suffisant pour justifier mon placement en détention provisoire », estime l’ancien président qui, dans sa lettre, en appelle « au garant des institutions de la République ». Ce dernier ne lui a, pour l’instant, pas répondu.

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