Africa-Press – Comores. Dresser un état des lieux, confronter les approches et débattre des leviers d’action, tel a été l’objectif du panel sur l’équité du genre, réunissant cinq intervenants issus des sphères institutionnelles, associatives et internationales. Il en est ressorti que le pays a enregistré 722 cas de violences en 2024, contre 769 en 2023.
Bien que ce chiffre soit en baisse par rapport à l’année 2023, il demeure alarmant et doit interpeler l’ensemble de la société afin de mettre un terme à ce fléau. C’est dans cette perspective que la question des violences faites aux personnes vulnérables a été au cœur du panel sur l’équité du genre, organisé dans le cadre du séminaire gouvernemental qui se tient à Moroni du 12 au 17 mai. Le débat modéré par la commissaire générale au Plan, Nadjda Said Abdallah, a vu se succéder plusieurs voix institutionnelles et civiles autour d’une problématique jugée “transversale, « à la croisée du droit, de la culture et du social ». Dans son intervention la ministre chargée de la promotion du Genre Fatima Ahamada, a insisté sur l’urgence de « sortir du silence et de mobiliser chaque secteur, chaque acteur, pour briser les chaînes de l’impunité ». Selon elle, « les services d’écoute restent trop peu connus, et les comportements ne changent pas assez vite ».
Car d’après le bulletin de données sur les violences faites aux femmes et aux enfants, 722 cas de violences ont été enregistrés aux Comores en 2024, contre 769 en 2023. Si la baisse semble encourageante, elle reste insuffisante. « 590 des victimes sont des filles âgées de 11 à 17 ans », a rappelé Idriss Ali Charif, directeur de la protection sociale. Soit plus de 82% des cas, contre 12% pour les garçons.
« Ce sont des chiffres effrayants », a réagi M. Moustoifa, représentant de l’UNICEF, qui a défendu une stratégie de prévention axée sur l’éducation. Il a salué des initiatives comme la plateforme Shwabaha, destinée à sensibiliser les jeunes, mais a également souligné les failles de coordination et le manque de budget national dédié ». De son côté, Edith Ouattara, militante engagée dans les réseaux associatifs, a évoqué les résistances culturelles: « Tant que certaines normes sociales continueront à banaliser la violence ou à faire porter la honte aux victimes, nos actions resteront limitées. » Elle a appelé à intégrer la prévention des VBG dans les programmes scolaires, dès le primaire.
Karimou Abdoulwahab, représentant de la société civile, a déploré un « écart croissant entre les textes juridiques et la réalité du terrain », tout en insistant sur l’importance de l’ancrage communautaire. « Les chefs religieux, les notables, les associations locales doivent être les premiers relais du changement. » Un moment fort du panel est à relever, lorsqu’une femme du public a interpellé la salle sur la question de la polygamie. Elle a dénoncé les situations où des hommes prennent une seconde épouse et abandonnent leur première famille, sans assumer leurs responsabilités parentales. Soulignant que cela constitue « une forme de violence basée sur le genre, à la fois morale et économique. »
Une intervention qui a fait un écho immédiat auprès du président de la République, présent dans la salle. Prenant la parole, Azali Assoumani a reconnu que « la polygamie, lorsqu’elle est pratiquée au détriment de la dignité et du bien-être des femmes et des enfants, devient un problème social grave ». Il a rappelé que « le respect des engagements familiaux est un devoir fondamental », appelant à « ne pas détourner les coutumes pour justifier l’irresponsabilité ».À l’issue du panel, tous les intervenants ont convenu que la lutte contre les VBG exige à la fois des réformes structurelles, une éducation précoce à l’égalité, et une implication accrue des communautés.
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