Africa-Press – Côte d’Ivoire. Le Directeur général de la Mutuelle d’assurance des taxis-compteurs d’Abidjan (MATCA), Guédou Élie Ousmane, a été arrêté par la police nationale avec l’appui du pôle pénal économique et financier le mercredi 16 avril 2025. Il est poursuivi pour fraude présumée sur sa nationalité ivoirienne, qui lui aurait permis d’occuper son poste à la tête de la MATCA pendant plus de dix ans.
Des soupçons pesaient depuis quelque temps sur l’authenticité de ses papiers d’identité. Certains sociétaires de la MATCA, lassés par sa longévité à la direction et insatisfaits de sa gestion, ont exigé une enquête approfondie. Ce combat a été d’abord mené par un certain Bailly Dodo Édouard à partir 2012. À bout de force, il a dû relâcher.
En juin 2023, un collectif reprenant le combat a adressé un courrier à la Direction des Assurances, relevant que Guédou avait été nommé pour un mandat de deux ans mais était toujours en poste dix ans plus tard. La Direction avait alors répondu que le conseil d’administration avait la liberté de reconduire un DG autant de fois que nécessaire, selon les statuts de la mutuelle.
Pourtant, ce n’est pas la première fois que des doutes émergent. En 2012 déjà, une enquête commandée par l’ancien président du conseil d’administration, Adama Coulibaly, visait à retrouver l’acte de naissance ivoirien de Guédou. Cette recherche, encadrée par un huissier et réalisée au Tribunal de Grand-Bassam, n’a jamais permis de retrouver le moindre document confirmant une naissance en Côte d’Ivoire.
Les pièces authentifiées que détenait Guédou Élie pointaient clairement vers une origine béninoise. Une carte consulaire béninoise délivrée en 2001, une carte nationale d’identité béninoise valide de 2003 à 2006, et une carte de séjour d’étranger en Côte d’Ivoire datant de 1999 le désignent toutes comme né à Itahoroko, au Bénin.
D’autres documents confirment cette version, notamment un acte de mariage enregistré à Cocody en 2005 dans lequel il se présente également comme Béninois.
Toutefois, en 2007, un changement radical se produit. Guédou se fait délivrer un jugement supplétif d’acte de naissance par le Tribunal de Grand-Bassam, affirmant cette fois être né en 1970 à Grand-Bassam, en Côte d’Ivoire, de parents ivoiriens. Il adopte également un second prénom: Ousmane. Ce jugement n’a jamais été retrouvé dans les registres officiels, ce qui alimente fortement les soupçons de fraude.
Grâce à ce document controversé, il obtient une attestation d’identité ivoirienne, un certificat de nationalité en juin 2007, puis une carte nationale d’identité (CNI) en 2009, renouvelée plus tard en 2011. Il accède alors légalement à la direction de la MATCA avec cette nouvelle identité. Aux mains de la police, Guédou Elie devra répondre de ses actes qui ont causé un énorme préjudice à la Matca.
Cette affaire illustre bien l’ampleur de la fraude sur la nationalité ivoirienne. Puisque le cas de Guédou n’est pas isolé. Dans le passé, des ressortissants libanais ont été interpellés en possession de passeports ivoiriens obtenus illégalement. De nombreux migrants arrêtés en Europe se sont également faussement déclarés Ivoiriens, au point de forcer le gouvernement à démentir officiellement leur origine.
Des réseaux de faussaires exploitent cette faille en vendant des documents d’identité à prix fort, avec la complicité de certains agents de l’administration. Cette pratique mine la crédibilité de la nationalité ivoirienne et facilite l’accès à des postes stratégiques à des individus qui ne respectent pas les voies légales d’acquisition de la citoyenneté.
Il est donc urgent pour les autorités ivoiriennes de renforcer les contrôles d’accès aux documents d’identité et de soumettre les candidats à des postes de haute responsabilité à des enquêtes de moralité rigoureuses. Si Guédou Élie a été démasqué aujourd’hui, d’autres pourraient l’être demain. Ce précédent envoie un message clair à ceux qui tentent de contourner la loi: l’impunité n’est plus garantie.
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