
Africa-Press – Côte d’Ivoire. Dix ans après le massacre de Duékoué, Amadé Ouérémi comparaît depuis le 24 mars devant le tribunal criminel d’Abidjan. Il est accusé d’avoir activement participé aux exactions qui ont fait plus de 800 morts en mars 2011 dans cette ville de l’ouest ivoirien.
Bruno, silhouette frêle et lunettes de soleil opaques sur le nez, se demande encore comment il est possible qu’il soit toujours en vie. Pourquoi, dix ans plus tôt presque jour pour jour, des miliciens ont enlevé puis exécuté son petit frère et pas lui, alors qu’ils marchaient côte à côte ? À la barre, Bruno sanglote, il est pris de tremblements. Le président lui demande brutalement de se ressaisir. Bruno poursuit, un peu sonné.
« C’est grâce à Dieu », dit-il, qu’il peut aujourd’hui témoigner devant le tribunal criminel d’Abidjan des évènements du 29 mars 2011, à Duékoué, théâtre d’un massacre qui fit plus de 800 morts, selon le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Pour se protéger des fusillades qui font rage dehors, les deux frères et leurs familles resteront enfermés trois jours dans leur maison d’un quartier résidentiel. Mais les réserves de nourriture diminuent rapidement et ils doivent se résoudre à sortir pour acheter de quoi manger. À quelques dizaines de mètres seulement du domicile, des hommes en pick-up interpellent sans raison le frère de Bruno, avant de l’exécuter dans un quartier voisin. « J’ai demandé le corps. Ils m’ont dit de donner 10 000 [CFA, 15 euros] ». Stupéfaction dans la salle d’audience.