Africa-Press – Côte d’Ivoire. Lors des réunions de Printemps de la Banque mondiale et du FMI au début d’avril, le sujet de la réforme des institutions de Bretton Woods était dans toutes les bouches.
C’est dans ce contexte, que des représentants des 45 ministères africains des Finances, de la Planification et du Développement économique se sont réunis avec des représentants de l’Union africaine (UA), de la Banque africaine de développement (BAD), d’Afreximbank et de la Banque mondiale (BM) pour discuter lors de la 55e session de la Commission économique pour l’Afrique (CEA).
À l’issue de cette rencontre, les ministres africains ont appelé le Fonds monétaire international (FMI) à renforcer son modèle opérationnel, ses instruments de prêt et sa structure de gouvernance. L’objectif étant de « mieux faire face aux chocs exogènes mondiaux tels que la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine et la crise climatique en cours », peut-on lire dans le communiqué de presse de la CEA.
Vente des réserves d’or du FMI
Plus spécifiquement, le manque de ressources pour le Fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et la croissance (RPC), créé en 2005 par le FMI, préoccupe particulièrement les ministres. Ils ont appelé à une action immédiate pour augmenter les promesses de financement afin d’assurer la durabilité du RPC à long terme.
Depuis sa création, la majorité des pays africains ont pu bénéficier de cet instrument, parmi lesquels la RDC, le Niger, le Mali, le Tchad, le Burkina Faso, le Sénégal et le Cameroun.
Afin d’augmenter la disponibilité des financements, les ministres ont par ailleurs demandé la fin du remboursement des coûts administratifs (coûts du personnel et coûts opérationnels) de ce dispositif et la vente d’une partie des réserves d’or du FMI. En 2021, ces réserves sont estimées à 90,5 millions d’onces troy, soit environ 2 815 tonnes, pour une valeur d’environ 145 milliards de dollars.
Les ministres ont également demandé une augmentation temporaire des limites d’accès annuelles aux prêts d’urgence du FMI – plus précisément du RCP, avec un passage de 200 % à 600 % du quota et de la limite d’accès cumulatif, mais aussi du mécanisme élargi de crédit (MEDC) et de l’instrument de financement rapide (IFR). Lors de la pandémie, entre avril 2020 et décembre 2021, les limites d’accès de ces deux derniers dispositifs avaient été doublées de manière temporaire.
Insuffisance des DTS
Concernant les droits de tirage spéciaux (DTS), cette créance virtuelle sur les monnaies librement utilisables des pays membres du FMI, Hanan Morsy, secrétaire exécutive adjointe et économiste en chef de la CEA, considère qu’ils doivent être redirigés vers les banques de développement telles que la BM et/ou la BAD, où elle estime que « l’effet de levier peut générer trois à quatre fois la capacité de prêt ».
Et de poursuivre : « L’Afrique n’a reçu que 5 % des 650 milliards de DTS alloués en 2021. Pour garantir que les ressources atteignent leurs destinations, les allocations de DTS ne doivent pas seulement être basées sur des quotas, mais aussi sur les besoins de liquidités. »
L’année 2023 représente, selon elle, un moment critique pour faire avancer les efforts de réforme préconisés par le Groupe de réflexion africain. D’autant plus que la majorité des idées de ce think tank d’universitaires convergent avec les récentes propositions du secrétaire général de l’ONU, António Guterres, en ce qui concerne la refonte de l’architecture financière internationale, avec au moins 500 milliards de dollars par an pour réaliser le Programme 2030 et relancer les Objectifs de développement durable (ODD).
Viabilité de la dette et Cadre commun
Alors que huit pays africains font face à un surendettement et que treize sont en passe de se retrouver dans la même situation, selon l’Analyse de viabilité de la dette du FMI et de la BM, les ministres ont par ailleurs exhorté les membres du G20 à réviser « d’urgence le Cadre commun pour le rendre plus efficace et transparent ».
Les principales propositions comprennent la création de comités élargis de créanciers pour lutter contre le manque de coordination, l’établissement d’une formule de « comparabilité de traitement » pour minimiser les différends techniques et l’utilisation plus audacieuse des politiques de prêt du FMI.
Les auteurs de cet appel ont également demandé une mise à jour de l’analyse de viabilité de la dette du FMI et de la Banque mondiale pour la rendre davantage axée sur la tokenisation des ressources naturelles présentes en Afrique et sur les ODD. Il a aussi été fait mention de l’échange de dette contre des investissements climatiques, et des obligations vertes et bleues.
Enfin, les ministres ont souligné la nécessité de renforcer le cadre juridique international de la dette par le biais de clauses d’action collective, d’une législation anti-fonds vautours et d’instruments de dette dépendants de l’État.
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