Louise Margolin
Africa-Press – Côte d’Ivoire. Malgré un contexte explosif pour l’or dans la sous-région, le groupe britannique poursuit sa croissance. De quoi ravir ses actionnaires.
Conclure en beauté. Pour Endeavour Mining, le dernier trimestre 2024 a été bon: il a représenté un tiers de sa production annuelle d’or (363 000 onces), une hausse de 72 % de son Ebitda (marge opérationnelle) ajusté (546 millions de dollars) et un flux de trésorerie disponible record (268 millions de dollars). Sur l’ensemble de l’année 2024, le groupe britannique a produit 1,1 million d’onces sur ses mines ivoirienne, burkinabè et sénégalaise, confirmant son statut de numéro 1 de l’or en Afrique de l’Ouest. Des dividendes records (240 millions de dollars) ont aussi été annoncés.
L’année avait pourtant mal commencé pour Endeavour. Le 4 janvier 2024, son PDG Sébastien de Montessus est limogé au terme d’une enquête du conseil d’administration pour « instruction de paiement irrégulière » dans le cadre de la cession de la mine d’or d’Agbaou, en Côte d’Ivoire.
Nommé au pied levé pour le remplacer, Ian Cockerill fait immédiatement face à d’autres défis. Émerge en effet un conflit contre Lilium Mining, propriété du banquier Simon Tiemtoré, autour de la vente par Endeavour de deux mines au Burkina Faso. En parallèle, Endeavour doit achever au plus vite deux chantiers majeurs: la construction de la mine ivoirienne de Lafigué et celle d’une usine pour booster la production sur un actif décevant au Sénégal, Sabodala-Massawa. Tout est bien qui finit bien: un accord amiable est finalement signé en août avec Lilium, Lafigué est mise en service, tout comme l’usine sénégalaise.
Resserrer les coûts
Depuis son partenariat en 2015 avec La Mancha de Naguib Sawiris, Endeavour s’impose d’année en année comme le leader du métal jaune ouest-africain. D’abord sous la houlette de Sébastien de Montessus, le groupe a développé ses deux mines phares – Ity (Côte d’Ivoire) et Houndé (Burkina Faso) – et multiplié les fusions acquisitions. Il a cédé ses actifs non essentiels au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, au Mali et au Ghana, dopé son portefeuille avec les acquisitions stratégiques de Semafo et Teranga Gold et revendu des sites trop chers à exploiter.
C’est là qu’est la clé du succès d’Endeavour: miser sur des actifs dont les coûts de production sont plutôt faibles. Ces derniers sont de 1 218 dollars l’once en moyenne en 2024, tandis que le prix de l’or a dépassé 2 000 dollars tout au long de l’année et frôle désormais la barre symbolique des 3 000 dollars.
Contacté, Endeavour ajoute que ses actifs « sont pour la plupart de haute teneur (30 % supérieurs à la moyenne de l’industrie) et exploités à ciel ouvert (quatre mines sur cinq), ce qui les rend généralement moins coûteux. De plus, en tant que plus grand producteur d’or dans chacun des pays où nous opérons, nous pouvons négocier des contrats à long terme sur des produits clés afin de limiter notre exposition à l’inflation. […] Cela nous permet de maintenir des marges parmi les meilleures de l’industrie ».
Un bon retour sur investissement
En ce sens, les perspectives sont bonnes. La nouvelle mine de Lafigué affiche des coûts de production de 950 à 1 075 dollars l’once pour 2025. Sur le projet d’Assafou, qui doit entrer en exploitation en 2028, ils sont même projetés à 892 dollars durant les dix premières années.
À y regarder de plus près, on distingue néanmoins quelques ombres au tableau. Le groupe a fait passer son projet malien de Kalana en dépréciation l’an dernier, s’interrogeant encore sur son avenir. Dans une note sur Endeavour datant du 7 mars, la banque d’investissement de la Banque canadienne de Montréal, BMO Capital Markets, estime pour sa part que les mines de Sabodala-Massawa (Sénégal) et Mana (Burkina Faso) « présentent des risques opérationnels à court terme », avec un minerai complexe à produire sur la première et des coûts élevés sur la seconde. La même institution assure néanmoins qu’Endeavour « offre des perspectives de retour sur investissement de premier ordre ».
Le groupe minier s’en sort donc bien au regard des investisseurs, malgré l’insécurité au Burkina Faso et le vent de réformes dans le secteur minier en Afrique de l’Ouest. Après l’adoption de nouveaux codes plus rémunérateurs pour l’État au Mali et au Burkina Faso, la Côte d’Ivoire planche sur la relecture du sien et le Sénégal s’est offert les services des deux cabinets qui ont appuyé la junte de Bamako, Mazars et Iventus Mining, pour réfléchir à l’évolution de sa législation.
En novembre, le PDG Ian Cockerill décrivait à Jeune Afrique « l’immense potentiel de la région ». Une zone où l’on fait « des découvertes majeures à moindre coût », ensuite transformées en projets miniers « en un minimum de temps ».
Viser encore plus haut
Dans un contexte de consolidation dans le secteur de l’or, Endeavour pourrait-il faire l’objet d’un rachat ? « Pas à ma connaissance », répond-on au sein du groupe et chez un actionnaire. Si l’entreprise n’est pas achetée, Endeavour souhaite-t-elle faire des acquisitions ? En novembre, Ian Cockerill indiquait: « Nous avons connu une phase d’acquisitions. Désormais, notre croissance sera principalement organique, tant sur nos sites en production que sur le plan de l’exploration. »
La société britannique s’active en effet pour faire avancer le projet d’Assafou vers la production tout en continuant à explorer différents sites, en priorité autour de Sabodala-Massawa, d’Assafou, mais aussi dans un pays où l’entreprise ne produit pas encore: la Guinée. De quoi peut-être viser encore plus haut que les 1,5 million d’onces annuelles anticipées par le groupe pour 2030.
Source: JeuneAfrique
Pour plus d’informations et d’analyses sur la Côte d’Ivoire, suivez Africa-Press