Africa-Press – Côte d’Ivoire. Après la suspension habituelle des activités judiciaires, la Cour d’appel d’Abidjan a effectué ce vendredi sa rentrée judiciaire au Palais de justice du Plateau. Une cérémonie solennelle, marquée par l’installation de quatorze magistrats nouvellement promus aux fonctions de présidents de chambre, conseillers, avocats généraux et substituts généraux.
Dans son discours, le Premier président de la Cour d’appel d’Abidjan, Dembelé Tahirou, s’est félicité de l’impact des réformes menées par le ministère de la Justice:généralisation de la délivrance d’actes judiciaires en ligne, extension des plateformes numériques, réorganisation de la carte judiciaire avec l’érection de sections en tribunaux de première instance.
Selon lui, ces mesures contribuent à rendre la justice plus proche du citoyen, plus rapide et mieux adaptée aux réalités actuelles.
La Cour d’appel a rendu 6 707 décisions, soit 14,5 % de plus que l’année précédente.
Ces décisions se répartissent ainsi, 1 806 en matière civile, 919 en matière sociale, 1 767 en matière correctionnelle, 1 236 en matière d’instruction et 979 ordonnances sur requête.
Saluant « l’engagement quotidien » des magistrats, greffiers, avocats et personnels administratifs, M. Dembelé a néanmoins rappelé la rigueur déontologique attendue, particulièrement en période pré-électorale: devoir de réserve, impartialité et dignité.
Aux nouveaux magistrats installés, il a réaffirmé l’importance de l’intégrité, de la probité et de la collaboration avec l’ensemble des acteurs de la chaîne judiciaire.
Avant lui, la Procureure générale près la Cour d’appel d’Abidjan, Sori Naye Henriette, a présenté un tableau détaillé de l’activité du ministère public.
Le taux d’enrôlement des dossiers en section d’instruction est passé de 74 % à 91 %, faisant chuter le stock résiduel de 593 à 164 dossiers. Deux sessions criminelles ont permis l’adoption de 71 arrêts. La section des notices affiche un taux de traitement de 100 %. Au niveau international, les demandes d’entraide judiciaire ivoiriennes sont en forte hausse.
Elle a mis en avant la dématérialisation des actes judiciaires: « Les certificats et casiers judiciaires peuvent désormais être obtenus en ligne, dans des délais particulièrement courts. C’est une révolution silencieuse mais profonde. »
Évoquant les tensions observées ces derniers mois sur les réseaux sociaux, elle a précisé: « Il ne s’agit jamais de bâillonner qui que ce soit. Nos interventions relèvent d’une démarche de pédagogie, car la justice doit être mieux comprise pour susciter la confiance. »
Le Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Côte d’Ivoire, Me Florence Loan-Messan, a pris la parole pour rappeler les enjeux majeurs du moment. Elle a pointé du doigt les arrestations récurrentes et les procédures expéditives observées ces derniers mois.
« Plus de 800 citoyens ont été jugés en quelques jours, parfois en moins d’une semaine. Cela interroge sérieusement l’effectivité du droit à la défense. »
Selon elle, certains prévenus n’ont pas pu préparer leur dossier ou rencontrer suffisamment leur avocat.
Elle a rappelé que le Code pénal et le Code de procédure pénale consacrent, la présomption d’innocence, le procès équitable et le droit à l’assistance d’un avocat.
« Il ne suffit pas que ces garanties figurent dans nos textes. Elles doivent vivre dans les faits. Le procès équitable doit être une réalité quotidienne. »
Me Loan-Messan a annoncé plusieurs initiatives majeures, l’ouverture d’une permanence pénale en février, la création d’un bureau d’assistance pour les victimes de violences basées sur le genre en mars, le renforcement de l’Observatoire du droit, le lancement d’une école de défense pénale et la pose de la première pierre de la Maison de l’Avocat le 10 décembre 2025.
Des mesures structurantes destinées à renforcer l’accès au droit et la qualité de la défense.
La rentrée judiciaire 2025 de la Cour d’appel d’Abidjan s’ouvre ainsi sur une justice modernisée, une activité en forte croissance, un renforcement de la transparence et une réflexion renouvelée sur la protection des droits fondamentaux.
Dans un contexte socio-politique sensible, magistrats, parquet et avocats ont réaffirmé leur engagement commun: servir une justice crédible, indépendante et accessible à tous les citoyens.
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