Africa-Press – Côte d’Ivoire. Le Front populaire ivoirien (FPI), parti d’opposition dirigé par l’ancien Premier ministre Pascal Affi N’Guessan, a révélé samedi 29 mars 2025 les résultats d’une expertise technique pointant des irrégularités « systémiques » dans la liste électorale provisoire en vue de la présidentielle d’octobre.
Lors d’une conférence de presse au siege du FPI à Cocody, les responsables du parti ont présenté une étude réalisée à partir de huit listes électorales (2010-2024) transmises par la Commission électorale indépendante (CEI), analysées via des bases de données SQL.
Selon le FPI, ces données montrent une « dégradation alarmante » de la crédibilité du processus électoral, avec des violations « massives » du code électoral et des incohérences démographiques « inexplicables ».
L’expertise, pilotée par Apollos Dan Thé, vice-président du FPI, souligne que 70 % des 6,2 millions d’électeurs inscrits sur la liste provisoire 2024 présentent des informations incomplètes (noms des parents, dates de naissance), contre 34 % en 2023.
Parmi ces cas, 470 877 électeurs n’ont ni filiation vérifiable ni date de naissance valide, avec des mentions comme « inconnu » ou « ND ». « Une liste opaque ne peut garantir des élections transparentes », a déclaré M. Dan Thé, dénonçant une « logique de manipulation » qui s’aggrave depuis 2010.
L’étude met également en lumière des anomalies démographiques qualifiées d’« irrationnelles »: 5 517 mères seraient inscrites comme ayant plus de 15 enfants en âge de voter, dont 42 dépasseraient les 700 enfants. Du côté paternel, 329 754 électeurs sont rattachés à des hommes déclarant plus de 20 enfants. Ces irrégularités, concentrées dans les régions du Centre et du Nord, coïncident avec les révisions électorales de 2015 et 2020, évoquant selon le FPI des « manipulations organisées ». Le parti évoque aussi 224 277 numéros d’électeurs en double, principalement à Agboville, Sikensi et Tiassalé, ainsi que des transferts massifs d’électeurs d’Abidjan vers ces zones en 2024, assimilés à une « transhumance électorale suspecte ».
« Comment expliquer que des milliers d’électeurs changent subitement de filiation en 2024 ? Qui a autorisé ces modifications ? », s’interroge Kouakou Krah, vice-président du FPI chargé des élections. Le parti exige un audit international indépendant, la publication des historiques de modifications des listes et une enquête sur les inscriptions non conformes. Contactée par les médias, la CEI n’a pas réagi dans l’immédiat.
Alors que la période de contentieux électoral est ouverte, le FPI espère mobiliser l’opinion publique et la communauté internationale. Apollos Dan Thé résume: « Sans vérification rigoureuse, cette liste devient un outil de fraude potentielle. L’avenir démocratique du pays est en jeu. »
Avec un parti au pouvoir bien organisé et sans menace réelle dans les urnes pour l’heure et une société ivoirienne peu passionnée par les enjeux de la présidentielle à venir, les conclusions du FPI rappellent néanmoins les débats politico-politiciens sur la réforme électorale.
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