Alexis Billebault
Africa-Press – Côte d’Ivoire. Depuis son deuxième titre continental obtenu en 2015, la Côte d’Ivoire ne s’est guère distinguée par ses résultats. Absente des deux dernières Coupes du monde, elle n’a plus jamais dépassé le cap des quarts de finale de la Coupe d’Afrique des nations.
C’est une règle à laquelle aucune sélection nationale d’un certain standing n’échappe. Celle que l’on qualifie de « passage à vide », de « crise » ou de « traversée du désert. » Elle intervient parfois après un titre majeur, et s’étire dans le temps de manière plus ou moins longue. Pour la Côte d’Ivoire, cela fait plus de huit ans que ce trou d’air perdure, alors que le pays s’apprête à organiser la Coupe d’Afrique des nations (CAN, qui s’ouvre le 13 janvier).
« Après un titre, il y a parfois une cassure »
Le 8 février 2015 à Malabo (Guinée équatoriale), les Éléphants remportent la CAN pour la deuxième fois de leur histoire face aux Black Stars du Ghana (0-0, 9-8 aux tirs aux buts), après celle gagnée en 1992 au Sénégal. Hervé Renard, leur sélectionneur français, déjà sacré trois ans plus tôt avec la Zambie, décide quelques semaines plus tard de quitter son poste et de s’engager avec Lille. Son compatriote Michel Dussuyer, qui lui succède au mois de juillet 2015, comprend vite que la sélection ivoirienne est à un tournant. « Quand une sélection gagne un titre majeur, il est fréquent qu’elle connaisse une période de décompression, une forme de cassure. Ce fut le cas avec les Éléphants, un phénomène accentué par la décision de joueurs parmi les plus importants de mettre un terme à leur carrière internationale », se souvient-il.
En quelques semaines, les frères Kolo et Yaya Touré, qui totalisent respectivement 120 et 101 sélections, et Siaka Tiené (100 sélections) annoncent vouloir se consacrer à leur carrière en club. « Ce ne sont pas des joueurs faciles à remplacer », poursuit Dussuyer. S’ensuivent des difficultés rencontrées par la Côte d’Ivoire de se qualifier pour la CAN 2017, face à des adversaires (Soudan et Sierra Leone) pourtant moyens. Puis la phase finale au Gabon tourne au fiasco pour les champions d’Afrique en titre et acte le vrai début de la crise de résultats.
« Des tensions sont apparues avant le coup d’envoi de la CAN. Nous étions basés à Oyem, mais pas dans de bonnes conditions. Les joueurs n’étaient pas bien, et on a raté notre tournoi, en se faisant éliminer au premier tour par le Maroc [entraîné désormais par Hervé Renard] et la RD Congo », résume Dussuyer, qui sera limogé quelques jours plus tard.
Cinq sélectionneurs depuis 2015
Cette CAN ratée n’est que le début d’une longue litanie de déceptions. Pour remplacer Dussuyer, Sidy Diallo, le président de la Fédération ivoirienne de football (FIF), décédé en 2020, engage à grands frais le Belge Marc Wilmots, l’ancien sélectionneur des Diables Rouges, pour qualifier les Éléphants pour la Coupe du monde 2018 en Russie. Mais l’objectif n’est pas atteint, après une défaite face au Maroc à Abidjan (0-2) qui scelle le sort des Ivoiriens et accessoirement celui du Wallon, remplacé par Ibrahim Kamara.
« Il faut admettre d’abord une chose : la génération des frères Touré avait du talent, mais pas autant que celle des Drogba qui avait pris sa retraite internationale après la Coupe du monde 2014. De plus, Drogba et les autres avaient un vécu important ensemble : ils ont participé à plusieurs CAN, à trois Coupes du monde, ce qui est beaucoup moins le cas de la génération actuelle », analyse l’ancien sélectionneur Yéo Martial, qui avait conduit les Éléphants à leur premier titre continental en 1992.
Après Kamara, qui avait réalisé – en atteignant les quarts de finale de la CAN en Égypte – la meilleure performance ivoirienne depuis 2015, la FIF s’était tournée vers Patrice Beaumelle. Mais l’ancien adjoint de Renard avait échoué à qualifier son équipe pour la Coupe du monde 2022 et à dépasser les 16e de finale lors de la CAN au Cameroun. « Dussuyer, Wilmots, Kamara, Beaumelle et désormais Jean-Louis Gasset… Cinq sélectionneurs depuis le titre de 2015, c’est beaucoup trop. Une équipe a besoin de stabilité. Regardez l’Algérie avec Djamel Belmadi et le Sénégal avec Aliou Cissé. Ils sont en poste depuis des années [2018 pour Belmadi, 2015 pour Cissé] et ce sont les deux derniers vainqueurs de la CAN, ce qui n’est pas un hasard », poursuit Yéo Martial.
Une nouvelle génération prometteuse
Champion d’Afrique en 2015 et revenu en Côte d’Ivoire – au stade d’Abidjan – après un long exil au TP Mazembe (RD Congo, 2015-2021) et à Wolkite City (Ethiopie, 2021-2023), le gardien Sylvain Gbohouo (35 ans) se montre relativement optimiste après ces longues années marquées par un manque de résultats flagrant.
« Tout n’est pas négatif. De nouveaux joueurs sont arrivés en sélection [Karim Konaté, Ousmane Diomandé, Simon Adingra]. Il faut évidemment leur laisser du temps car dans une équipe comme la Côte d’Ivoire où la concurrence est grande. Je suis confiant pour la CAN, comme pour la suite. La Côte d’Ivoire va rapidement revenir parmi les meilleures sélections africaines. »
Source: JeuneAfrique
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