
Africa-Press – Côte d’Ivoire. L’être humain aide à la fois les membres de sa famille, mais peut aussi être amené à aider un ami voire une personne totalement inconnue. Mais il est difficile de savoir si cette entraide est plus largement répandue dans le monde animal, même si des exemples sont aujourd’hui connus. Il faut pouvoir observer l’espèce ciblée sur une longue période et être capable de différencier des interactions entre des individus génétiquement liés ou non.
C’est bien la prouesse qu’ont réalisée des chercheurs sur un oiseau, le Choucador superbe (Lamprotornis superbus), une espèce qui constitue de grands groupes comprenant entre 7 et 60 membres et jusqu’à sept couples reproducteurs par groupe. Ces derniers sont aidés par une dizaine d’autres oiseaux quand eux ne se reproduisent pas.
Les résultats, présentés le 7 mai 2025 dans la prestigieuse revue Nature, révèlent que si ces oiseaux se soucient des membres de leur famille, ils s’appliquent tout de même à aider les autres.
Une aide fréquente apportée aux oiseaux non apparentés
L’étude a pris en compte plus de 12.000 observations d’aides avec 563 aidants dans 410 nids, à travers 9 groupes sociaux sur 40 saisons de reproduction s’étalant sur 20 ans. Elle démontre que l’aide apporté au nid à des oiseaux non apparentés est commune, même en présence de proches.
Ainsi, des « individus (parents et non-parents, ndlr) ont formé des relations d’entraide réciproque non aléatoires à long terme en échangeant les rôles de reproducteur et d’assistant au cours des saisons et des années de reproduction », souligne l’étude. Lorsque deux oiseaux se rapprochaient, l’un aidait l’autre lorsque c’était à son tour d’avoir un nid à charge. Ces oiseaux avaient cependant plus tendance à aider leurs proches que les autres, mais ils entretenaient tout de même des rapports privilégiés avec d’autres membres du groupe.
Pour le professeur Dustin Rubenstein de l’Université Columbia (Etats-Unis), cité dans un communiqué, « beaucoup de ces oiseaux nouent des liens d’amitié au fil du temps ». Il pense également que « ce type de comportement d’entraide réciproque se produit probablement dans de nombreuses sociétés animales, et les gens ne les ont tout simplement pas étudiés assez longtemps pour pouvoir le détecter ».
L’aide apportée à un proche permet indirectement de favoriser la survie de ses propres gènes. Mais l’entraide généralisée sur le long terme favoriserait la stabilité du groupe social, tout le monde serait donc gagnant, même lorsque les oiseaux ne partagent pas de liens de parenté.
Et « les Choucadors superbes appartenant à des groupes sociaux plus grands ont une survie à l’âge adulte plus élevée et un succès reproducteur plus élevé que ceux appartenant à des groupes plus petits ». La survie des oisillons est donc l’affaire de tous.
Près de 20 ans d’étude
Alexis Earl, le chercheur qui a mené l’étude alors qu’il était étudiant dans le laboratoire du Pr Rubenstein, et ses collègues ont mis en place un protocole particulièrement méticuleux. En effet, ils se sont appuyés sur des données récoltées par le Pr Rubenstein et ses collègues dans les savanes d’Afrique de l’Est sur presque 20 ans.
Entre 2002 et 2021, les chercheurs ont étudié des milliers d’interactions entre des Choucadors superbes. Ils ont aussi collecté l’ADN d’oiseaux afin de connaître les liens de parenté entre eux, seule façon de savoir si l’entraide se réalise aussi entre oiseaux non apparentés.
Pour les auteurs de cette étude, ce genre de découverte n’est possible que grâce à des études de terrain sur le long terme. Chez les Choucadors superbes, le temps nécessaire à la mise en place de l’entraide se comptait en années. Une courte étude n’aurait donc pas suffi.
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