Pourquoi la fourrure de l’ours polaire ne gèle jamais ? Parce qu’ils ont un antigel naturel !

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Pourquoi la fourrure de l'ours polaire ne gèle jamais ? Parce qu'ils ont un antigel naturel !
Pourquoi la fourrure de l'ours polaire ne gèle jamais ? Parce qu'ils ont un antigel naturel !

Africa-Press – Côte d’Ivoire. Le secret des ours polaires pour résister au gel ? Des poils gras ! Une étude internationale parue dans la revue Sciences Advances a récemment découvert les propriétés antigel de la fourrure de l’ours polaire. Ce mammifère emblématique de l’Arctique, de son nom latin Ursus maritimus, est le seul de la région à plonger dans l’eau pour chasser. Malgré les températures glaciales et l’isolation thermique fournie par ses couches de graisse et de fourrure, cette dernière reste étonnamment exempte de glace. L’ours polaire, devenu symbole mondial du changement climatique à cause de la réduction de son habitat glaciaire, évolue dans des régions où les températures peuvent descendre sous les -40°C. Mais quel est donc son secret ?

Comme l’explique à Sciences et Avenir Julian Carolan, chercheur au College Trinity de Dublin (Irlande) et auteur principal de l’étude: « Les poils d’ours polaires étaient déjà connus pour posséder certaines propriétés ». La survie de l’animal dépend en grande partie de son exceptionnelle isolation thermique, assurée par ses couches de graisse et de poils, véritable barrière contre le froid extrême. Mais « si certaines études ont déjà démontré des propriétés antigivrantes chez d’autres espèces (comme les manchots et les pingouins), c’est la première fois qu’on les observe chez un mammifère de l’Arctique », s’enthousiasme le chercheur.

« La glace adhère fortement aux poils de l’ours polaire »

Julian Carolan et son équipe ont utilisé différentes techniques microscopiques pour analyser la structure des poils de six ours polaires sauvages. Ils ont comparé ces poils « aux cheveux humains et aux fibres utilisées pour les skis de fond ». Ensuite, ils ont mesuré la « façon dont la glace adhérait à la fourrure en plaçant des échantillons dans un moule rempli d’eau », qu’ils ont fait geler, et ont « mesuré la force nécessaire pour repousser la glace ». L’expérience a été réalisée avec des poils lavés et non lavés. Ils ont ensuite analysé les huiles présentes dans les poils pour en déterminer la composition, avant de simuler comment ces huiles interagissent avec la glace, en les comparant à des substances antigivres utilisées sur les skis.

« Le principal résultat que nous avons observé est que le sébum joue un rôle crucial dans la réduction de l’adhérence de la glace à l’ours polaire, explique le chercheur. Lorsque nous avons éliminé toutes les huiles capillaires, nous avons constaté que la glace adhérait fortement aux poils de l’ours polaire, la force d’adhérence étant multipliée par plus de trois après le lavage. En revanche, l’ours polaire non lavé présentait une faible adhérence à la glace, similaire à celle de la peau des skis de course ».

L’analyse des lipides a révélé que le sébum de l’ours polaire était très gras (composé de cholestérol, de diacylglycérols et d’acides gras) et que le squalène, un composé présent dans le sébum humain ainsi que dans celui de mammifères principalement aquatiques/en milieu humide tels que la loutre ou l’otarie, était absent. Or « on s’attendrait à ce qu’il soit présent étant donné que l’ours polaire entre et sort régulièrement de l’eau », souligne Julian Carolan.

Quelles sont les implications de cette découverte ?

Les ours polaires tirent pleinement parti de cette propriété pour survivre et chasser dans leur environnement extrême. Comme le souligne Julian Carolan, chercheur de l’étude: « Lorsqu’un ours polaire chasse, il s’assoit discrètement au bord de l’eau en attendant qu’un phoque approche. Son mouvement doit être totalement silencieux, à l’image des chasseurs inuits, afin de ne pas alerter sa proie. De plus, cette particularité lui permet de glisser sans effort dans l’eau et d’en sortir sans que sa fourrure gèle au contact de la glace, ce qui faciliterait grandement ses déplacements. »

Si cette étude est la première à expliquer scientifiquement pourquoi les poils des ours polaires adhèrent peu à la glace, cette propriété est connue depuis longtemps des Inuits. Comme l’a décrit l’anthropologue Jean Malaurie dans Les Derniers Rois de Thulé, publié en 1955, ces populations utilisent depuis des siècles la fourrure de l’ours polaire pour fabriquer des vêtements et des chaussures capables de résister aux conditions extrêmes. « Se déplacer en douceur et sans bruit sur la glace est essentiel pour la chasse au phoque. Les Inuits ont appris à préparer les fourrures en éliminant certaines huiles pour préserver cette propriété », rappelle le chercheur.

Ces recherches approfondissent notre compréhension des interactions entre l’ours polaire et son environnement tout en mettant en lumière le savoir inuit sur les matériaux naturels antigivre. Au-delà de l’intérêt scientifique, cette découverte pourrait aussi avoir des applications concrètes dans le développement de revêtements anti-glace. « Nous avons testé différentes méthodes pour appliquer certaines molécules sur des surfaces et avons découvert qu’un revêtement à base d’acide eicosénoïque (acide gras saturé présent dans certaines huiles végétales et animales, ndlr) réduit fortement l’adhérence de la glace. Nous l’expérimentons actuellement sur plusieurs matériaux, et bien que l’effet varie selon la surface, l’ajout de cette molécule issue du sébum améliore clairement la protection contre le gel. La prochaine étape sera d’évaluer la durabilité de ces revêtements, un critère essentiel pour leurs applications futures », conclut le chercheur.

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