Africa-Press – Côte d’Ivoire. Imaginez que le Grand Canyon du Colorado ait été créé en moins de 10 minutes… Impensable ? En effet, six millions d’années d’érosion ont en réalité été nécessaires pour sculpter cette entaille de 445 km de long à la surface de la Terre. Mais sur la Lune, Vallis Schrödinger et Vallis Planck, deux canyons situés près du pôle Sud, se seraient formés en une poignée de minutes, selon une étude publiée le 4 février 2025 dans la revue Nature. Pourtant, leurs dimensions n’ont pas grand-chose à envier au Grand Canyon: Vallis Schrödinger s’étend sur 270 km de long, 20 km de large et 2,7 km de profondeur, tandis que Vallis Planck atteint 280 km de long, 27 km de large et 3,5 km de profondeur.
Un astéroïde ou une comète de 25 km de diamètre
Tout s’est donc joué en quelques minutes, il y a 3,81 milliards d’années. Un astéroïde, ou une comète d’environ 25 km de diamètre, a percuté la surface lunaire en suivant une trajectoire Sud-Sud-Est → Nord-Nord-Ouest, avec un angle inférieur à 45°. La collision a libéré une énergie équivalente à 130 fois l’ensemble de l’arsenal nucléaire mondial actuel. Résultat: un cratère géant de 320 km de diamètre et 4,5 km de profondeur, baptisé Schrödinger.
À cause de l’angle oblique de l’impact, la matière expulsée ne s’est pas répartie uniformément. Imaginez un caillou lancé sur une plage: si l’angle est rasant, le sable jaillit en une longue traînée directionnelle. C’est ce qui s’est produit sur la Lune, mais à une échelle titanesque. Des blocs de roches, dont certains mesurent plusieurs kilomètres de diamètre, ont été projetés à des vitesses allant de 3 400 à 4 600 km/h. En retombant, ces fragments ont formé des cratères secondaires encore bien visibles à la surface, et engendré de vastes coulées de débris rocheux hyperrapides, comparables à des torrents de lave… En moins de 10 minutes, ces flots de matière ont creusé Vallis Schrödinger et Vallis Planck dans la croûte lunaire.
Un site d’atterrissage idéal pour la mission Artemis III
Ce scénario-catastrophe a été mis en évidence grâce aux images à haute résolution de la sonde Lunar Reconnaissance Orbiter (LRO), qui a cartographié la Lune entre 2009 et 2011. Les scientifiques ont également utilisé des modèles numériques pour simuler la trajectoire des roches éjectées, et leur impact à la retombée. Ces simulations ont permis d’estimer les vitesses de projection, les tailles des débris, et l’énergie nécessaire à la formation des canyons lunaires. Les auteurs de l’étude soulignent que la plupart des sites d’atterrissage envisagés pour Artemis III se situent justement aux alentours du pôle Sud lunaire.
Actuellement prévue pour mi-2027, mais déjà repoussée plusieurs fois, cette mission devrait permettre aux astronautes de collecter des échantillons de roches lunaires anciennes. Le bassin de Schrödinger est situé sur le bord du South Pole-Aitken Basin (SPA), la plus grande et la plus ancienne structure d’impact lunaire (2 400 km de diamètre, 4,3 milliards d’années). Cette nouvelle étude montre que les éjectas de l’impact de Schrödinger ont partiellement recouvert ceux de SPA, mais de manière asymétrique. Grâce à cette configuration, des fragments de la croûte primitive ou du manteau lunaire pourraient être encore accessibles en surface. Si Artemis parvient à en prélever, cela fournirait des indices sur la formation de la Lune, à partir d’une collision géante qui aurait impliqué une protoplanète de la taille de Mars, Théia, et la Terre, il y a 4,5 milliards d’années.
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