Africa-Press – Côte d’Ivoire. Il y a une différence entre ce que l’on dit et ce que l’on pense, car en général on ne dit pas tout ce qui nous passe par la tête. Pourtant, c’est peut-être ce qui pourrait se passer avec les implants cérébraux. Ces dispositifs implantés directement en contact avec le cerveau peuvent lire l’activité neuronale d’une région. C’est notamment le cas des implants pour décoder la parole, qui permettent à des personnes paralysées de communiquer en prédisant ce que la personne tente de dire.
Et c’est bien ça la différence, l’utilisateur doit tenter de parler, car l’implant lit l’activité des neurones qui contrôlent les muscles nécessaires à la parole. Il s’agit donc d’une action volontaire de l’utilisateur, et seul ce qu’il veut dire sera dit. Sauf qu’une nouvelle étude vient de montrer que ces implants peuvent aussi « lire » la pensée interne des utilisateurs, c’est-à-dire ce qu’ils se disent eux-mêmes, mais qu’ils ne veulent pas forcément dire aux autres. Cette découverte a été présentée dans la revue Cell le 21 août 2025 par des chercheurs de l’Université Stanford, aux États-Unis.
La parole interne pourrait être utilisée pour décoder la vraie parole
Cette « parole interne » est par exemple celle que vous entendez en lisant en silence, ou lorsque vous essayez d’enregistrer une information en la répétant dans votre tête. Cette petite voix est on ne peut plus intime et il faudrait qu’elle le reste… mais elle a aussi l’avantage qu’elle ne requiert pas de faire l’effort de tenter de parler, ce qui peut être difficile pour des personnes paralysées. Elle serait donc utile pour décoder la parole plus efficacement.
Les deux types de parole activent les mêmes neurones
Les chercheurs ont testé la possibilité de décoder cette pensée interne chez quatre participants ayant déjà un implant pour décoder la parole (de la marque BrainGate), placés en contact avec le cortex moteur. Pour différencier entre la parole interne (ce que les utilisateurs pensent) et la « vraie » parole (ce qu’ils veulent dire), ils ont mis en place des stratégies pour activer cette première. Dans le premier exercice, les participants regardaient des mots apparaître sur un écran, associés à des couleurs qui leur indiquaient s’ils devaient juste les voir, les lire dans leurs têtes ou tenter de les dire.
Ces trois tâches activaient les mêmes neurones, dans la même région du cortex lue par l’implant, mais à des niveaux différents. La parole interne et la lecture en silence entrainaient une activation plus basse. Comme s’il y avait un seuil d’activité à partir duquel ces neurones comprennent que l’utilisateur veut vraiment dire ces mots à voix haute, et ça serait seulement à partir de ce seuil qu’elles envoient cette information vers les muscles impliqués dans la parole. Les utilisateurs ont déclaré qu’il était plus simple pour eux d’activer l’implant avec cette parole interne qu’avec la vraie parole, probablement grâce à ce moindre effort.
Plusieurs activités engagent cette pensée interne
Dans un deuxième exercice, les participants devaient penser ou dire des phrases, composées d’un vocabulaire limité à 50 mots. L’implant parvenait à décoder les phrases pensées avec un taux d’erreur allant de 14 à 33 % en fonction du participant. Puis, le même exercice, mais avec un vocabulaire de 125.000 mots, résultait en un taux d’erreur allant de 26 à 54 %. Les taux d’erreur étaient plus faibles lorsque le participant tentait de dire les phrases, montrant que le niveau d’activité neuronale plus élevé lors de la vraie parole rend la lecture de l’implant plus fiable.
Pour confirmer qu’il s’agissait bien de la pensée interne, les chercheurs ont utilisé d’autres expériences. Par exemple, les utilisateurs devaient se rappeler une séquence de mouvements à réaliser avec un joystick (haut, gauche, haut, par exemple), qu’ils devaient reproduire quelques secondes après. Pour s’en rappeler, les participants répétaient involontairement ces instructions dans leur tête, ce qui était visible par l’implant. Ou ils devaient encore penser à quelque chose de leurs vies (leur nourriture préférée, par exemple), ce qui entrainait une activation des mêmes neurones, davantage que si on leur disait de ne penser à rien.
Un mot de passe pour protéger la pensée
Les implants parvenaient bien donc à décoder cette parole interne des participants, ce qui était utile pour faciliter le décodage de la parole… mais avec le risque que les pensées intimes des utilisateurs soient rendues publiques. Pour éviter cette éventualité, les chercheurs ont mis en place un système de sécurité activé par un mot de passe. L’utilisateur devait penser à ce mot de passe pour activer le système de décodage de l’implant, et s’il ne pensait pas à ce mot clé, aucune parole n’était décodée. Ce système de sécurité fonctionnait avec un taux de succès de 99 %, montrant qu’il s’agirait d’une option fiable pour s’assurer que l’utilisateur garde le contrôle sur ce qu’il veut partager avec l’implant. Toutefois, davantage d’études sont nécessaires pour s’en assurer, puisque le risque est énorme.
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