
Africa-Press – Côte d’Ivoire. Il est tentant, très tentant, de s’emballer en archéologie lorsqu’une découverte laisse à penser qu’il pourrait s’agir d’un vestige de légende. Aussi est-il difficile de ne pas frémir – et donc de ne pas consacrer un article – à la publication d’un archéologue sous-marin espagnol, Filipe Castro, qui affirme qu’une épave localisée en 2003 sur le récif de Ngomeni, au large du Kenya, pourrait être celle d’un galion de la troisième armada de l’explorateur portugais Vasco de Gama (vers 1460-1524).
Il pourrait plus précisément s’agir du São Jorge, coulé en 1524, qui faisait partie des 20 navires partis avec Vasco de Gama lors de son ultime voyage vers les Indes, avant qu’il ne meure la même année de la malaria. Deux navires auraient coulé dans cette zone au 16e siècle, le second étant le Nossa Senhora da Graça, qui a sombré en 1544.
De très rares épaves portugaises de cette époque
« Peu de navires portugais ont été découverts, fouillés et publiés, et cet article se veut un examen critique des informations disponibles, un résumé de ce que l’on sait d’eux et des questions qui subsistent lorsque l’on tente d’interpréter et de reconstruire leurs vestiges », écrit Filipe Castro, qui a été appelé sur place en 2013 par Caesar Bita, archéologue maritime aux Musées du Kenya. Lors d’une campagne archéologique sur le site de l’épave, ce dernier avait pu établir l’origine portugaise du navire et avait souhaité s’entourer d’une équipe d’archéologues maîtrisant l’histoire maritime du Portugal.
Si le navire venait à être relié avec certitude au São Jorge, il confirmerait non seulement archéologiquement la présence de la troisième armada de Vasco de Gama au Kenya, mais il deviendrait aussi l’une des plus anciennes épaves européennes jamais découvertes dans l’océan Indien. Pour le moment, les dates provisoires des artefacts indiquent un naufrage lors d’un voyage aller vers l’Inde et une date de naufrage dans le premier quart du 16e siècle. À environ 500 mètres de la côte et 6 mètres de profondeur, des lingots de cuivre et des défenses d’éléphant ont notamment été remontés à la surface dès 2013.
De la genèse des galions
À partir de 1518, le Portugal commence à construire des navires destinés à la guerre et capables de naviguer de façon autonome vers les océans Indien et Pacifique. Inspirés des typologies méditerranéennes, dotés de trois à quatre mâts et d’une artillerie, ils sont appelés galions. Face à leur robustesse, également face aux tempêtes, ces navires portugais vont être rapidement adoptés par d’autres nations et vont continuer à évoluer au cours du 16e siècle.
Le São Jorge, qui avait pour capitaine D. Fernando de Monroy, est l’un de ces premiers galions portugais et a été perdu du côté de la ville kenyane de Malindi, devenue un important comptoir portugais à partir de 1499. Son naufrage aurait eu lieu il y a précisément 500 ans, en 1524, alors qu’il faisait route vers l’Inde dans la troisième armada de Vasco de Gama. Pas moins de huit épaves portugaises du 16e siècle reposeraient dans les fonds marins au large de Malindi.
Vasco de Gama est l’explorateur européen à qui l’on doit l’ouverture de la toute première route maritime directe entre l’Europe et l’Inde. En 1498, lors de son voyage le plus célèbre, il contourna le cap de Bonne-Espérance et atteignit Calicut, sur la côte ouest de l’Inde, établissant un lien commercial crucial entre l’Europe et l’Asie. Ce voyage marqua un tournant dans l’histoire des explorations et permit au Portugal de dominer le commerce des épices pendant plusieurs décennies. Bien qu’il soit célébré pour ses exploits maritimes, son passage en Inde fut aussi marqué par des violences, notamment envers les communautés locales. Il mourut en Inde en 1524 alors qu’il portait le titre de gouverneur des colonies portugaises.
Pour plus d’informations et d’analyses sur la Côte d’Ivoire, suivez Africa-Press