Banque mondiale, FMI… L’heure des réformes a sonné

11
Banque mondiale, FMI… L’heure des réformes a sonné
Banque mondiale, FMI… L’heure des réformes a sonné

Africa-Press – Djibouti. En 2023, le concept à la mode est indéniablement celui de « polycrise ». Car, après la pandémie et la mise sous cloche de l’économie chinoise, la guerre en Ukraine a amplifié le phénomène de pénuries et d’inflation, tout en alimentant l’instabilité financière.

C’est dans ce contexte que, comme chaque année, vont se réunir les conseils des gouverneurs, les comités du développement et les comités monétaire et financier de la Banque mondiale (BM) et du Fonds monétaire international (FMI) pour leurs Réunions de printemps à Washington.

Du 10 au 16 avril, les problématiques liées à la lutte contre la pauvreté, au développement économique, et à l’efficacité de l’aide seront abordées. Mais pas seulement. Car si le monde traverse une succession de tempêtes économiques, les institutions elles-mêmes subissent des secousses en leur sein. Entre la démission du président de la Banque mondiale David Malpass, et les fragilités observées au niveau du Fonds, cette édition intervient dans un moment charnière. « Repenser le développement pour une ère nouvelle », sera ainsi le thème de l’évènement.

Nouveau cap pour la Banque mondiale

Ajay Banga, qui a été choisi par le président américain Joe Biden pour succéder à David Malpass, est très attendu. Et, de sa présidence, s’il est élu, il est espéré qu’elle aille de pair avec des changements structurels.

La BM, qui bénéfice d’une notation ‘AAA’ (perspective stable) auprès des agences Moody’s et Standard & Poor’s, a en effet été pointée du doigt concernant la mobilisation de ses ressources jugée « trop faible ». Les décideurs devront donc aborder l’augmentation du ratio d’endettement, (fonds propres par rapport aux prêts). Comme l’a expliqué David Malpass dans les colonnes de Jeune Afrique, ce dernier pourrait passer de 20 % à 19 %.

LA MICROFINANCE, LORSQU’ELLE EST BIEN CIBLÉE, CONSTRUIT ET CONSOLIDE LA RÉSILIENCE ÉCONOMIQUE

D’après Abdoul Sellam Bello, administrateur exécutif de la BM pour 23 pays africains, l’éventualité d’augmenter ce ratio de façon encore plus importante pourrait être envisageable. « Déjà, un passage à 19 % permettrait d’engager 40 milliards de dollars supplémentaires au cours des dix prochaines années par les institutions du groupe de la Banque mondiale », a-t-il précisé à Jeune Afrique, avant d’ajouter « cela ne sera pas suffisant pour combler les énormes besoins de financements sur le continent ».

D’après lui, la Banque devrait aussi concentrer ses efforts dans l’accompagnement des pays africains pour la mobilisation de ses ressources internes, sans pour autant alourdir la fiscalité. « Environ 80 milliards de dollars de recettes publiques sont perdus chaque année en Afrique à cause des flux illicites », précise-t-il en expliquant que la BM devrait appuyer les projets d’élargissement de l’assiette fiscale, et apporter son expertise dans les processus de négociations avec les créanciers.

Rôle croissant du secteur privé

En outre, l’expert insiste sur le rôle que doit jouer le secteur privé. Un argument, que Sergio Pimenta, vice-président régional de la Société Financière Internationale (IFC) pour l’Afrique a également mis en avant. Depuis le début de ses opérations, l’IFC a investi plus de 60 milliards de dollars dans des entreprises et des institutions financières du continent. Plus précisément, au cours de son exercice budgétaire 2022, l’institution a engagé 9,4 milliards de dollars dans le secteur privé africain.

Le secteur privé jouera un rôle « de levier qui permettra aux pays de lutter contre les différents chocs à venir, notamment climatiques et alimentaires », explique-t-il à Jeune Afrique. Un avis que partage Abdou Sellam Bello, « la microfinance, lorsqu’elle est bien ciblée, a un effet d’échelle ; elle contribue à construire et consolider la résilience économique ».

Pour Sergio Pimenta, les partenariats public-privé (PPP) sont également des outils à favoriser, car « les PPP bien structurés génèrent des ressources pour le gouvernement en permettant la mise en place de chaînes de valeurs lucratives dans des secteurs clés tels que l’agriculture et les transports », souligne-t-il. Et d’ajouter : « d’autant plus que les PPP financent le développement, sans alourdir le poids de la dette ».

Crédibilité du FMI

Toujours concernant cette fameuse dette, le FMI a conclu, en pleine pandémie, avec le Club de Paris une initiative de suspension du service de la dette (ISSD) pour les pays les plus pauvres. Et, pourtant, l’ambition du Fonds semble avoir été rattrapée par la réalité du contexte. L’initiative ISSD n’a pas concrètement abouti – mis à part au Tchad.

Pour rappel, en 2020, en réponse au Covid-19, le Fonds a directement réagi en augmentant de 185 milliards de dollars les droits de tirage spéciaux (DTS) à allouer à ses États membres. En 2022, près de la moitié des États membres du FMI, à savoir 93 sur 190, ont pu bénéficier de prêts. L’Afrique, a été le continent le plus aidé.

Depuis le 6 mars dernier, après les violents propos du chef de l’État tunisien à l’encontre des Subsahariens, les aides du Fonds pour la Tunisie ont été suspendus. Le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Marouane el-Abassi, et le ministre de l’Économie, Samir Saied, se rendront à Washington pour relancer l’accord de prêt de 1,9 milliard de dollars du FMI.

Chine, Brics…

Les deux institutions devront aussi réagir à des enjeux plus globaux. En plus d’être pris en étau dans la rivalité sino-américaine, le FMI et la BM doivent désormais faire face aux nouvelles volontés des pays émergents guidés par les Brics. Ces derniers veulent en finir avec la dépendance excessive au dollar américain : monnaie de référence du Fonds et devise dans laquelle l’épargne mondiale est placée. Les pays des Brics ont même annoncé vouloir diminuer le volume de transactions en dollars américains, et travailler à l’élaboration d’une nouvelle monnaie qui sera adossée à des matières premières.

Ainsi, la question de la réforme du système monétaire international reviendra sur la table, avec encore plus de ferveur cette année.

Pour plus d’informations et d’analyses sur la Djibouti, suivez Africa-Press

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here