En plein cœur de Paris, une portion de la plus grande nécropole gallo-romaine de Lutèce se dévoile

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En plein cœur de Paris, une portion de la plus grande nécropole gallo-romaine de Lutèce se dévoile
En plein cœur de Paris, une portion de la plus grande nécropole gallo-romaine de Lutèce se dévoile

Africa-Press – Djibouti. Nous avons tendance à oublier que tous les jours, dans une ville comme Paris, nous marchons sur les vestiges de notre histoire. Les travaux d’aménagement d’une nouvelle sortie pour les usagers de la gare “Port Royal” du RER B sont venus nous le rappeler. Une fouille archéologique préventive, prescrite par les services de l’État (Drac Ile-de-France) et menée par les archéologues de l’Institut de recherches archéologiques préventives (Inrap), a permis de mettre au jour, sur une parcelle de 200 m2 située sur l’avenue de l’Observatoire, une cinquantaine de sépultures gallo-romaines.

Datées du 2e siècle de notre ère, elles ne constituent qu’une petite partie de ce qui était la plus grande nécropole de Lutèce à cette époque, appelée “nécropole sud” ou encore nécropole Saint-Jacques. Un espace dévolu aux morts, bien séparé des lieux dans lesquels évoluaient les vivants, qui s’étendait sur plus de quatre hectares à la sortie sud de la ville, le long du cardo maximus, l’un des axes principaux de la cité antique qui correspond à l’actuelle rue Saint-Jacques.

Des rescapés de l’urbanisation

Il s’agit de la première fois depuis les grands travaux de transformation de Paris au 19e siècle que des vestiges de cet immense espace funéraire sont redécouverts. “Nous n’avions jamais mis la main sur les restes de cette nécropole depuis les chantiers haussmanniens”, se réjouit Camille Colonna, responsable d’opération sur la fouille et anthropologue pour l’Inrap. “Alors lorsque nous avons effectué un premier diagnostic au niveau des arbres, le long du trottoir, et que nous avons trouvé trois tombes, dont une avec un défunt qui présentait encore une pièce de monnaie romaine dans la bouche, nous nous sommes montrés très enthousiastes.”

Il est vrai que la préservation de ce petit îlot tient du miracle : de nombreux travaux de voirie ont eu lieu à cet emplacement central de la capitale tout au long du 20e siècle, dont ceux qui ont permis la construction de la ligne du RER B. “Tout aurait pu disparaître, c’est une chance que cette partie ait été préservée”, affirme Camille Colonna. “Nous pensions d’ailleurs qu’à cet endroit se trouvait la limite de la nécropole. Or, on réalise qu’elle se poursuit au-delà de l’immeuble.”

Densité inattendue

Parce que l’essentiel des connaissances archéologiques sur cette nécropole provenaient des observations faites par Théodore Vacquer, “père fondateur” de l’archéologie parisienne (on lui doit notamment la découverte des arènes de Lutèce en 1869), les informations récoltées dans le cadre de cette fouille vont s’avérer précieuses pour les chercheurs, qui ont d’ailleurs déjà eu leur lot de surprises : “Nous ne nous attendions pas par exemple à trouver une telle densité des sépultures”, confie Camille Colonna. Pas moins de 50 tombes ont en effet été dégagées, dont l’organisation ne semble pour le moment suivre aucune logique. “Elles sont disposées dans tous les sens, ont des tailles et des profondeurs diverses, parfois se chevauchent…”, détaille l’anthropologue.

Toutes sont à inhumation, c’est-à-dire qu’elles présentaient à l’origine des cercueils de bois dans lesquels étaient placés les défunts – hommes, femmes comme enfants. À cette période de l’Antiquité pourtant, l’incération est aussi une pratique funéraire courante, de sorte que les deux types de sépultures coexistent largement. De ces coffrages, il ne reste malheureusement aujourd’hui que des clous en fer et des restes tenus de fibre de bois.

Vaisselle et clous de chaussures

Dans un peu moins de la moitié des sépultures, du petit mobilier a pu être dégagé. Des récipients divers en céramique, comme des tasses, des gobelets, des cruches ou des plats, parfois magnifiquement décorés, ou encore des contenants en verre. Plus rarement ont été retrouvées des oboles mortuaires dans la bouche des squelettes, destinées à rétribuer Charon, le passeur des Enfers. Enfin, des traces de chaussures ont pu être identifiées grâce à la présence de nombreux petits clous qui formaient la semelle et maintenaient en place le cuir, des parties aujourd’hui totalement décomposées. “Dans certaines tombes, on constate que plusieurs paires de chaussures ont été déposées. Un défunt n’en avait pas moins de cinq paires à ses côtés, sans doute dans un but rituel.”

Après la fin des opérations de fouilles prévue le 28 avril 2023, tous ces vestiges seront minutieusement étudiés dans le but, entre autres, de mieux comprendre l’origine sociale et les modes de vie des Parisii, ancêtres des Parisiens.

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