Africa-Press – Gabon. L’hôtel particulier Pozzo di Borgo, fleuron du patrimoine gabonais à Paris, est désormais sous la menace d’une vente forcée dans un délai de trois mois. Cette procédure d’urgence expose au grand jour les dettes, les luttes d’influence et les faux pas juridiques d’un État pris à la gorge. À défaut de payer 120,4 millions d’euros (environ 79 milliards FCFA), Libreville risque de voir s’envoler l’un de ses plus prestigieux symboles diplomatiques, au profit de ses créanciers.
Le compte à rebours est lancé. Dans un délai de deux à trois mois, le somptueux hôtel particulier Pozzo di Borgo, propriété du Gabon au cœur du 7e arrondissement de Paris, pourrait être vendu aux enchères si Libreville ne s’acquitte pas des 120,4 millions d’euros (79 milliards de F.CFA environ) réclamés par la société Santullo-Sericom. Dévoilée par Africa Intelligence, l’information met à nu les tensions entre le Gabon et ses créanciers, dans un contexte de trésorerie publique exsangue.
Un ultimatum judiciaire
Selon Africa Intelligence, «le 9 octobre, le luxueux bien […] a fait l’objet d’une procédure de commandement de payer valant saisie immobilière». Initiée par les héritiers de Guido Santullo, l’homme d’affaires italien décédé en 2018, cette action ouvre «la voie à une vente forcée du bien lors d’une vente à la bougie» (vente aux enchères) si le Gabon ne règle pas sa dette. Autrement dit, d’ici à la fin janvier 2026, le Pozzo di Borgo – symbole du prestige diplomatique gabonais – pourrait être cédé au plus offrant, un scénario que le média spécialisé en enquêtes exclusives sur les coulisses des pouvoirs politiques, diplomatiques et économiques africains qualifie d’imminent.
L’État gabonais, conscient du danger, «a interjeté appel du commandement de payer, et a parallèlement saisi en référé le premier président de la cour d’appel afin de faire suspendre son exécution». L’audience est fixée à janvier 2026, preuve que Libreville tente désespérément de gagner du temps.
Une affaire à la croisée du droit et du pouvoir
L’origine du litige remonte à un protocole d’accord transactionnel daté du 26 janvier 2024, que le Gabon juge «frappé de nullité». Ce document, négocié sous l’ère de Jean-Paul Komanda. Ancien premier président du Conseil d’État, celui-ci fut l’un des artisans du protocole d’accord signé le 26 janvier 2024 entre le Gabon et Santullo-Sericom. Cet accord, aujourd’hui au cœur du contentieux, engageait Libreville à verser 90 millions d’euros (environ 59 milliards FCFA) en trois mois en échange de la levée des saisies. Selon Africa Intelligence, cette initiative lui aura coûté sa carrière: démis de ses fonctions en août 2024 par le chef de l’État, il est tombé en disgrâce pour avoir, selon ses détracteurs, «bradé les intérêts de la République».
Selon le média, «Brice Clotaire Oligui Nguema espérait tirer entre 200 millions et 400 millions d’euros [entre 131 et 262 milliards de francs CFA] de la vente du bien», notamment auprès du groupe LVMH. Mais les finances publiques ne permettent guère de manœuvre.
Une vente aux enchères constituerait en tout cas une débâcle: un joyau acquis en 2010 à l’initiative du président Ali Bongo Ondimba, avec un rôle notable de son épouse Sylvia Bongo, autrefois demeure de Karl Lagerfeld, partirait pour un prix plancher de 120 millions d’euros, laissant au Gabon la perte d’un symbole, et à ses créanciers, la victoire du marteau.
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