Emplois Qualifiés: le Pari Risqué du Gouvernement

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Emplois Qualifiés: le Pari Risqué du Gouvernement
Emplois Qualifiés: le Pari Risqué du Gouvernement

Africa-Press – Gabon. À l’occasion de la 139e Journée internationale du travail, le Premier ministre Raymond Ndong Sima s’est livré à un exercice d’équilibriste face aux partenaires sociaux. Satisfecit gouvernemental, chiffres à l’appui, mais aussi reconnaissance de limites structurelles. En filigrane, un message clair: la prospérité partagée reste conditionnée à une transformation structurelle de l’économie et du marché de l’emploi. Un pari que le pouvoir actuel projette au-delà de la transition.

Le ton est resté sobre, mais le message, lui, était sans équivoque, sans excès de lyrisme, mais empreint de reconnaissance. À l’occasion de la fête du travail, célébrée le 1er mai 2025, le Premier ministre Raymond Ndong Sima s’est adressé à la nation en général, et aux travailleurs en particulier, pour dresser un état des lieux des avancées sociales en cours. L’exercice, classique mais délicat dans un contexte de transition politique, a donné lieu à une mise en perspective chiffrée, lucide et parfois critique, de la trajectoire actuelle du marché de l’emploi au Gabon.

Dès l’entame de son propos, le chef du gouvernement a salué l’abnégation des travailleurs gabonais: « C’est vous qui faites tenir debout notre édifice », a-t-il déclaré. Un hommage symbolique, qui visait à souligner le rôle central des forces vives dans le processus de réhabilitation de l’État et de reconstruction de l’économie nationale. Un ton solennel, empreint de gratitude, visant à resserrer les liens entre l’État, le patronat et les forces vives du monde du travail.

Un bilan chiffré entre avancées et désillusions

Côté réalisations, Raymond Ndong Sima a présenté un tableau relativement positif. Depuis le début de la transition, 26 900 emplois ont été créés dans le secteur public et 12 000 dans le secteur privé, soit un total de 38 900 postes générés. Dans la fonction publique, les régularisations administratives se sont multipliées, avec notamment la reprise des admissions en solde, suspendues depuis 2020, ainsi que le paiement partiel des arriérés liés à l’arrimage des pensions.

Mais ces efforts, bien qu’appréciables, ne suffisent pas à enrayer une réalité plus préoccupante: « Notre pays n’arrive pas à absorber la masse des jeunes à la recherche d’un premier emploi », a reconnu le Premier ministre, dénonçant une « asynchronie structurelle » entre la démographie galopante, la formation académique et les besoins réels de l’économie. Il l’a dit sans détour: « Les solutions en matière d’emploi ont besoin de temps. »

Cap sur 2050, avec des leviers à activer

Pour tenter de redresser cette courbe, le gouvernement mise désormais sur la stratégie Gabon 2050, officiellement présentée quelques jours avant la fête du travail. Cette feuille de route nationale repose sur trois piliers: une croissance plus inclusive et équitable, une diversification économique compétitive, et une gouvernance rénovée des ressources publiques.

Parmi les dispositifs d’accompagnement déjà engagés figure un fonds de portage de 20 milliards de francs CFA, confié à la Banque pour le Commerce et l’Entrepreneuriat, destiné à soutenir les PME et PMI. Ce mécanisme, à terme, devrait générer 20 000 emplois. Par ailleurs, les bourses d’études seront désormais prioritairement orientées vers les filières techniques et professionnelles. Le gouvernement prévoit également la construction de nouveaux lycées agricoles, le développement de l’apprentissage en entreprise, l’instauration de stages obligatoires et une réforme du système de formation professionnelle.

Dialogue social et réformes syndicales en suspens

Sur le front du dialogue social, l’exécutif reconnaît que des efforts restent à fournir. La réforme de la représentativité syndicale est en suspens, mais devrait reprendre prochainement avec l’organisation d’élections dans les entreprises. Objectif: doter les travailleurs de délégués légitimes et refonder les conventions collectives sur des bases modernes.

« Le chantier de la représentation syndicale […] n’a pas encore été conduit à son terme. Il le sera dans un prochain avenir », a promis Ndong Sima, ajoutant que le contrôle des contrats de travail, des grilles salariales et du recours à la main-d’œuvre étrangère serait renforcé, notamment à travers des inspections plus rigoureuses.

Le réalisme comme posture politique

Sans nier l’ampleur des défis à relever, Raymond Ndong Sima a rappelé que « la prospérité partagée ne peut être atteinte que si la société s’approprie un projet commun de transformation économique ». Un appel à la responsabilité collective qui s’inscrit dans le thème national de cette édition: Garantir des emplois qualifiés et décents pour tous.

Mais la tâche est immense. Le temps imparti à la transition est compté, et les réformes entamées nécessitent une continuité institutionnelle que seul le scrutin présidentiel à venir pourra éventuellement garantir. D’ici là, le gouvernement de transition s’efforce d’imprimer sa marque, sans illusion sur l’immédiateté des résultats, mais avec la conviction qu’aucune fatalité ne condamne le Gabon à l’oisiveté économique.

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