Africa-Press – Gabon. Plus d’un Français sur quatre s’estime directement touché par les attentats du 13 novembre 2015, d’après une étude Crédoc. Il y a dix ans, un groupe de dix terroristes coordonnait une série d’attentats quasi simultanés à Paris et Saint-Denis. Des explosions retentissaient aux abords du Stade de France, alors que trois fusillades étaient perpétrées sur des terrasses des 10ème et 11ème arrondissements de Paris. Quelques minutes plus tard, trois terroristes pénétraient dans la salle du Bataclan en plein concert et tiraient sur la foule.
Ce soir-là s’est déroulé le troisième attentat le plus meurtrier d’Europe, derrière celui de Madrid en 2004 et celui de la banlieue de Moscou en 2024. On dénombre 131 victimes, 500 blessés physiques et près de 1300 blessés psychiques, des victimes civiles et professionnelles, dont les pompiers, policiers, médecins qui sont intervenus.
Un film sur les témoignages des victimes et l’organisation de la recherche scientifique
Dans le sobre espace « Science actualités » de la Cité des Sciences résonnent les témoignages de plusieurs victimes et de scientifiques ayant participé aux différentes études menées à la suite des attentats. Ce film retrace la complexité de la construction des mémoires individuelle et collective après le traumatisme. Pourquoi se rassembler en associations? Quel devenir pour les mémoriaux éphémères? Quels mécanismes physiopathologiques derrière le trouble de stress post-traumatique?…
Sylvie Bonduelle assistait au concert du groupe « Eagles of death metal » le soir du 13 novembre 2015 au Bataclan. Elle raconte comment « échanger » au sein de groupes de paroles lui a permis de « faire sortir » des éléments de son traumatisme. Elle revient aussi sur le déroulement des exercices auxquels elle s’est prêtée dans le cadre du large programme de recherche « 13-Novembre » (lire l’encadré ci-dessous).
Le « Programme 13-Novembre » a été lancé par l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, le CNRS et l’Inserm à la suite des attentats. Il vise à mieux comprendre les effets du traumatisme sur le cerveau. Des mécanismes sous-jacents, aux facteurs de résilience, jusqu’à la transmission intergénérationnelle, les études 1000, Remember, Care, ESPA, et Crédoc, qui ont émergé de ce programme, éclairent d’un jour nouveau les répercussions des traumatismes.
Plusieurs tableaux thématiques structurent l’exposition. Sous forme de brèves, de chiffres, ou d’infographies riches, on découvre tour à tour le terrorisme à l’échelle internationale, les enjeux sociétaux, les défis de l’antiterrorisme, et les découvertes scientifiques qui ont découlé des nombreuses études liées aux attentats.
Les tableaux thématiques de l’espace Science actualités à la Cité des Sciences et de l’Industrie pour l’exposition sur les attentats du 13 novembre. Crédits: Marie Parra
En outre, l’exposition revient sur des résultats de l’important « Programme 13-Novembre ». L’une des études s’est intéressée au discours des victimes, comme jamais auparavant. Mille personnes, victimes, témoins ou habitants du quartier, ont été interrogées mais surtout écoutées sans être interrompues, et enregistrées. Au total: 1431 heures de vidéo traitées à l’aide de logiciels de textométrie. Résultat? Les chercheurs mettent en évidence des marqueurs linguistiques du trouble de stress post-traumatique (lire l’encadré ci-dessous), la prévalence du « je » dans les témoignages des victimes civiles par rapport au « nous » utilisé par les professionnels intervenus sur place par exemple. Les scientifiques révèlent également une répartition genrée du discours, plus centrée sur l’émotion chez les femmes et sur les faits chez les hommes.
Qu’est-ce que le trouble de stress post-traumatique?
Après un traumatisme, dont on a été victime ou témoin, plusieurs manifestations peuvent apparaître: hypervigilance, cauchemars, troubles du comportement alimentaire, flashbacks ou pensées intrusives… Lorsqu’ils durent plus de quatre semaines, on parle de trouble de stress post-traumatique. Généralement, ces symptômes disparaissent spontanément après trois mois, mais chez 20% des individus qui en sont atteints, le syndrome peut devenir chronique.
Etudier les mécanismes biologiques derrière le trouble de stress post-traumatique
“Après un an, la moitié des personnes exposées aux attentats et qui avaient participé aux études présentaient un trouble de stress post-traumatique,” rapporte Francis Eustache, chercheur en neuropsychologie à l’Inserm et impliqué dans le « Programme 13-Novembre », pour Sciences et Avenir. L’exposition de la Cité des Sciences revient sur l’étude Remember dirigée par Pierre Gagnepain et qui explore le fonctionnement du cerveau face au traumatisme. En outre, comment expliquer la résurgence des souvenirs indésirables en images soudaines et incontrôlées? Quand on vit un événement violent, une cascade d’hormones afflue dans le cerveau et on se retrouve sur-stimulé par son environnement. Alors, l’hippocampe n’est plus capable de consolider correctement le souvenir.
« Ce qui fait toute la différence avec la résurgence d’un souvenir classique, c’est que l’on revit son traumatisme au présent », explique Francis Eustache. Mais pourquoi? L’étude Remember met en évidence un découplage entre l’hippocampe et le cortex préfrontal, qui a un rôle essentiel dans l’inhibition des pensées intrusives. C’est grâce à lui qu’on parvient à chasser l’image de nos vacances pour se mettre à travailler par exemple, ou qu’on fait abstraction d’une petite contrariété afin de s’endormir.
Des mécanismes de résilience, aux sciences expérimentales qui contribuent à l’anti-terrorisme, en passant par les étapes de la réaction sociale à un attentat… La Cité des Sciences et de l’Industrie parvient à dresser un tableau détaillé des enjeux liés aux attentats, au moyen d’encarts succincts, précis et toujours sourcés.
Informations pratiques:
13 novembre 2015: que dit la science des attentats? – Espace « Science actualités » à La Cité des Sciences et de l’Industrie de Paris
Jusqu’au 22 mars 2026
Traumatisme
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Stress post-traumatique
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