Africa-Press – Guinée. Les capacités d’orientation et de navigation des espèces migratrices fascinent les scientifiques. Aujourd’hui, leur suivi est précis et facilité grâce à l’utilisation de balises satellites fixées sur les animaux. C’est ainsi qu’en octobre 2022, des chercheurs ont attribué à une barge rousse, un oiseau qui fréquente les zones humides, le titre de migrateur ayant effectué le plus long trajet sans escale. L’oiseau a volé plus de 11 jours et parcouru 13.560 kilomètres sans se poser. Un record mondial.
Mais comment les oiseaux migrateurs s’orientent-ils et affinent-ils leur trajectoire au cours des années ? Des chercheurs de l’université du Wyoming et de l’institut Max Planck ont tenté de répondre à cette dernière question en étudiant de près les migrations de cigognes blanches (Ciconia ciconia). Leurs résultats ont été publiés dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (Pnas).
Les atouts de l’exploration
Grâce à des balises GPS fonctionnant à l’énergie solaire, les scientifiques ont renseigné les migrations de plus de 250 cigognes blanches entre 2013 et 2020. Ainsi, ils ont pu suivre les oiseaux pendant leur migration printanière entre l’Afrique du Nord et leurs aires de nidification en Allemagne et en Autriche. Tous les détails du trajet sont enregistrés, de l’itinéraire à la vitesse de l’oiseau, en passant par les escales.
A partir de ces résultats, les chercheurs ont même pu estimer la dépense énergétique de chaque individu pendant leur vol. Résultat: les jeunes prennent le temps d’explorer les alentours, quitte à effectuer un détour, mais à mesure que les oiseaux vieillissent, leurs migrations deviennent de plus en plus efficaces.
“Les individus plus âgés cessent d’explorer de nouveaux endroits et se déplacent plus rapidement et plus directement”, analyse Ellen Aikens, auteure principale de l’étude. Leur mémoire spatiale se développe avec leur expérience, leur permettant d’emprunter des raccourcis d’une année sur l’autre. Un fonctionnement qui pourrait s’appliquer à d’autres animaux migrateurs, selon eux. “Les cigognes ont progressivement redressé leurs routes de migration pour trouver des moyens plus directs de se déplacer depuis l’Afrique, vers les aires de nidification estivales en Europe”, analysent les chercheurs.
“Les cigognes passent d’une stratégie d’économie d’énergie à une stratégie d’économie de temps”
Mais ces nouveaux trajets, plus directs, entraînent aussi une plus grande dépense d’énergie… Les chercheurs résument: “Les cigognes passent d’une stratégie d’économie d’énergie”, avec des escales plus fréquentes chez les jeunes, “à une stratégie d’économie de temps, au fur et à mesure qu’elles vieillissent”. Un comportement qui pourrait notamment s’expliquer par la compétition pour les ressources alimentaires au point d’arrivée.
Lorsqu’il s’agit d’expliquer des comportements migratoires, les scientifiques ont longtemps mis de côté l’implication d’un apprentissage. En effet, les facteurs génétiques et les comportements sociaux sont particulièrement importants pour comprendre les migrations. Toutefois, d’après cette nouvelle étude, les informations acquises individuellement semblent, elles aussi, façonner le comportement des oiseaux. “L’apprentissage au cours de la vie représente un mécanisme supplémentaire et complémentaire qui façonne la migration animale”, concluent les auteurs.
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