Unoc Soutient la Cryosphère avec Programme Décennal

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Unoc Soutient la Cryosphère avec Programme Décennal
Unoc Soutient la Cryosphère avec Programme Décennal

Africa-Press – Madagascar. L’Arctique se réchauffe trois à quatre fois plus vite que la moyenne mondiale. En Antarctique, la banquise connaît un recul spectaculaire de l’extension de sa banquise. En conséquence, la montée du niveau des mers s’accélère avec des répercussions mondiales sur les zones côtières et les activités humaines qui y sont installées. C’est le constat effectué par la communauté scientifique qui travaille sur les Pôles. « L’essentiel des changements observés est plus précoce et plus rapide qu’anticipé, ce qui souligne la nécessité d’intensifier la recherche pour mieux comprendre et prévoir ces évolutions », souligne Gaël Durand, chercheur CNRS à l’Institut des géosciences de l’environnement (IGE) et coordinateur de la prospective scientifique polaire publiée ce 9 juin à la conférence des Nations unies sur l’océan (UNOC).

Les chercheurs qui fréquentent les zones polaires sont peu nombreux. Beaucoup se connaissent. Et ils font les mêmes constats. Celui qui les inquiètent vraisemblablement le plus, c’est « l’amplification arctique ». La hausse de la température mondiale a un impact bien plus marqué sur cette partie de la planète englacée. Les impacts sont majeurs et surtout bien plus visibles que ceux bien plus cachés sur les autres biomes de la planète: fonte de la banquise et des glaciers des calottes comme des montagnes, dégel du pergélisol, modification de l’albédo, hausse des feux de forêts (tels que ceux que subit actuellement le Canada), bouleversements biogéochimiques. Les phénomènes en cours reposent sur des rétroactions complexes entre l’océan et l’atmosphère, liées à la neige, la glace, les nuages et les aérosols. « Or nous sommes loin de comprendre tous les mécanismes et les interactions de cette amplification et il est crucial de mieux les décrire pour affiner les modèles climatiques et anticiper les impacts globaux », poursuit Gaël Durand.

Une « groenlandisation » de l’Antarctique

Au-delà des 15 défis de recherche recensés par la communauté scientifique travaillant sur les Pôles, la prospective polaire propose de relier plus fortement les travaux menés en Arctique et Antarctique qui sont aujourd’hui largement déconnectés. « Nous assistons à une « groendlandisation » de l’Antarctique, assure Gaël Durand. Les zones côtières du sud du Groenland expérimentent aujourd’hui des durées de températures positives de plus en plus longues affectant la glace et les écosystèmes, et l’Antarctique commence à suivre cette voie. » L’idée est donc de mieux relier les travaux menés en Arctique avec la situation au pôle Sud où les températures restent négatives mais où les modèles montrent que le réchauffement va intervenir dans les prochaines décennies. Il s’agit ainsi d’anticiper les évolutions biologiques, chimiques et physiques que pourrait connaître l’Antarctique si les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter.

Au pôle Sud comme au pôle Nord, une grande partie de l’explication des phénomènes en cours se trouve à l’interaction de l’océan, de la glace et de l’atmosphère. Or, c’est un domaine où les incertitudes restent majeures. Ainsi, la fonte de la banquise groenlandaise pourrait-elle provoquer un ralentissement de la circulation méridienne de retournement de l’Atlantique (Amoc) avec des effets majeurs sur le climat mondial. Mais il est difficile de prévoir si, et quand, ce point de bascule irréversible se déroulera. En Antarctique, ce sont les relations entre la glace et l’océan qui restent des questions non résolues ainsi que l’évolution des glaciers de ce continent. « Il est crucial d’améliorer les observations de la calotte antarctique depuis la côte jusqu’au plateau central », estime Gaël Durand. Les analyses par radar donnent déjà sur certains glaciers très étudiés les variations en densité et en structure des différentes couches sur plusieurs centaines de mètres. « Avec l’utilisation d’appareils de sismologie, on peut également avoir une image en 3D d’un glacier et donc ses zones compactes, ses fractures, les endroits où l’écoulement est plus rapide, ce qui permet de mieux comprendre son comportement », affirme Dimitri Zigone, chercheur à l’Institut des sciences de la Terre de Strasbourg.

La rénovation de la station Dumont-d’Urville, le remplacement du Marion-Dufresne

Cette stratégie polaire exige des modifications dans le fonctionnement actuel des programmes scientifiques. « Il est d’abord essentiel d’augmenter la pluridisciplinarité au sein de la recherche, estime Dimitri Zigone. Glaciologues, climatologues, physiciens, biologistes doivent apprendre à mieux collaborer notamment pour mieux décrire comment la modification actuelle du milieu affecte le climat mondial mais aussi la vie dans ces zones. ». Une partie des financements prévus par la stratégie polaire sera ainsi orientée vers les projets interdisciplinaires. Mais il s’agit aussi de renforcer et pérenniser les capacités d’observation. Aujourd’hui, l’institut polaire Paul-Emile-Victor (IPEV), qui assure la logistique pour permettre aux chercheurs d’accéder à l’Antarctique, est notoirement sous-doté. La station Dumont-d’Urville est vieillissante et devra être rénovée avant 2050. La gestion des centres de recherche implantés en Antarctique devront très probablement faire l’objet de financements internationaux. Par ailleurs, le Marion-Dufresne, seul navire sur lequel repose l’accès aux îles Kerguelen, Saint-Paul, Amsterdam, Crozet, devra être remplacé en 2032. La stratégie polaire du CNRS prévoit un investissement d’un milliard d’euros sur dix ans. La Commission européenne a décidé d’un financement global de 800 millions d’euros pour l’ensemble de la recherche européenne.

Ce plan français sur dix ans coïncide avec la décade d’action pour la cryosphère de l’Unesco. L’organisme onusien ne finance rien mais se veut comme le coordonnateur des programmes de recherche qui seront décidés par les États dans les prochaines décennies. L’Unesco a par ailleurs dans son viseur la prochaine année polaire internationale, qui aura lieu en 2032 (c’est la cinquième, la précédente a eu lieu en 2007). Il faut donc s’organiser dès à présent pour ce rendez-vous mondial qui met en exergue le rôle essentiel des zones englacées sur l’équilibre de la planète. Le contexte n’est aujourd’hui pas très favorable. « Les tensions croissantes entre grandes puissances mettent à l’épreuve la coopération internationale, écrit le CNRS dans la présentation de sa stratégie polaire. La guerre en Ukraine a entraîné une mise en pause des collaborations scientifiques françaises et européennes avec la Russie tandis que l’incertitude plane sur la politique climatique et écologique des États-Unis, le respect des souverainetés et des frontières et le futur de la recherche américaine. »

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