Le G5 Sahel pourra-t-il « survivre » à quatre sans le Mali ?

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Le G5 Sahel pourra-t-il « survivre » à quatre sans le Mali ?
Le G5 Sahel pourra-t-il « survivre » à quatre sans le Mali ?

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Mali. A la suite de la décision prise par le Mali de se retirer du groupe G5 Sahel et de sa « Force conjointe », dans la nuit du dimanche 15 mai 2022, les médias et la communauté africaine ainsi qu’internationale attendent toujours de savoir s’il y aurait un retour à la normale ou une évolution de la situation dans ce groupe sahélien.

Nous ne pensons pas que la junte militaire malienne, que préside le colonel Assimi Goïta, ait prise à la légère une telle décision. Mais, essayons ici d’examiner cette délicate et préoccupante situation.

Initiative tchadienne

Assimi Goïta recevant l’envoyé spécial du Tchad Abderaman Koulamallah

Dans ce contexte, le Président de la transition tchadienne, le général Mahamat Idriss Deby, a dépêché une délégation auprès de son homologue malien à Bamako. En effet, Deby a envoyé une délégation dans la capitale malienne, pour remettre un message à son homologue Assimi Goita, par le biais de son Ministre de la Communication et Porte-parole du Gouvernement, Abderaman Koulamallah, qui conduisait cette délégation arrivée le jeudi 19 mai à Bamako.

L’envoyé spécial tchadien a été reçu en audience hier, vendredi 20 mai 2022, par le Président de Transition du Mali, le Colonel Assimi Goïta, ainsi que les membres qui l’accompagnaient pour cette mission.

Il s’agirait là d’une initiative qui intervient quelques jours seulement après l’annonce du Mali de son retrait du G5 sahel.

Rappelons que le Tchad a conservé la présidence du G5 Sahel, certes, mais n’a pas cherché, en aucun cas, le conflit avec le Mali, lequel a claqué la porte au groupe sahélien pour défendre sa souveraineté bafouée, selon lui.

C’est d’ailleurs pour tirer tout ça au clair, que le ministre tchadien Abderaman Koulamallah, porte-parole du gouvernement, est venu dire au président malien de transition, que ce n’est pas contre le Tchad qu’il faut être en colère :

« Le Tchad tient énormément à ses relations bilatérales avec le Mali et a voulu réexpliquer qu’en aucun cas, il n’était responsable des problèmes qui ont conduit au départ du Mali du G5-Sahel. Le Tchad n’a aucun problème avec le Mali ».

Ce à quoi le Tchad a sollicité à ce que le Mali reconsidère sa position.

Entre-autres, Ndjamena a prévu de mener des consultations auprès des autres pays membres afin de répondre aux préoccupations maliennes, pour permettre à Bamako d’assurer finalement la présidence tournante du G5 Sahel.

Le G5 Sahel serait-il menacé d’extinction ou peut-il survivre à quatre ?

Huit ans après sa création en 2014, l’avenir de cette organisation régionale, lancée pour tenter d’endiguer la menace terroriste qui ne cesse de gagner du terrain au Sahel, semble compromise plus que jamais, et menacé d’étouffement et probablement d’extinction.

Rappelons tout d’abord que le G5 Sahel fût mis en place à l’origine comme entité régionale collective dans le cadre d’une politique commune visant à faire face à des défis sécuritaires. Si ce groupe s’est retrouvé réduit aujourd’hui par le retrait du Mali, cela pose des questions de la faisabilité du maintien d’une telle institution complexe, mais aussi une question de pertinence : Le G5 Sahel a-t-il la chance de survivre à quatre, sans le Mali ? »

Commentant ce retrait, l’ancien ministre de la Défense du Niger, Kalla Moutari, a affirmé que ce retrait signifie la perte de ressources financières pour le « partant » car, en se retirant, le Mali renonce ainsi à tout l’appui financier et technique, dont il bénéficie dans le cadre de la coopération au sein du G5.

Point culminent de la position malienne

Selon le porte-parole du gouvernement malien, le colonel Abdoulaye Maïga, son pays dénonce une « instrumentalisation » du G5 Sahel derrière le blocage de la présidence tournante malienne, car la présidence du G5 Sahel aurait dû être confiée au Mali cette année.

Une responsabilité dont il fût écarté, selon les autorités de transition, par « un État membre du G5 Sahel », avec l’appui d’un pays tiers extrarégional, dans le seul but de priver le Mali de prendre possession de la présidence du G5 Sahel ».

A noter que la raison invoquée dans le texte du communiqué rendu public par Bamako la veille du 16 mai dernier, mentionne « que la non-tenue du sommet des chefs d’états du G5 Sahel qui, traditionnellement a lieu en début d’année afin de remettre la présidence tournante à un des pays membres, est une violation, car ce sommet aurait dû se tenir à Bamako ».

Autre point de vue

Ornella Moderan, Responsable du programme Sahel du Think Tank africain ‘Institut d’études de sécurité

Revenant sur l’affaire, Ornella Moderan, Responsable du programme Sahel du Think Tank africain ‘Institut d’études de sécurité (ISS)’, a indiqué que : « Il ne fait aucun doute que la France soit visée en premier, car les autorités maliennes lui reprochent une ingérence dans l’architecture régionale de gouvernance et de sécurité ».

« Pour ce qui est de l’autre pays qui serait membre du G5 et manipulé par une partie extrarégionale, je pense qu’on ne s’avance pas trop à supposer qu’il s’agit du Niger. Le pays a été particulièrement vocal contre les autorités de transition maliennes ces derniers mois, notamment à travers son ministre des Affaires étrangères », a-t-elle ajouté.

Toutefois, on a bien le droit de se demander si le blocage de la présidence tournante n’était pas surtout un « prétexte » pour quitter le G5 Sahel et consolider davantage la coopération avec d’autres partenaires, comme « la Russie par exemple ».

C’est d’ailleurs pourquoi faut-il replacer cette décision dans un contexte de profonde reconfiguration des alliances dans la région, ces derniers mois.

Si c’est de se libérer des anciennes alliances qu’il s’agit, alors on peut se demander quelle sera la prochaine structure dans le viseur des autorités maliennes, même si pour la partie tchadienne, l’espoir n’est pas encore perdu et que tous les moyens de persuasion seront utilisés pour convaincre les autorités maliennes de se raviser.

Néanmoins, après les forces « Barkhane » et « Tabuka », puis maintenant le « G5 Sahel », les autorités maliennes comptent-elles mettre un terme à la « Minusma » ? On le saura sûrement au cours du mois de juin prochain…

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