Abdourahamane Salifou
Africa-Press – Niger. Ce 10 novembre 2025 marque 38 ans du décès du Général Seyni Kountché, ancien Chef d’État qui dirigea le Niger du 15 avril 1974 jusqu’à cette date du 10 novembre 1987.
La nation nigérienne garde en mémoire l’image d’un homme d’État soucieux de la destinée de son pays. Son parcours et les empreintes de son passage à la tête du pays ont profondément marqué l’histoire politique contemporaine du Niger.
Cette commémoration pour le Niger, engagé dans une phase de refondation et de reconquête de sa souveraineté nationale, prend davantage de relief.
Un parcours militaire forgé dans la rigueur et la discipline
Selon sa biographie officielle, il est né le 1er juillet 1931 à Damana Fandou, dans le département de Filingué (région de Tillabéri). Seyni Kountché est issu d’une lignée djerma, celle des Zarmakoy Tondikandie. Très jeune, il choisit la voie militaire et intègre, à l’âge de 13 ans, l’École des enfants de troupe de Kati au Mali, puis celle de Saint-Louis au Sénégal.
Engagé en 1949 dans l’armée coloniale française, il participe à plusieurs opérations extérieures, notamment en Indochine et en Algérie, où il acquiert une solide expérience militaire. En 1957, il est promu sergent, avant de rejoindre, après l’indépendance du Niger en 1960, les Forces armées nigériennes nouvellement constituées.
Homme de devoir et de rigueur, Kountché gravit rapidement les échelons. Il devient successivement adjoint au chef d’état-major, puis chef d’état-major général des Forces armées nigériennes en 1973. Ce parcours exemplaire, marqué par la discipline et la loyauté, lui confère une légitimité incontestable au sein de l’institution militaire.
Le coup d’État du 15 avril 1974: un tournant dans l’histoire politique du Niger
Le 15 avril 1974, le lieutenant-colonel Seyni Kountché prend le pouvoir à la suite d’un coup d’État contre le président Hamani Diori, au pouvoir depuis l’indépendance en 1960. Ce renversement intervient dans un contexte de crise économique, de sécheresse, de mécontentement social et d’affaiblissement du parti unique de fait, le PPN-RDA.
À son arrivée à la tête de l’État, Kountché suspend la Constitution, dissout l’Assemblée nationale et interdit les partis politiques. Il instaure le Conseil Militaire Suprême (CMS) comme organe de direction du pays, affirmant vouloir restaurer l’ordre, la discipline et la moralité publique.
Ce changement de régime marque le début d’une ère nouvelle: celle d’un État dirigé par une junte militaire, caractérisé par la centralisation du pouvoir, la rigueur dans la gestion et la primauté de la stabilité nationale sur le pluralisme politique.
Un leadership ferme, entre autorité et réformes
Chef de l’État, Ministre de la Défense, de l’Intérieur et Commandant en chef des Forces armées, le Général Kountché incarne une autorité totale sur l’appareil d’État. Son régime, souvent qualifié d’autoritaire, se distingue par une forte présence militaire dans la gouvernance.
Malgré plusieurs tentatives de coup d’État déjouées (1975, 1976, 1983), le pouvoir de Kountché demeure solide. Il amorce néanmoins, à partir de 1983, une ouverture progressive vers les civils, avec la nomination d’un Premier ministre civil et la création d’une Commission de préparation d’une Charte nationale en 1984.
Son objectif déclaré est la restauration de la stabilité, la relance économique et la réhabilitation de l’État. S’il limite les libertés politiques, il mise sur la rigueur administrative et le développement de base pour asseoir la légitimité de son action.
Des décisions marquantes et un héritage contrasté
Le Général Seyni Kountché a laissé dans la mémoire nationale plusieurs décisions et réalisations majeures. Parmi celles-ci, la gestion stratégique de la ressource en uranium, dont le Niger est l’un des principaux producteurs mondiaux ; la réorganisation de l’administration territoriale et le renforcement du rôle des collectivités rurales ; la relance du monde agricole et pastoral, en réponse aux effets dévastateurs des sécheresses ; le retour en liberté de l’ancien président Hamani Diori en 1984, symbole d’un geste politique d’apaisement ; le maintien de l’ordre public et de la stabilité nationale, dans un contexte régional particulièrement instable.
Sur le plan symbolique, l’empreinte du Général Kountché demeure forte: plusieurs infrastructures portent son nom, à l’image du Stade Général Kountché et du Pont Général Seyni Kountché à Niamey, témoignage de la place qu’il occupe dans l’histoire nationale.
Un décès qui a marqué la nation
Le Général Seyni Kountché s’éteint le 10 novembre 1987 à Paris, à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, des suites d’une tumeur au cerveau. Sa disparition plonge le pays dans une profonde émotion. Son successeur, le Général Ali Saïbou, assure alors la continuité du régime militaire, avant l’ouverture politique du début des années 1990.
Depuis lors, chaque 10 novembre est l’occasion, pour le Niger, de se souvenir de ce dirigeant dont le règne, jugé autoritaire par les uns, rigoureux pour les autres, a laissé une empreinte durable dans la construction de l’État moderne.
Un héritage à la fois admiré et discuté
Pour de nombreux Nigériens, le Général Kountché demeure le symbole d’un État fort, discipliné et souverain. D’autres y voient les limites d’un système fermé, marqué par l’absence de pluralisme politique et de libertés publiques.
En revisitant son œuvre, la nation nigérienne est invitée à une lecture critique de l’histoire: reconnaître les acquis, sans occulter les dérives.
Un souvenir qui interpelle le présent
À l’heure où le Niger poursuit sa refondation institutionnelle et économique, la figure du Général Seyni Kountché resurgit comme un repère historique. Son parcours rappelle la nécessité d’un État fort, au service du peuple et de la souveraineté nationale, mais aussi les risques d’un pouvoir sans contrepoids.
Ainsi, en cette journée commémorative, le Niger rend hommage à l’un de ses fils les plus marquants, dont la mémoire continue d’habiter la conscience collective.
Source: Agence Nigérienne de Presse
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