Africa-Press – Niger. La COP30 devrait être celle de la mise en œuvre et de la vérité. Après avoir adopté le cadre juridique général de l’Accord de Paris entre 2015 et 2024, la réunion de Belém devait marquer le début de l’action pour la communauté internationale pour limiter la hausse de la température mondiale à 1,5°C. Terminée dans la confusion samedi 22 novembre 2025, la conférence dessine un monde fragmenté entre opposants à la transition énergétique (pays producteurs de pétrole, Russie, dans une moindre mesure l’Inde), tenants d’une action volontariste plus forte (Union européenne, Amérique latine, Afrique, petits états îliens) et pays émergents craignant pour la pérennité de leur développement économique. Des progrès ont cependant été enregistrés et le multilatéralisme climatique est toujours vivant malgré des vents contraires très forts: sortie des Etats-Unis de l’accord, remontée du climato-scepticisme dans les pays développés, accès de nationalisme à l’échelle mondiale.
Pour la première fois dans les trente ans d’histoire des COP où l’organisateur s’est toujours félicité du résultat final, le président de la négociation, André Correa do Lago, a reconnu que le résultat était décevant. Mais a annoncé un renforcement dans les prochains mois des rencontres internationales sur l’énergie et la déforestation.
Pas de sortie des énergies fossiles dans le texte final…
Sur ce sujet, Belém marque une régression par rapport à la COP28 de Dubaï (Emirats Arabes Unis) où les Etats avaient adopté dans la déclaration finale une trajectoire de sortie du pétrole, du gaz et du charbon. Cet objectif n’est pas repris deux ans plus tard, ce qui démontre un réel échec pour la « COP de la mise en œuvre » selon les ambitions brésiliennes. Aux Etats pétroliers se sont joint les pays émergents qui craignent des pénuries d’énergie qui entraveraient leur croissance économique. Si en effet les énergies renouvelables, et notamment le solaire, constituent désormais la majorité des investissements dans le secteur énergétique, ces nouvelles capacités sont installées principalement dans les pays développés et la Chine.
Avec le soutien de la présidence brésilienne, la Colombie et les Pays-Bas ont annoncé la tenue les 28 et 29 avril 2026, dans la ville portuaire de Santa Marta en Colombie, de la première conférence internationale sur la transition juste et la sortie des énergies fossiles. Quatre-vingt-six pays ont annoncé soutenir l’initiative qui permet aux plus volontaristes d’avancer sur la transition énergétique en s’extrayant de la règle du consensus qui prévaut dans les COP.
Cet échec intervient au moment où les scientifiques constatent un début d’incurvation de la courbe des émissions de gaz à effet de serre. Les climatologues du Global Carbon Project estiment que ce pic sera atteint d’ici la fin de la décennie et le groupement scientifique « Climate TRACE » spécialisé dans la mesure des émissions, assurent que la Chine, premier émetteur mondial, devrait atteindre le pic de ses émissions très prochainement. Dans les faits, la sortie des énergies fossiles a commencé.
… ni d’arrêt de la déforestation
C’est un échec personnel pour le Brésil de Lula. Le texte final ne comporte pas l’objectif de la fin de la déforestation pour 2030, un but qui est aussi présent dans l’accord de Kunming-Montréal sur la biodiversité. L’affaiblissement du puits terrestre de carbone est pourtant l’un des sujets préoccupants du changement climatique. Des avancées ont cependant eu lieu à Belém où les populations autochtones se sont fait entendre.
« Les marches et manifestations organisées aux portes des négociations ont conduit à la démarcation de 14 territoires, sécurisant les droits de peuples autochtones sur plus de 2,4 millions d’hectares de terres au Brésil. Les droits, l’accès à la terre ainsi que les savoirs des peuples autochtones et des communautés locales, comme les droits des personnes afro-descendantes, ont été formellement reconnus. Cette avancée peut influer sur les discussions futures », a déclaré Carolina Pasquali, directrice exécutive de Greenpeace Brésil. La présidence brésilienne a annoncé vouloir continuer à travailler à l’élaboration d’une trajectoire de déforestation permettant de remplir l’objectif à 2030.
Des contributions nationales qui restent insuffisantes
Au début de la COP30, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) a publié sa dernière estimation des « contributions déterminées au niveau national » (CDN) que les Etats ont déposé auprès du secrétariat de la Convention onusienne sur le climat. Les actuels engagements mènent à une augmentation de la température mondiale de 2,3°C à 2,5°C d’ici la fin du siècle. En l’état actuel, l’Accord de Paris n’est donc pas respecté. Les quinze derniers jours n’ont rien changé et le fossé entre ce qu’il faut faire et les ambitions actuelles reste toujours aussi large.
Cependant, l’application pratique et technique de ces CDN reste un domaine très actif pour les ingénieurs. Ainsi, durant cette COP, le Citepa, l’association technique de mesure des émissions atmosphériques en France, et son homologue chinois du National Institute of Metrology ont présenté un programme inédit de coopération scientifique sur la transparence des mesures des émissions de gaz à effet de serre en unissant notamment les méthodes utilisées par la métrologie (Lidar, satellites) afin d’obtenir des mesures fiables, vérifiables et transparentes des émissions chinoises.
Un accord sur la transition juste
Pour nombre d’ONG, c’est l’avancée majeure de cette COP. Le mécanisme de transition juste consiste à financer l’adaptation des populations les plus pauvres, des travailleurs dont l’activité dépend encore aujourd’hui des énergies fossiles, des agriculteurs qui devront changer leurs pratiques ou affronter des conditions météo plus difficiles. La défense des droits humains et syndicaux lors de la transition énergétique est également reconnue. Ce mécanisme doit également réfléchir aux mutations du système économique pour éviter les laissés pour compte.
Un plan d’action en direction des femmes a été également adopté. Les négociateurs font le constat que les femmes sont plus victimes du changement climatique en cours que les hommes et viennent donc d’initier des actions ciblées sur l’amélioration de leur cadre de vie avec notamment des programmes sur le suivi de leur santé et la lutte contre les violences à leur égard.
Des financements pour l’adaptation
La COP30 n’a permis que de réitérer les engagements ultérieurs sans avancer sur les conditions d’aides aux pays les plus pauvres qui émettent moins de 1% des gaz à effet de serre mais — du fait de leur position dans la bande tropicale – sont les plus impactés par le changement climatique. L’aide à l’adaptation doit tripler d’ici 2030 pour atteindre 300 milliards de dollars par an avec un objectif plus lointain de 1300 milliards d’argents public et privé. Si ces sommes paraissent à la hauteur des enjeux au sein des pays en voie de développement, les modes de mobilisation de ces sommes ne sont toujours pas réellement définis.
Mais les COP continuent
Malgré les vents contraires, l’écrasante majorité des Etats veulent rester dans la lutte contre le changement climatique. Il n’est donc pas question de stopper ces rendez-vous annuels. En 2026, la COP31 aura lieu en Turquie, pays dont le développement repose toujours sur le charbon, et en 2027 en Ethiopie, pour une COP africaine cruciale pour ce continent. Les 54 pays africains organisent en effet depuis 2024 des « semaines climat » qui servent à mettre en commun les solutions qui marchent au sein de la région la plus pauvre du globe.
Pour plus d’informations et d’analyses sur la Niger, suivez Africa-Press





