Africa-Press – Niger. Une équipe internationale de quelque 160 scientifiques s’est penchée sur l’état de santé de la planète en scrutant des « points de basculement » potentiels qui pousseraient ses écosystèmes au bord du gouffre. Si ces points sont franchis, un effet domino de catastrophes en cascade, souvent irréversibles, peut se déclencher. « Malheureusement, nous sommes désormais quasi certains que nous avons franchi un de ces points de basculement pour les récifs coralliens tropicaux d’eaux chaudes », dit à l’AFP l’auteur principal, Tim Lenton, chercheur en sciences de l’environnement de l’université d’Exeter (Royaume-Uni).
À 1,4°C de réchauffement par rapport à l’ère pré-industrielle, ces récifs « subissent un dépérissement sans précédent, affectant la subsistance de centaines de millions de personnes qui en dépendent », ainsi que la survie d’un million d’espèces marines, concluent les scientifiques dans l’étude. Depuis la dernière édition de leurs travaux en 2023, ils ont observé une mortalité des coraux « sans précédent ». Les récifs connaissent actuellement un épisode massif de blanchissement, signe de dépérissement, en cours depuis deux ans.
« Zone de danger »
Les coraux – barrières contre l’érosion et réservoirs de biodiversité, qui stockent également le carbone – blanchissent sous l’effet de la chaleur, ce qui les rend particulièrement vulnérables au réchauffement climatique. Dans des océans plus chauds, ils expulsent les micro-organismes qui leur donnent leurs couleurs vives et leur fournissent leur nourriture, finissant par mourir de faim.
Les coraux morts ne laisseront que des squelettes sans tissus vivants, qui seront recouverts progressivement par des algues et colonisés par des organismes plus simples, avant de s’éroder et se briser.
Les chercheurs estiment qu’avec à 1,5°C de réchauffement par rapport à l’ère pré-industrielle, la vaste majorité des coraux seront condamnés. Ce seuil sera franchi dans quelques années sauf réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre. Cette limite de réchauffement, la plus ambitieuse de l’Accord de Paris (2015) est « sur le point de s’effondrer », a récemment alerté le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres.
Et la dépasser placerait « le monde dans une zone de danger encore plus grand », affirme Tim Lenton. Le moment de la publication n’est pas choisi au hasard. Les négociateurs du monde entier se réunissent à Brasilia pour une pré-COP lundi et mardi, un mois avant l’ouverture de la grande conférence sur le climat à Belém.
« Cela exige des mesures immédiates et inédites des dirigeants à la COP30 et des responsables politiques dans le monde »
Depuis deux ans, les signes vitaux de la Terre se sont dégradés. D’autres seuils pourraient également être franchis prochainement avec la fonte irréversible des calottes glaciaires polaires, l’effondrement de courants océaniques cruciaux ou le dépérissement de la forêt amazonienne, où se tiendra la COP30.
« Nous nous approchons rapidement de points de basculement planétaires multiples qui pourraient transformer notre monde, avec des conséquences dévastatrices pour les humains et la nature », met en garde Tim Lenton. « Cela exige des mesures immédiates et inédites des dirigeants à la COP30 et des responsables politiques dans le monde », juge-t-il.
Mais les scientifiques soulignent aussi des avancées ces deux dernières années sur des points de basculement « positifs » susceptibles d’entraîner des effets favorables au climat en cascade. Certains secteurs ont déjà franchi ce seuil qui rend leur développement irréversible: énergies solaire et éolienne devenus bons marchés à travers le monde et adoption des véhicules électriques, batteries de stockage d’électricité ou pompes à chaleur sur certains marchés.
D’autres technologies qui n’ont pas encore atteint ce stade semblent prometteuses, comme l’hydrogène ou l’ammoniac verts.
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