Les tatouages augmentent-ils le risque de cancer ? La réponse d’une étude inédite menée sur des jumeaux

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Les tatouages augmentent-ils le risque de cancer ? La réponse d'une étude inédite menée sur des jumeaux
Les tatouages augmentent-ils le risque de cancer ? La réponse d'une étude inédite menée sur des jumeaux

Africa-Press – Benin. Esthétique vs sécurité ? Les tatouages se banalisent de plus en plus en France: selon une étude de marché réalisée en 2024 par Businesscoot, le nombre de personnes tatouées est passé de 10 à 20 % en une décennie. Un chiffre qui pourrait sûrement continuer sa progression, puisque les jeunes adultes ont une perception beaucoup plus positive des tatouages que le reste de la population (68 % en ont une bonne image, contre 43 % pour l’ensemble des Français).

Pourtant, les tatouages ne sont pas sans risque: ils peuvent causer des réactions indésirables (rougeurs, démangeaisons, cicatrices, cloques, douleurs, allergies), voire des infections. Au point que l’hôpital Bichat à Paris a ouvert il y a quelques années une consultation dédiée à la prise en charge de ces complications associées aux tatouages, gérée actuellement par le dermatologue Nicolas Kluger (qui travaille aussi à l’hôpital universitaire d’Helsinki en Finlande et est auteur du livre Mon tatouage et moi, éditions Vuibert).

Mais un risque plus inquiétant serait peut-être à craindre, selon une étude publiée le 15 janvier 2025 dans la revue BMC Public Health par des chercheurs de l’Université du Danemark du Sud. En analysant des couples de jumeaux, où seulement l’un d’eux est tatoué, les chercheurs ont trouvé que le jumeau tatoué avait un plus grand risque de développer un cancer. Des résultats inquiétants, mais contestés par Nicolas Kluger.

Les jumeaux tatoués auraient un plus grand risque de cancer de la peau

Les chercheurs ont fait le choix d’étudier des jumeaux pour ne prendre en compte que les facteurs environnementaux et d’exclure toute influence des facteurs génétiques sur le risque de cancer. Les jumeaux, nés entre 1960 et 1996, ont été identifiés grâce à une base de données danoise qui les regroupe. Les fratries où l’un des membres a eu un cancer, mais pas l’autre (ou les autres) ont été interrogées avec un questionnaire. Un total de 2.367 fratries ont été contactées, mais seulement dans 673 d’entre elles les deux jumeaux ont été interrogés. Les cancers pris en compte étaient ceux touchant la peau ou le système lymphatique.

Un total de 119 cas de cancers de la peau ont été retrouvés, mais la majorité sont survenus avant le tatouage, et donc ne peuvent pas avoir été causés par celui-ci. Seulement 27 individus ont développé un de ces cancers après le tatouage, environ 14 ans après leur premier tatouage. Et seulement dans la moitié de ces fratries (14) les deux membres de la fratrie divergeaient sur le fait d’avoir un tatouage et sur le fait d’avoir un cancer. Selon les auteurs, le risque de développer un cancer était significativement plus élevé chez les personnes tatouées, et en prenant en compte uniquement ces 14 fratries, ce risque baissait, mais restait statistiquement significatif.

Les défauts méthodologiques invalideraient ces résultats

Mais ces résultats sont accueillis avec beaucoup de scepticisme par Nicolas Kluger: « Cette étude a des failles méthodologiques importantes. Par exemple, il n’y a aucune information sur l’exposition solaire des individus, qui est pourtant un facteur de risque essentiel pour le cancer de la peau. Si le jumeau tatoué est aussi plus exposé au soleil, il est possible que cela explique la différence de risque entre lui et son jumeau non tatoué. Aussi, on ne sait pas si les cancers de la peau de ces personnes sont sur la peau tatouée ou ailleurs dans le corps, où il ne pourrait pas avoir de lien avec l’encre du tatouage. »

Le constat qu’il avait fait en 2023 reste donc vrai aujourd’hui: « Pour le moment, on n’a aucune évidence solide montrant un quelconque lien de causalité entre tatouages et cancer ».

Aucune évidence d’un impact quelconque sur l’immunité

Les auteurs alertent aussi sur les effets à long terme que l’encre des tatouages pourrait avoir sur le système immunitaire. “Nous voyons que les particules d’encre s’accumulent dans les ganglions lymphatiques, et nous pensons que le corps pourrait les percevoir comme des substances étrangères au corps, explique dans un communiqué l’un des auteurs de l’étude, Henrik Frederiksen, professeur d’hématologie à l’Université du Danemark du Sud. Le système immunitaire pourrait donc être constamment en alerte en train d’essayer de réagir à l’encre, et on ne sait pas si ce stress continu pourrait affaiblir les ganglions lymphatiques ou avoir d’autres conséquences sur la santé.”

Cette migration de l’encre vers les ganglions est connue de longue date, sans qu’aucun signe alarmant ait été observé sur la fonction de ces ganglions colorés. “Ils se posent des questions sur les conséquences que cela pourrait avoir sur le système immunitaire, mais en réalité ils ne présentent aucune donnée qui montre un quelconque impact là-dessus, critique Nicolas Kluger. On n’a aucune preuve que les personnes tatouées aient une moindre immunité.”

Pour résumer, les tatouages ne sont pas sans risque, mais, au moins pour le moment, il n’y a pas d’évidence scientifique solide prouvant un quelconque risque de cancer ou de problème immunitaire.

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