Africa-Press – Burkina Faso. A l’orée de la campagne agricole humide 2025-2026 qui s’installe progressivement, les producteurs s’activent pour sa réussite. Sidwaya a accordé une interview au Président de l’Union nationale des sociétés coopératives des producteurs semenciers du Burkina (UNPSB), Inoussa Ouédraogo, jeudi 12 juin 2025, à Ouagadougou. Il est revenu sur l’apport de sa structure dans la production agricole et les prévisions de semences améliorées certifiées attendues à la présente campagne.
Sidwaya (S.): Quel est le rôle et la mission de l’Union nationale des sociétés coopératives des producteurs semenciers du Burkina (UNPSB) depuis sa création, en 2004?
Inoussa Ouédraogo (I.O.): La mission principale de l’UNPSB est la production et la commercialisation des semences améliorées certifiées pour contribuer efficacement à l’accroissement de la productivité agricole. L’Union prend les semences de base qu’ils reproduisent et mettent à la disposition des producteurs. Il s’agit également de travailler à professionnaliser le secteur et permettre aux producteurs qui ont choisi de produire la semence, de se professionnaliser et de vivre de leur activité. Nos missions phares sont d’accompagner les autorités pour mettre à la disposition des producteurs des semences de qualité en vue de contribuer efficacement à l’atteinte de la souveraineté alimentaire.
S: Qu’est-ce qu’une semence améliorée certifiée?
I.O.: La semence améliorée certifiée est une semence qui a subi un processus depuis la création de la graine jusqu’à sa multiplication. C’est une graine qui est potentiellement apte à produire identiquement des graines meilleures. Elle est améliorée d’autant plus qu’elle prend en compte le facteur d’adaptation au changement climatique. Aujourd’hui, avec les effets du changement climatique, il fallait revoir le cycle de la graine en vue de l’adapter à la pluviométrie. Par un croisement, les sélectionneurs prennent des caractères d’autres plantes pour arriver à créer une souche intermédiaire de métisse qui permettra de développer le potentiel en termes de résistance, de production et également de cycles. La semence est certifiée d’autant plus qu’elle répond à une norme législative légale et à une loi qui encadre toute la production de la semence. Elle est attestée par un document juridique qui prouve cette qualité.
S: Combien de variétés existent actuellement?
I.O.: On a plusieurs variétés. Elles sont classées par spéculation à savoir les céréales (le maïs, le sorgho, le riz et le blé), les légumineuses (le soja, le niébé), les oléagineux (le sésame, l’arachide) et les semences de la culture maraîchère (le gombo). Les cycles varient de 60 à 110 jours. Les études ont démontré qu’une bonne semence contribue au moins à 40 % à la production et la productivité agricole. Ce qui veut dire que si vous partez au champ avec une mauvaise semence, vous partez déjà avec un déficit de 35 à 40 %.
S: Qu’est-ce qui est fait pour encourager les producteurs à adopter les semences?
I.O.: Nous sommes partis tout petit avec moins de 240
producteurs sur l’ensemble du territoire à la création, aujourd’hui, nous avons atteint 4 000 producteurs répartis sur toute l’étendue du territoire. On fournit non seulement les semences à l’Etat (notre premier partenaire), aux projets et programmes et aux producteurs individuels. Aussi, nous avons développé un système de communication, de marketing auprès des producteurs aussi bien les individuels que ceux qui sont organisés pour pouvoir mettre à leur disposition les semences. Les producteurs s’y intéressent vraiment. Quand vous faites un tour au niveau des points de vente du ministère de l’Agriculture, des Ressources animales et halieutiques, les producteurs se bousculent pour acquérir les semences. Le kilogramme (kg) du maïs coûte 600 F CFA, le sorgho et le mil, 1 000 FCFA le kg et 1 500 FCFA pour le niébé. Le prix des arachides et du soja varie entre 1 400 FCFA et 1 500 FCFA.
S: La semence est réutilisable pendant combien de temps?
I.O.: La semence améliorée ne peut être utilisée pour toujours parce que les rendements diminuent au fil du temps, y compris les potentialités et les caractères qui se développent. On utilise la semence au maximum 3 ans (pendant trois campagnes agricoles). Sinon, l’idéal serait que 2 ans après, on achète une nouvelle semence.
S: Quelles sont les prévisions de l’UNPSB pour la campagne agricole 2025-2026?
I.O.: Nos prévisions sont autour de 25 000 tonnes de semences améliorées certifiées. Tout est mis en œuvre pour que les producteurs entrent en possession des semences. Déjà à la foire aux semences de variétés améliorées de plantes, tenue du 30 mai au 2 juin dernier (Ndlr2025), beaucoup se sont approvisionnés. Certains ont acheté dans les stations de recherche. Les variétés les plus sollicitées sont le maïs, le riz, le sorgho et le haricot.
S: Quel bilan faites-vous de vos actions?
I.O.: L’On est souvent mal placé pour faire le bilan de ses actions, mais je peux dire qu’il y a beaucoup de motifs de satisfaction. Nous avons travaillé auprès des autorités pour l’amélioration de la loi en matière de recherches et l’adhésion du Burkina Faso à l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Nous avons aussi travaillé à améliorer la capacité de nos producteurs avec du matériel. Près de 200 tricycles ont été mis à leur disposition, des formations organisées à leur endroit. Nous organisons également des voyages d’études. Nos actions ont permis au Burkina de se hisser parmi les meilleurs de la sous-région en termes de qualité et de respect de la règlementation en matière de semence améliorée. Des pays tels que le Libéria, la Guinée, la Centrafrique et des pays de l’Afrique de l’Est s’approvisionnent au Burkina. La production des semences améliorées est une industrie vraiment prometteuse. Si on a tous les accompagnements qu’il faut, je pense qu’on pourra être à mesure de répondre à 100% aux sollicitations.
S: Quelles sont vos difficultés?
I.O.: Nos difficultés actuelles sont surtout liées à l’insécurité parce que nous avons perdu beaucoup d’espaces de production dans les régions du Sahel, du Nord et du Centre-Nord où on produisait plus le niébé. On pourrait estimer cet espace à environ 15%.
En plus de l’insécurité, il y a le problème de disponibilité des semences de base. Actuellement, nous n’arrivons pas à avoir toutes les semences de base auprès de la recherche surtout le niébé, le riz et le maïs. Mais des mesures sont en train d’être prises pour que les années à venir, les producteurs semenciers puissent les avoir en quantité.
S: La campagne agricole s’installe, en tant que président de l’Union, quel appel avez-vous à lancer à l’endroit des producteurs?
I.O.: Tout d’abord, je remercie le chef de l’Etat pour sa vision du développement du monde agricole à travers l’Offensive agrosylvopastorale. Ça bouge beaucoup dans le secteur avec l’aménagement des plaines, l’acquisition du matériel agricole et d’intrants. Nous souhaitons donc une très bonne pluviométrie, un bon rendement agricole et que la paix revienne au pays. Les producteurs doivent se comporter comme des VDP de l’agriculture pour que chacun de son côté mène le combat et ensemble nous puissions atteindre notre souveraineté réelle.
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