
Africa-Press – Burundi. Au terme de son mandat de chef de la délégation de l’Union européenne au Burundi, le diplomate estime que certaines des interventions de l’UE dans des domaines comme la santé ou les infrastructures s’apparentent à de l’aide directe sectorielle.
Depuis deux ans, vous avez initié un dialogue politique entre Gitega et l’Union européenne. Etes-vous satisfait du chemin parcouru ?
Il est important de saluer tous ceux, Burundais et Européens, qui ont soutenu les efforts d’ouverture qui ont permis de relancer le dialogue politique et ensuite la levée des mesures appropriées et les sanctions individuelles, la déstigmatisation du Burundi sur la scène internationale et la normalisation des relations UE-Burundi.
L’UE est l’amie du Burundi et continuera à appuyer les efforts de développement qui permettront aux Burundaises et Burundais d’éduquer leurs enfants dans de meilleures conditions de trouver des soins de santé à proximité, une justice solide et d’avoir un accès plus facile à l’eau et à l’électricité.
Donc, oui je suis satisfait du chemin parcouru et beaucoup reste à faire ensemble pour le développement.
Un an et six mois après la levée des sanctions à l’encontre de Gitega, qu’est-ce qui pourrait amorcer le processus de reprise de l’aide directe de la part de l’UE ?
Cette modalité de la coopération avec le Burundi est désormais légalement possible pour les institutions européennes, les pays membres de l’UE ou d’autres comme par exemple la Suisse ou la Banque Européenne d’Investissement. C’est un motif de satisfaction. Une feuille de route concertée avec les autorités burundaises est en cours de mise en œuvre. Quand les paramètres de transparence, de traçabilité de la dépense, d’équilibres macro-économiques seront réunis, cette modalité pourrait à nouveau être utilisée.
Le rythme des réformes est déterminé par les autorités burundaises. Un accord a été trouvé avec le FMI avec des réformes qui vont dans le même sens et qui commencent à être mises en œuvre (budget programme, convergence des taux de change).
Par ailleurs, ne nous leurrons pas sur les termes : certaines des interventions de l’UE dans des domaines comme la santé ou les infrastructures ressemblent beaucoup à de l’aide directe sectorielle.
A la veille du scrutin de 2025, le principal parti de l’opposition, le Cnl, est interdit d’activités. Quel regard porte l’UE sur cette situation ?
Comme indiqué à de nombreuses reprises, au Burundi ou ailleurs, l’UE est convaincue qu’une opposition, notamment capable de jouer son rôle dans les limites de la loi, accroît les chances d’élections libres, justes et transparentes.
Y a-t-il des inquiétudes à avoir de la part de l’UE avec le rapprochement qui s’observe entre Gitega et Moscou ?
Autant je pouvais comprendre une certaine proximité avec la Russie au moment où le Burundi était au ban de la communauté internationale. Autant la situation du Burundi s’étant considérablement améliorée à l’initiative de son Excellence, Monsieur le Président de la République, le rapprochement actuel me surprend.
Après 4 ans au Burundi, et je suis un ambassadeur qui s’est beaucoup déplacé sur le terrain, je n’ai guère vu trace de réalisations, de financement de projets russes au bénéfice des populations. La Russie est certes un grand pays mais son économie est de la taille des Seychelles et les sanctions prises à son endroit par nombre d’acteurs ne risquent pas d’améliorer les choses. Le premier partenaire commercial et de coopération du Burundi reste de loin l’Union européenne.
Enfin, la Russie, en envahissant son voisin ukrainien (dont elle s’était pourtant engagée à garantir la sécurité contre sa dénucléarisation) mène une guerre révoltante, une sale guerre. Elle y bombarde des populations civiles (crèches, hôpitaux, théâtres, infrastructures), a transformé ses exportations d’énergie et de céréales en armes de chantage et a fait enlever des enfants ukrainiens de force tandis que le régime russe se durcit à l’interne. Au contraire d’autres chefs d’Etat, M. Poutine n’a pas pu se rendre au sommet des BRICS en Afrique du Sud car il est sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale.
Le Burundi est bien entendu un pays souverain qui décide de manière autonome de sa politique internationale. Juste deux questions :Après le sommet de Saint Pétersbourg, où est « l’équidistance » à laquelle la position officielle du Burundi se référait ?Au-delà de quelques bourses, qu’apporte la Russie au Burundi en termes de développement sauf de vagues promesses ?
Propos recueillis par Alphonse Yikeze
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