Africa-Press – Cameroun. Cela fait plus d’un mois que la présidentielle a été organisée. C’était le 12 octobre 2025. Depuis, rien n’est dévoilé par rapport au remaniement tant attendu, comme le retour prochain de Jésus pour les fidèles chrétiens. Ce silence interroge, selon Jean Ediegnie qui en donne les motifs.
Après une élection présidentielle, le Cameroun a toujours connu une séquence quasi mécanique: investiture, attentes, remaniement. Or, cette fois-ci, presque un mois après, rien ne vient. Le gouvernement issu de 2018 est toujours en place. Aucun signal clair. Aucune annonce forte. Pourquoi ce silence inhabituel? Pourquoi cette immobilité politique? Les clés de lecture pour comprendre ce blocage.
Les négociations diplomatiques en cours bloquent tout. La médiation annoncée par la Gambie, sous l’œil du Nigeria et de plusieurs États sous-régionaux, n’est pas un détail. Tant que cette séquence diplomatique n’est pas totalement refermée, toute décision politique lourde (comme un remaniement) peut être perçue comme un signal de fermeture. En clair, on ne remanie pas pendant qu’on négocie.
Le flou stratégique autour d’un éventuel gouvernement d’union nationale. Depuis l’après-élection, un mot circule discrètement: gouvernement d’ouverture, gouvernement d’union nationale. Mais le problème est simple: qui y entre? Sur quelle base électorale? Avec quelle légitimité réelle? Donner des portefeuilles à des partis ayant obtenu 1 %, 2 % ou 3 % poserait un problème de cohérence politique majeur. Ce serait récompenser l’échec, brouiller la lecture démocratique, créer une inflation artificielle des ambitions. Résultat: on hésite. Et donc on bloque.
Le pouvoir applique aussi une vieille règle: on ne change pas une équipe qui « gagne ». Que cela plaise ou non, le pouvoir considère la séquence électorale de 2025 comme une victoire politique complète. Dans cette logique interne, pourquoi remanier une équipe qui a piloté une victoire? Pourquoi sanctionner un dispositif considéré comme “efficace”? C’est brutal, mais c’est la logique du pouvoir: la stabilité avant tout.
Le précédent gouvernement est déjà un record historique. Fait rarement rappelé: le gouvernement issu de 2018 est le plus long gouvernement sans remaniement depuis l’indépendance. 2018 jusqu’à 2025. Sept ans sans remaniement, malgré des décès, malgré des démissions, malgré des scandales, malgré des ministres candidats à la présidentielle. On a simplement nommé des intérimaires, des ministres “en cumul”, des remplaçants techniques. Ce précédent montre clairement qu’au sommet de l’État, le remaniement n’est plus une urgence naturelle.
Le vrai pouvoir est en train de se déplacer vers les législatives de 2026. La vraie bataille politique, désormais, ce ne sont plus les ministres. Ce sont les régions, les députés, les maires, les conseils municipaux. Le centre de gravité se déplace. Tant que les équilibres électoraux de 2026 ne sont pas clarifiés, le pouvoir peut juger inutile de redistribuer les cartes gouvernementales maintenant.





