Un SOUDAN sur le point d’être entièrement écrasé « sous-dents » !

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Un SOUDAN sur le point d’être entièrement écrasé « sous-dents » !
Un SOUDAN sur le point d’être entièrement écrasé « sous-dents » !

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – CentrAfricaine. Les conflits et crises politiques et sécuritaires successifs au Soudan ont soulevé plusieurs questions sur les raisons profondes qui font du pays une arène pour de telles interactions, ayant mené à une douloureuse « division » du pays en Soudan et Soudan du sud.

Aujourd’hui, c’est tout autre ! Après les affrontements entre l’armée et les Forces de soutien rapide, la situation au Soudan même s’est aggravée, en raison du différend entre le chef du Conseil militaire, Abdel Fattah al-Burhan, et son adjoint, le chef des Forces de soutien rapide, Muhammad Hamdan Dagalo, dit « Hemedti ».

Quelles sont les raisons de cette crise ? Comment ces crises ont-elles alimenté la position de ce vaste pays qu’était le Soudan auparavant et les aspirations des zones de voisinage ainsi que des puissances internationales à son égard ?

Le Soudan…un point stratégique

Il est utile de savoir que le Soudan est situé aux frontières de 7 pays africains, en plus d’avoir un littoral s’étendant sur la mer Rouge, d’une longueur d’environ 720 km. La mer Rouge est une artère vitale pour le commerce mondial passant par le canal de Suez, en particulier le pétrole et le gaz.

Il est le troisième plus grand pays d’Afrique et sa situation stratégique fait de l’instabilité du pays une source de grande préoccupation internationale. L’explosion d’un conflit armé comme celui que connaît aujourd’hui le Soudan est susceptible de menacer la stabilité de régions entières environnantes, car une ligne de turbulences pourrait s’enflammer, s’étendant du Soudan à l’ouest du continent africain jusqu’aux confins de l’océan Atlantique, en passant par le Tchad, le Niger et le Mali.

De plus, le Soudan se trouve déjà dans une région hautement militarisée. Le Sud-Soudan souffre de tensions sécuritaires, l’Éthiopie vit toujours dans un état de prudence après sa sortie de la récente guerre dans la région du « Tigré », la Libye vit aussi sa propre crise sécuritaire, dont les connexions sont complexes, et le Tchad reste méfiant de toutes les données de la situation sécuritaire dans son voisinage.

Ensemble, ces raisons alimentent l’instabilité politique et sécuritaire du Soudan, en faisant de lui un pays au bord d’une escalade continue des conflits, dans une réalité inflammable et combustible au maximum, compte tenu de l’emplacement et de la richesse que possède le Soudan, en plus d’une histoire pleine de conflits internes et ses connexions externes, en particulier celles frontalières.

Au Soudan, une population à bout de souffle dans la tourmente de la guerre civile, et la guérilla qui a éclaté entre l’armée et les paramilitaires, le samedi 15 avril 2023, n’a fait qu’aggraver sensiblement une situation humanitaire déjà catastrophique dans ce grand pays.

Déjà, au quatrième jour du combat entre militaires et paramilitaires, un bilan provisoire a recensé 248 morts tandis que les produits de première nécessité ont commencé à manquer sur les marchés.

Pour faire face à cette désolante et grave situation, certains ont choisis de partir, et la solidarité s’était mise en place.

La crise écrasante au Soudan d’un point de vue américain

Washington estime que les développements au Soudan au cours des derniers jours ne sont pas bons pour la stabilité de la nation ou ses perspectives de transition vers un régime démocratique, c’est ce qu’a confirmé Christopher Tunsil, Directeur du programme d’études africaines à l’Université de Washington, qui estime que « Les deux hommes (Al-Burhan et Hemedti) sont des obstacles à toute chance de transition du Soudan vers la démocratie civile, et la possibilité d’élections libres et équitables au Soudan semble lointaine », et qu’il ne semble pas y avoir de chemin facile vers une solution à court terme. Ce qui rend les choses plus difficiles, c’est la présence de deux hommes forts, commandant tous deux une armée à leur disposition, et se battant pour le pouvoir alors qu’ils ne sont pas prêts à y renoncer.

Par conséquent, les enjeux de la tourmente actuelle pourraient aller au-delà de l’avenir immédiat d’Al-Burhan, Hemedti et même de la nation soudanaise, et la stabilité de la région pourrait également être menacée.

Malgré l’accord des parties belligérantes au Soudan sur un cessez-le-feu en réponse à l’appel du secrétaire d’État américain Anthony Blinken, en coordination avec l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, les combats se sont poursuivis et un convoi diplomatique américain a essuyé des tirs dans l’escalade de la violence, tandis que les États-Unis et l’Occident s’inquiètent de la poursuite des combats alors qu’ils ont peu de cartes de pression.

Comment les Etats-Unis voient-elles la crise et ses répercussions sur la région et ses intérêts en son sein et ont-il d’autres moyens de changer la situation à l’avenir ?

La raison de l’inquiétude, comme l’attendent les analystes de Washington et d’autres capitales occidentales, est la difficulté de parvenir à une trêve fiable tant que l’une des deux parties ne contrôle pas fermement les principales institutions civiles et militaires de l’État à Khartoum.

Cela signifie qu’un conflit armé actif peut durer longtemps, d’autant plus que chaque camp se croit le plus fort. L’armée a une puissance aérienne et une expérience du combat dans les zones urbaines, et elle peut être en meilleure position que les Forces de soutien rapide.

Sa première réponse à l’accord de cessez-le-feu était que les Forces de soutien rapide voulaient un cessez-le-feu pour dissimuler la défaite écrasante à laquelle elles étaient confrontées et pour tenter d’obtenir l’aide militaire des pays voisins.

Mais les Forces de soutien rapide sont plus qu’une simple milice, car elles ont de longues racines au Soudan, et sont lourdement armées avec environ 100.000 membres et n’ont pu se développer depuis qu’elles ont émergé des « Janjaweeds », des milices qui cherchaient à contrôler violemment la région du Darfour pendant la guerre qui a duré des années, qui a commencé en 2003, et c’est pourquoi elles semblent toujours méfiantes à l’égard des Forces armées soudanaises, qu’elles accusent de violer l’accord de cessez-le-feu, et qu’il est important d’annoncer à la communauté internationale que « les putschistes n’ont aucun avenir », comme elles le disent.

Nouveau cessez-le-feu

Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a déclaré, ce lundi 24 avril 2023, que l’armée soudanaise et les forces paramilitaires de soutien rapide viennent de conclure un cessez-le-feu de 72 heures, à compter de minuit (du lundi au mardi).

« Pendant cette période, les États-Unis exhortent les deux parties à respecter immédiatement et pleinement le cessez-le-feu », a déclaré Blinken dans un communiqué rendu public en cette occasion.

Le Chef de la diplomate américain a déclaré que les États-Unis se coordonneraient avec les partenaires régionaux et internationaux et les parties prenantes civiles soudanaises pour aider à créer un comité chargé de superviser la négociation, la conclusion et la mise en œuvre d’un cessez-le-feu permanent.

« Nous continuerons à travailler avec les parties soudanaises et nos partenaires vers l’objectif commun d’un retour à un gouvernement civil au Soudan », a renchéri Blinken.

Plus tôt dans la journée, il a été signalé que d’autres pays, dont Israël, tentaient d’accueillir les deux parties belligérantes pour des pourparlers de paix.

Les répercussions au Soudan atteignent rapidement la Libye

Les liens du conflit au Soudan à l’étranger sont presque les mêmes que les liens du précédent conflit en Libye à l’étranger, en ce sens que les parties extérieures soutenant le conflit actuel au Soudan soutenaient le conflit libyen dans le passé.

Selon les experts en la matière, la Russie est la plus importante de ces parties qui ne voient pas que la stabilité du Soudan sert ses intérêts, comme c’est sa vision en Libye. Ils ajoutent que : « Moscou ne permettra pas la défaite de Hemedti, qui est un incubateur pour Wagner en Afrique centrale et au Soudan, car sa défaite signifie pratiquement la défaite de la Russie. À tout le moins, cela ne permettra pas à ce que sa défaite transfère complètement la situation en un état de négociation politique, dans laquelle Hemedti est un acteur clé ».

Les mêmes experts ont déclaré aussi : « Même si Moscou alimente le conflit actuel au Soudan, elle ne cédera pas l’arène libyenne. Par exemple, le maréchal Haftar, qui est associé aux Russes, et Hemedti, doivent clarifier leurs positions face à l’Occident, qui s’oppose à Moscou, et craignent son incursion dans les profondeurs de l’Afrique ». Il indique la possibilité que les répercussions soudanaises atteignent rapidement la Libye, en incitant Washington et les capitales occidentales à pousser les parties libyennes vers la formation rapide d’une force conjointe.

Selon eux, « l’intention claire de l’objectif de former cette force libyenne conjointe et sa direction vers le sud pour Washington et ses alliés européens est de faire pression sur Wagner et de cibler les intérêts russes, et maintenant la situation au Soudan peut accélérer cette procédure et forcer les parties libyennes à entrer dans un conflit armé avec Wagner, et peut-être les Janjaweeds et d’autres ». Alors le résultat ne peut pas être prédit. Ils estiment qu’il est trop tôt pour parler de la forme des répercussions de la situation au Soudan sur la situation en Libye, notant que « le silence de Haftar, la mission de l’ONU qui a été récemment active dans le dossier du mercenariat, et la plupart des dirigeants libyens et régionaux, reflète l’état d’anticipation avant de construire des positions ».

Le Tchad sur ses gardes d’être affecté par les répercussions au Soudan

On peut dire que de tous les pays frontaliers du Soudan, le Tchad est certainement le plus averti du potentiel de déstabilisation de son voisin, et vice-versa, surtout que la rivalité entre les deux généraux (Al-Burhane et Hemedti) qui revendiquent le pouvoir au Soudan a éclaté en combats meurtriers, le Tchad craint quant à lui que le conflit déborde sur son territoire.

Pour une médiation tchadienne : Avec le souci d’afficher une neutralité de façade, Mahamat Idriss Deby avait ainsi reçu le général Al-Burhan le 29 janvier de cette année, avant d’accorder une audience le lendemain à « Hemedti », où le chef de l’Etat tchadien avait appelé les deux belligérants au calme depuis l’Arabie saoudite, alors qu’il effectuait le pèlerinage de La Mecque.

La principale crainte formulée à N’Djamena est celle d’un repli de « Hemedti » sur ses fiefs du Darfour s’il venait à perdre la bataille de Khartoum, car « Il a les Wagner avec lui. Ils peuvent créer un foyer de déstabilisation avec le soutien de la République centrafricaine », a alerté un conseiller à la présidence.

D’ailleurs, selon le pouvoir tchadien, la présence des paramilitaires russes au Soudan, mais aussi en Libye et en Centrafrique, soit trois de ses six voisins, est un motif d’inquiétude régulièrement répété.

Des milliers de Soudanais se réfugient au Tchad

A la suite des affrontements au Soudan, des milliers de réfugiés soudanais sont arrivés depuis à la mi-avril 2023 au Tchad voisin, selon un communiqué diffusé par l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, qui ont fait état d’une « estimation de 10.000 à 20.000 nouveaux réfugiés, qui sont arrivés à l’est du Tchad au cours de des deux derniers semaines », information confirmée par un tweet publié par Laura Lo Castro, Représentante du Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) au Tchad.

Une mission conjointe du HCR, du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et du Programme alimentaire mondial (PAM) a pu « observer l’afflux de nouveaux réfugiés soudanais » fuyant les combats au Soudan dans les trois premiers sites que Mme Castro a visités.

Dans ce même communiqué, le HCR s’est dit profondément préoccupé par la sécurité des civils dans les zones touchées par les combats, et notamment par celle des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur du pays.

« Cette escalade de la violence ne pourra qu’entraver la réponse humanitaire apportée aux personnes dans le besoin à travers le pays et compromettre la stabilité et la recherche de solutions en faveur des millions de personnes déracinées dans la région », a fait valoir l’agence onusienne, relevant qu’une désescalade est donc indispensable de toute urgence.

On sait déjà que le Tchad abrite plus de 600.000 réfugiés, dont près de 400.000 originaires du Soudan, et sur ces 600.000 réfugiés, quelques 145.000 (environ 24%) sont arrivés au Tchad depuis 2018, et de nouveaux groupes continuent d’arriver chaque année, principalement du Soudan, mais aussi de la République centrafricaine et du Nigéria.

Crainte de la Centrafrique

Tout le monde sait déjà que les frontières terrestres entre le Soudan et la République de Centrafrique ont été fermées, depuis le mois de janvier de l’année en cours.

En effet, c’est « en commun accord avec les autorités soudanaises » que la frontière terrestre entre le Soudan et la Centrafrique a été fermée, selon le général de Corps d’armée Zephirin Mamadou, chef d’Etat-major des armées centrafricaines.

Les autorités centrafricaines n’ont pas donné plus de détails sur cette décision, toutefois, une information ayant circulée dans les médias indiquait que le Soudan « avait fermé sa frontière avec la République centrafricaine (RCA) pour empêcher toute ingérence dans ses affaires intérieures » par des groupes armés.

Comment les affrontements au Soudan affectent-il d’autres pays dans le monde ?

Si nous voulons savoir pourquoi le Soudan est important pour de nombreux autres pays, nous n’avons qu’à regarder la carte.

Il y a une raison pour laquelle les combats qui ont éclaté au Soudan la semaine dernière ont déclenché la sonnette d’alarme dans de nombreux pays. Non seulement le Soudan est le troisième plus grand pays africain, mais il chevauche également une région géopolitiquement vitale et instable.

Quoi qu’il se passe dans la capitale, Khartoum, militairement ou politiquement, cela résonne dans un certain nombre des régions les plus fragiles d’Afrique.

Rappelons-nous que le Soudan comprend le Nil, ce qui rend le sort du Soudan d’une importance existentielle pour le pays en aval qui souffre d’un manque d’eau, à savoir l’Égypte, et il en va de même pour le pays enclavé en amont, l’Éthiopie, avec son ambition d’exploiter les eaux du Nil d’une manière qui affecte déjà actuellement le débit de la rivière.

Notons encore une fois que le Soudan a des frontières avec sept pays, qui sont tous confrontés à des problèmes de sécurité liés à la vie politique à Khartoum.

Où en est-on avec la solution politique au Soudan ?

Le règlement politique entre civils et militaires au Soudan a stagné au cours des derniers mois, suscitant des inquiétudes quant à son avenir.

L’une des raisons de l’impasse est un seul point de désaccord entre l’armée et les Forces de soutien rapide, lié à la manière de former un organe de commandement conjoint, et qui le dirige, dans les premières étapes de l’intégration des Forces de soutien rapide au sein de l’armée, comme prévu dans l’accord-cadre signé entre militaires et civils en décembre 2022.

Ce texte a été saisi par l’armée comme une opportunité pour contenir les Forces d’appui rapide, et stipulait que des calendriers clairs lui seraient fixés et mis en œuvre, afin de poursuivre le règlement politique, ce qui a retardé à deux reprises la signature de l’accord final.

Les analystes soudanais pensent que la poursuite des combats pourrait conduire à davantage de troubles et exacerber la crise politique dans le pays. Il sera alors difficile pour les diplomates qui ont joué un rôle crucial en exhortant au retour à un régime civil de trouver un moyen de persuader les deux parties au conflit de s’engager dans des pourparlers de désescalade.

Cela est intervenu de facto après l’isolement international subi par le coup d’État du commandant de l’armée, Abdel Fattah al-Burhan, et les décisions d’arrêter le soutien dans le domaine des réformes économiques par les institutions internationales.

Qui sont les Forces de soutien rapide ?

Ce sont des forces formées en 2013, et leurs origines remontent aux milices (Janjaweed), qui sont des groupes armés fidèles à l’ancien président « Al-Bashir », qui ont provoqué une grande panique et commis des massacres au Darfour en 2003.

Devenues légitimes, ces milices furent transformées en « Forces de soutien rapide » selon une loi approuvée par l’Assemblée nationale en 2017, et son chef, Muhammad Hamdan Dagalo dit « Hemedti », avait obtenu un grade militaire et avait une liberté totale pour contrôler les mines d’or au Darfour.

On estime que ces forces comptent environ 100.000 hommes armés répartis dans tout le pays et qu’elles possèdent un grand nombre d’armes légères telles que des fusils, des mitrailleuses, des armes antichars, des missiles guidés, des explosifs à main et des armes lourdes telles que des canons, des chars, des milliers de véhicules à quatre roues motrices et autres.

Quant à Muhammad Hamdan Dagalo, un ancien marchand de chameaux avec une simple éducation de base et considéré comme le deuxième homme du Soudan et l’une des personnes les plus riches du pays, a joué un rôle de premier plan dans la politique turbulente du Soudan au fil des ans et a aidé à renverser le président Al-Bashir en 2019, avec qui il entretenait des relations étroites. Un jour, il a pris en charge un certain nombre de dossiers les plus importants au Soudan après la chute d’Al-Bashir, notamment l’effondrement de l’économie et les négociations de paix avec plusieurs groupes rebelles.

Sur le plan extérieur, Hemedti entretient de solides relations internationales avec plusieurs pays étrangers tels que la Russie et l’Éthiopie, et d’autres pays arabes, dont l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, surtout après avoir envoyé ses forces combattre au Yémen, ainsi qu’en Libye.

Où va donc le Soudan, et comment va être résolu ce problème ?

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