Africa-Press – CentrAfricaine. Une analyse des témoignages contradictoires et des indices qui orientent l’enquête vers les mercenaires russes.
L’assassinat de Dieudonné Nzagbe Nguilelo, sous-préfet de Djema, continue de faire des vagues. Si Michel Trogode, chef du centre de santé de Djema, a accusé publiquement le maire et le député de la ville, son témoignage présente des failles qui remettent en question sa version des faits.
Dans sa déclaration vidéo diffusée une semaine avant son enlèvement, Michel Trogode a affirmé que le maire de Djema avait contacté le député Lambert Akovourou après un différend avec le sous-préfet. Selon lui, ce dernier aurait mobilisé des hommes armés depuis Obo pour venir capturer Dieudonné Nzagbe Nguilelo.
Le chef du centre de santé raconte que ces hommes auraient emmené le sous-préfet dans les locaux de l’ONG Alima, où ils l’auraient maltraité en présence du maire. Face à la violence de la scène, cette dernière aurait fait un malaise, nécessitant l’intervention de Trogode pour la transporter.
L’analyse du témoignage révèle plusieurs impossibilités logistiques. Selon Michel Trogode, des hommes armés auraient quitté Obo pour capturer le sous-préfet à Djema en quelques heures. Or, la distance entre Obo et Mboki est de 75 kilomètres. Entre Mboki et Zemio, il faut parcourir 135 kilomètres supplémentaires. Enfin, de Zemio à Djema, la distance est de 125 kilomètres. Au total, cela représente 335 kilomètres sur des routes particulièrement dégradées.
Ces routes traversent plusieurs zones de contrôle. À Mboki se trouvent des mercenaires russes et des forces de défense et de sécurité. Zemio abrite également une importante présence Wagner avec des points de contrôle permanents. Comment des miliciens auraient-ils pu franchir ces barrières multiples sans être aperçus, en pleine nuit, avec seulement quatre motos?
De plus, les miliciens Azandé ne se déplacent jamais en petit groupe de quatre motos, comme l’ont décrit les témoins. Ils évoluent habituellement en convois importants pour leur sécurité. Cette tactique correspond davantage aux méthodes des mercenaires russes, aperçus en patrouille dans Djema la nuit même de l’enlèvement.
Plusieurs éléments orientent l’enquête vers les mercenaires russes du groupe Wagner. D’abord, la méthode d’exécution: Dieudonné Nzagbe Nguilelo a été égorgé et décapité, une signature récurrente de ces groupes. Ensuite, les antécédents: le sous-préfet avait déjà été capturé et torturé par des mercenaires russes le 27 mai 2024, avant de parvenir à s’échapper après deux jours dans la brousse.
L’absence de réaction des forces Wagner stationnées à Zemio, à seulement 125 kilomètres de Djema, face aux tirs et aux violences supposées dans les locaux d’une ONG internationale pose également question. Comment expliquer qu’aucune intervention n’ait eu lieu pendant plusieurs heures dans une zone sous leur contrôle direct?
L’arrestation successive de Michel Trogode et du député Lambert Akovourou après ces accusations publiques tend à confirmer une stratégie de détournement d’attention. Le chef du centre de santé a été embarqué par hélicoptère vers une destination inconnue, tandis que le député a été incarcéré à l’Office central pour la répression du banditisme à Bangui.
Ces arrestations interviennent dans un contexte où les mercenaires russes tentent de rediriger les soupçons vers les autorités de Djema, alors que tous les indices techniques et circonstanciels pointent vers leur implication directe dans cet assassinat.
L’analyse des faits explique que les mercenaires du groupe Wagner ont instrumenté l’enlèvement du sous-préfet en utilisant des intermédiaires, avant de procéder eux-mêmes à l’exécution selon leurs méthodes habituelles. La campagne de désinformation qui a suivi, avec l’arrestation des accusateurs, témoigne de cette stratégie de brouillage des pistes.
La disparition de Michel Trogode et l’emprisonnement du député Lambert Akovourou continuent de priver les habitants de Djema de réponses sur ce crime qui terrorise encore la ville….
Source: Corbeau News Centrafrique
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