Karl Blagué, Voix du G16, Appel à la Lutte Reste

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Karl Blagué, Voix du G16, Appel à la Lutte Reste
Karl Blagué, Voix du G16, Appel à la Lutte Reste

Africa-Press – CentrAfricaine.

En effet, le vendredi dernier, Karl Blagué parlait encore à la radio Ndèkè – Luka. Il débattait, argumentait, dénonçait comme il l’avait fait pendant des années. Puis soudain, à la fin de l’émission, le malaise. Quelques heures plus tard, à l’hôpital de Bangui, cette voix qui avait tant dérangé le pouvoir s’éteignait pour toujours.

Alain Nzilo, directeur de publication du CNC, a du mal à retenir son émotion en parlant de cet homme qui a tant lutter pour son pays. “Karl était un homme d’une droiture rare”, dit-il simplement. “Il s’est battu jusqu’au bout avec les seules armes de la parole et de la vérité“. Ces mots sonnent comme un testament dans un pays où tant d’autres ont choisi, soit rallier au pouvoir pour chercher à manger, soit les armes véritables.

Quelques heures avant sa mort, Karl Blagué avait lancé ce qui allait devenir son dernier message: “La lutte continue“. Il ne savait pas qu’il prononçait là ses derniers mots publics. Mais ces trois mots résument toute une vie de combat pour la dignité centrafricaine.

Pour Karl Blagué, l’histoire de son pays s’écrivait en deux chapitres douloureux. D’abord la colonisation française, dont la Centrafrique s’était libérée dans les années 1960. Puis cette nouvelle colonisation russe, voulu par le Président Touadera, qu’il jugeait encore plus criminel. “Nous sommes passés d’une tutelle à une autre”, répétait-il. “Mais cette fois, ils ne se cachent même plus“.

Cette analyse le révoltait. Lui qui avait grandi dans l’espoir d’une Centrafrique libre voyait son pays retomber sous une nouvelle colonisation d’un pays sous-développé. Les mercenaires russes dans les rues du pays, les conseillers de Moscou à la présidence et dans les ministères, les richesses nationales qui partaient vers la Russie: tout cela le rendait malade.

Mais jamais Karl Blagué n’a pris les armes. Dans un pays habitué aux coups de force, il avait choisi une autre voie. Celle de l’enseignement d’abord. À l’université, il formait ses étudiants du département de sociologie avec passion. Il leur apprenait que les mots pouvaient être plus forts que les balles, que la vérité finirait toujours par triompher du mensonge.

Puis il y a eu la radio. Presque chaque semaine, Karl Blagué intervenait sur les ondes de la radio Ndèkè – Luka. Il parlait politique, démocratie, souveraineté. Il dérangeait, questionnait, bousculait. Ses interventions attiraient des milliers d’auditeurs qui reconnaissaient en lui une voix libre dans un paysage médiatique souvent muselé.

C’est justement dans ce studio de la radio Ndèkè – Luka qu’il aimait tant que la mort l’a rattrapé. Comme si le destin avait voulu qu’il s’éteigne là où il avait le mieux vécu: en parlant à son peuple.

Sa disparition laisse un vide immense dans le mouvement G16, ce groupe de la société civile qu’il animait avec d’autres. Mais surtout, elle prive la Centrafrique d’une voix qui n’avait peur de rien ni de personne.

“Karl nous répétait souvent que la lutte n’est pas faite pour une seule génération”, se souvient Alain Nzilo. “Il disait que nous devions préparer le terrain pour ceux qui viennent après nous“. Cette vision à long terme caractérisait l’homme. Il savait que les changements profonds prennent du temps, que la démocratie se construit pierre par pierre.

Pour lui, chaque citoyen avait un rôle à jouer dans cette construction. Il n’y avait pas de petits combats, pas de voix insignifiantes. “Même face aux menaces, il faut continuer à parler”, disait-il à ses proches. “Le silence, c’est la victoire des oppresseurs.”

Cette philosophie, appris de son père également Professeur, il l’a appliquée jusqu’au bout. Malgré les intimidations, malgré les pressions, Karl Blagué n’a jamais baissé le ton. Sa franchise dérangeait, son courage inspirait. Dans un contexte où beaucoup préféraient rallier pour plaire au pouvoir, il continuait à élever la voix.

“Il a montré qu’on pouvait résister sans violence”, insiste Alain Nzilo. “Qu’on pouvait tenir debout grâce à la franchise et au courage.” Cette leçon résonne particulièrement dans une Centrafrique habituée aux règlements de compte armés.

Karl Blagué n’avait ni fortune ni armée privée. Son seul pouvoir venait de la force de ses convictions et de sa capacité à les transmettre. Dans un pays bouleversé par tant de violences, il incarnait une autre manière de faire de la politique: par l’exemple, par la parole, par la persévérance.

Sa mort pose une question douloureuse: qui reprendra le flambeau? Qui osera encore dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas? Le mouvement G16 survivra-t-il à la perte de l’une de ses figures les plus respectées?

Ces interrogations hantent aujourd’hui ses proches. Mais ils savent aussi que Karl Blagué avait préparé sa succession. “Il formait des jeunes, il transmettait ses convictions”, explique un de ses anciens étudiants de l’université de Bangui. “Il nous a appris que chacun peut prendre sa part du combat.”

“La lutte continue”. Ces trois mots prononcés par Karl Blaguet quelques jours avant sa mort résonnent aujourd’hui comme un testament. Un message d’espoir adressé à tous ceux qui croient encore en une Centrafrique libre et souveraine.

Karl Blagué n’est plus là pour porter ce combat. Mais son exemple demeure. Dans ses salles de classe, sur les ondes de la radio, dans les cœurs de ceux qu’il a inspirés, sa voix continue de résonner. Et tant qu’elle résonnera, son combat ne sera pas perdu.

Source: Corbeau News Centrafrique

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