Parjures et Conséquences des Présidents Centrafricains

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Parjures et Conséquences des Présidents Centrafricains
Parjures et Conséquences des Présidents Centrafricains

Africa-Press – CentrAfricaine.
Dans l’histoire des nations, le serment d’un dirigeant est bien plus qu’une formalité: il est un pacte sacré, un engagement solennel devant le peuple et souvent devant une autorité supérieure, divine ou morale, à servir avec justice et dévouement.

En République centrafricaine (RCA), ce rituel, censé incarner la confiance entre les gouvernants et les gouvernés, s’est trop souvent transformé en une promesse creuse, un parjure qui résonne comme une trahison. Elie Oueifio, dans son ouvrage Quand la politique des mains tendues du président Touadéra soulève des interrogations et réflexions, dévoile cette dérive avec une clarté prophétique: « La fidélité aux termes de leurs serments ainsi que le respect scrupuleux des conseils des juges assortis des discours par lesquels ils reçoivent lesdits serments sont les véritables gages des gouvernances réussies à la satisfaction des peuples et à la gloire de Dieu ». Pourtant, loin de cette idéal, les dirigeants centrafricains ont souvent succombé aux « chants des sirènes », laissant derrière eux un sillage de crises et de désillusions.

Le serment prêté par un président centrafricain devant la Cour constitutionnelle n’est pas une simple cérémonie protocolaire. Il s’inscrit dans une tradition qui puise ses racines dans les principes divins et républicains, comme le rappelle Elie Oueifio en citant Ésaïe 33:22: « L’Éternel est notre juge, l’Éternel est notre législateur, l’Éternel est notre roi ». Ce moment solennel engage le dirigeant à respecter la Constitution, à protéger l’intégrité du territoire, à garantir la paix et à défendre la dignité du peuple. C’est un contrat moral et politique, un fil d’Ariane censé guider l’action publique.

Pourtant, dès les premières décennies de l’indépendance, ce serment a été fragilisé par des pratiques qui en ont vidé la substance. Les coups d’État successifs, de Bokassa à Bozizé, ont souvent relégué la légitimité constitutionnelle au second plan, transformant le pouvoir en un trophée conquis rather than en une mission confiée. Elie Oueifio souligne que cette trahison ne commence pas toujours par un acte flagrant, mais par une écoute sélective: les dirigeants, sensibles aux flatteries des « manipulateurs et mafieux », s’éloignent des vérités qui dérangent. Le serment devient alors un outil de façade, une parole prononcée pour légitimer une prise de pouvoir, mais rarement honorée dans les faits.

L’analyse d’Elie Oueifio met en évidence des exemples concrets où le serment des dirigeants centrafricains a été trahi, avec des conséquences palpables. L’un des cas les plus emblématiques est celui du président Faustin Archange Touadéra, dont la politique des « mains tendues » promettait unité et réconciliation. Lors de sa prestation de serment le 30 mars 2021, la présidente de la Cour constitutionnelle, Danièle Darlan, l’avait pourtant mis en garde: « N’écoutez pas le chant des sirènes […] ceux qui tenteront pour servir leurs propres intérêts, de vous amener à oublier ce pourquoi le peuple vous a élu ». Ces paroles, que l’auteur qualifie de « prophétiques », ont été rapidement éclipsées par une réalité où les intérêts personnels et claniques ont pris le dessus.

Cette trahison se manifeste dans le choix des collaborateurs, un point central dans l’argumentaire d’Oueifio. Plutôt que de s’entourer d’« hommes capables, craignant Dieu, intègres, ennemis de la cupidité » (Exode 18:21-22), les dirigeants ont souvent privilégié des alliés fidèles mais incompétents ou corrompus. Sous Touadéra, les nominations basées sur la logique de « rupture » et de « c’est notre tour » ont marginalisé les compétences au profit d’un clientélisme ethnique ou partisan, sapant ainsi la promesse d’une gouvernance au service du peuple tout entier.

Un autre signe de ce parjure est le rejet des institutions censées garantir l’équilibre des pouvoirs. L’Inspection générale d’État, censée veiller à l’application des décisions présidentielles, est réduite à un rôle symbolique, tandis que le ministère de la Justice, loin de conseiller des mesures comme l’amnistie pour favoriser la réconciliation, s’enferme dans des jugements expéditifs qui creusent les fossés. Ces défaillances institutionnelles traduisent un abandon du serment initial, transformant l’État en un instrument au service d’une élite plutôt qu’en un bouclier pour la nation.

 

Source: Corbeau News Centrafrique

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