Africa-Press – CentrAfricaine. L’accord de paix signé le 19 avril 2025 entre Bangui et les groupes armés divise profondément. Le porte-parole du GTSC, Paul-Crescent Beninga, monte au créneau et dénonce cet accord.
En République centrafricaine, l’accord de paix signé le 19 avril 2025 à Ndjamena entre le gouvernement et les groupes armés UPC et 3R, sous l’égide du Tchad, provoque une controverse majeure. Paul-Crescent Beninga, enseignant-chercheur à l’Université de Bangui et porte-parole du groupe de travail de la société civile GTSC, a exprimé, le samedi 12 juillet dernier, lors de l’émission Patara sur la radio Ndékè Luka des réserves profondes sur cet accord qu’il considère comme un compromis électoraliste compromettant la quête d’une paix durable.
Paul-Crescent Beninga dénonce avec vigueur la vision électoraliste du gouvernement dans la signature de cet accord. Selon lui, l’accord du 19 avril 2025, signé à quelques mois des élections, vise principalement à apaiser les groupes armés pour garantir un climat sécuritaire favorable au scrutin, plutôt que de s’inscrire dans une stratégie de réconciliation nationale. Paul-Crescent Beninga rappelle que cette approche n’est pas nouvelle: en 2019, à l’approche des élections, le gouvernement avait accéléré l’accord politique pour la paix et la réconciliation, espérant des conditions similaires.
L’universitaire souligne que cet accord avait échoué, les signataires, dont Ali Darassa de l’UPC et Sidiki puis Bobo du 3R, ayant rejoint la Coalition des Patriotes pour le Changement en 2020, dénonçant ainsi l’APPR. Paul-Crescent Beninga met en garde contre cette répétition d’accords électoralistes qui risque de voir les hostilités reprendre après les élections, comme ce fut le cas en 2020, remettant en question l’engagement du gouvernement pour une paix durable.
Paul-Crescent Beninga critique également le manque de transparence entourant le contenu de l’accord. Il déplore que, comme à l’accoutumée, le gouvernement n’ait pas rendu public les détails de cet engagement, ce qui, selon lui, jette un discrédit sur l’initiative. Cette opacité empêche les Centrafricains de comprendre les véritables intentions du gouvernement et les concessions faites aux groupes armés. Cette critique met en avant une gestion chaotique des négociations par le gouvernement, que Paul-Crescent Beninga qualifie de “cacophonie” et de “désordre bien organisé”, pointant l’incohérence entre cet accord et les initiatives précédentes comme la feuille de route de Luanda ou l’APPR.
Un des points les plus tranchants de la critique de Paul-Crescent Beninga concerne l’impunité accordée aux leaders des groupes armés, notamment Ali Darassa et Bobo, qu’il qualifie de “mercenaires étrangers” et de “bourreaux”. Beninga dénonce l’accueil en grande pompe de ces figures par des membres du gouvernement, y compris le ministre de la Communication et celui de la Défense, alors que ces leaders sont responsables de massacres à Alindao, Kaga-Bandoro, Lemouna, et Bambari. Il fustige le silence du gouvernement sur les victimes de ces crimes, soulignant que “personne n’est heureux de voir ces bourreaux sur le tapis rouge alors que leur place est en prison”.
Paul-Crescent Beninga critique également la protection accordée à des figures comme Hassan Bouba, membre du gouvernement, qui bénéficie d’une immunité malgré des accusations de crimes graves, exposant une justice à deux vitesses qui privilégie les anciens de la Séléka aux dépens des Anti-Balaka.
Paul-Crescent Beninga pointe une violation potentielle de la Constitution centrafricaine du 30 août 2023, en particulier l’article 183, qui interdit aux membres de groupes armés d’occuper des postes publics, notamment des fonctions civiles et militaires. Selon Beninga, l’engagement du gouvernement, confirmé par le porte-parole tchadien Gassim Sherif Mahmat, d’intégrer les ex-rebelles dans l’armée et la gestion de l’État, contrevient directement à cette disposition. Beninga met en garde contre cette pratique qui pourrait permettre à des figures comme Ali Darassa et Bobo, qu’il considère comme des étrangers, de contrôler le pays à long terme, au détriment de la souveraineté centrafricaine. Il déclare: “Si nous ne faisons pas attention, ces étrangers vont commander notre pays pendant 50 ans“.
Paul-Crescent Beninga dénonce la tendance du gouvernement à récompenser les leaders armés par des postes de pouvoir, envoyant un message dangereux à la jeunesse centrafricaine. Selon lui, “la violence est devenue un moyen d’accès à l’arène politique”, ce qui encourage les jeunes à recourir aux armes pour obtenir une reconnaissance. Beninga critique le gouvernement pour dialoguer avec des groupes armés comme l’UPC et le 3R, tout en marginalisant l’opposition démocratique, comme le BRDC, qu’il accuse d’assimiler à la rébellion. Cette approche, selon Paul-Crescent Beninga, compromet la cohésion sociale et favorise un climat d’instabilité.
Les critiques de Paul-Crescent Beninga exposent un gouvernement centrafricain qui, sous prétexte de rechercher la paix, semble privilégier des compromis politiques à court terme au détriment de la justice, de la transparence et de la souveraineté nationale. En signant un accord opaque avec des leaders rebelles controversés, le gouvernement risque, selon Beninga, de perpétuer un cycle de violence et d’impunité, tout en envoyant un signal inquiétant à la population. Comme l’a souligné Paul-Crescent Beninga, il est temps de donner la parole aux victimes et de s’interroger sur la véritable vision du gouvernement pour la réconciliation nationale….
Source: Corbeau News Centrafrique
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