Azali Assoumani, président des Comores: «L’ex-président a violé la loi, trahi le pays, il a été jugé et là, se déclare opposant»

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Azali Assoumani, président des Comores: «L’ex-président a violé la loi, trahi le pays, il a été jugé et là, se déclare opposant»
Azali Assoumani, président des Comores: «L’ex-président a violé la loi, trahi le pays, il a été jugé et là, se déclare opposant»

Africa-Press – Comores. Le sommet États-Unis/Afrique s’est ouvert hier, mardi 13 décembre, à Washington, avec 49 pays invités, en plus de l’Union africaine. De nombreux chefs d’État ont fait le déplacement pour répondre à l’invitation de leur homologue Joe Biden, dont le président des Comores. Azali Assoumani évoque sa candidature à la présidence de l’Union africaine, des questions de politique intérieure, et la relation des Comores avec la France.

Vous êtes candidat à la présidence de l’Union africaine. Le président sera choisi en février prochain. Vous avez un adversaire qui est le Kényan William Ruto. Est-ce que les choses, ici à Washington, peuvent vous départager ?

Azali Assoumani : Oui, j’espère bien. J’en ai discuté avec lui quand on était en Égypte. On n’a pas eu le temps d’approfondir. Mais j’avais pris contact avec le président de la Commission africaine et on s’est dit qu’on va en discuter ici. Et j’ose espérer qu’on va trouver un compromis favorable.

Donc, il y a des négociations qui ont lieu en marge de ce sommet, ici à Washington ?

On va discuter. J’en ai parlé avec le président de l’Union africaine, Macky Sall. Le poste de président de l’Union africaine l’année prochaine revient à l’Afrique de l’Est. Donc, c’est à nous de trouver un consensus.

Vous êtes un petit pays, les Comores. Vous êtes face à un pays plus grand, plus riche aussi. Qu’est-ce que vous allez dire à vos pairs pour les convaincre que ce sont les Comores qui doivent présider l’Union africaine ?

Vous savez, l’Afrique est un continent, avec des pays souverains. Et on a l’obligation de respecter la souveraineté de tout pays. On fait partie de l’Union africaine, comme on fait partie du monde. Aux Nations unies, il n’y a pas une voix pour les petits ou pour les grands. Je ne vois pas pourquoi aujourd’hui, parce que c’est un petit pays, il n’aurait pas le droit d’assumer des responsabilités.

Mais aux Comores, l’opposition vous accuse parfois de dérives dictatoriales. Est-ce que ce ne sont pas des arguments qui peuvent jouer en votre défaveur ?

« Dictatoriales », ce sont les réseaux sociaux. Mais, venez aux Comores, vous allez voir (rires). Donc, ils peuvent nous accuser. En tout cas, il y avait un deal en 2016, en 2019. On a un deal en 2024, qu’ils se préparent. Mais je peux vous dire sans prétention aucune, comparativement à d’autres pays, pas seulement africains, à d’autres pays, on doit s’estimer heureux aux Comores.

Vous avez évoqué les échéances électorales. Justement, en 2019, vous avez été réélu après avoir modifié la Constitution et la loi électorale qui a abrogé ce système de présidence tournante entre les trois îles. L’opposition à ce moment-là a dénoncé votre réélection, vous a contesté. Trois ans après, que comptez-vous faire pour relancer un dialogue politique qui semble aujourd’hui un peu dans l’impasse ?

D’abord, il n’y a pas d’impasse. Je répète : la Constitution, ce n’est pas moi qui l’ai changée. C’est l’opposition elle-même. Je n’étais même pas au pouvoir. Ce n’est pas moi qui ai clamé qu’il faut qu’on change cette Constitution. Donc, quand j’ai été président, je l’ai appliquée.

Mais est-ce que le dialogue politique existe ?

Voilà. Tout à fait. On l’a tenu. Dernièrement, on a tenu un dialogue politique pour essayer d’apaiser les tensions. Beaucoup d’opposants sont venus parce que, dans le cas des élections prochaines, il est temps que chacun donne son avis sur le mécanisme électoral pour que demain, il n’y ait pas de contestation. Malheureusement, il y en a qui ne sont pas venus.

Donc, vous dites qu’il y a un dialogue avec l’opposition, mais le mois dernier, l’un de vos principaux opposants, l’ex-président Ahmed Abdallah Sambi a été condamné à la prison à vie pour l’affaire dite de la « citoyenneté économique », soit le détournement allégué d’importantes sommes d’argents de la vente de passeports comoriens à des étrangers. Est-ce qu’il n’y a pas une contradiction entre cette condamnation et vos tentatives de dialogue avec l’opposition ?

Que dieu vous pardonne ! (rires) Quelqu’un qui a fait un acte anti-loi, on ne va pas le juger parce que c’est un ancien président, parce qu’il est opposant ?

Ses partisans dénoncent un procès politique…

Ils disent tout ce qu’ils veulent. Je l’ai déjà entendu. Moi, ça ne m’empêche pas de dormir. Mais ce qui a été fait, c’est au vu et au su de tout le monde. Parce qu’on est en train de voir un détournement d’argent. Donc, le président Sambi n’est pas au-dessus de la loi. D’ailleurs, il n’est pas le seul président à être jugé : en Afrique, en Asie, en Amérique, en Europe. Il a fait un acte ignoble. Moi, je ne voudrais pas que ce soit un exemple pour les autres. Enfin moi… la justice. Donc, c’est quelqu’un qui a violé la loi, qui a trahi le pays. Donc, il a été jugé et là, on prend le poste d’opposant ?

Mais c’est aussi un opposant. Est-ce que pour apaiser les relations avec l’opposition, est-ce que dans le cadre de ce dialogue que vous voulez mener avec l’opposition, vous pourriez envisager une mesure de grâce ou d’amnistie pour l’ex-président Sambi ?

Un opposant qui travaille avec moi, qui comprend. Mais l’opposant extrémiste n’a pas un effet de chantage. Il doit rentrer dans le dialogue. Et puis, effectivement, j’ai des prérogatives de grâce, je peux le faire. Mais, je ne veux pas le faire par chantage.

Vos relations avec Paris ne sont pas vraiment au beau fixe. Il y a toujours ce problème de l’île de Mayotte. Comment qualifieriez-vous vos relations avec la France et avec Emmanuel Macron ?

Elles sont au beau fixe. Même en famille, on se tire, ce n’est pas un problème, parce que, effectivement, il ne va plus dans l’émergence, donc ça veut dire qu’il y a un compromis. On s’est dit que, effectivement, voilà ce qui nous différencie, on le laisse de côté. On voit ce qui nous rassemble. La France et les Comores sont des partenaires. Sur ces problèmes-là, j’espère qu’on va trouver un consensus pour l’intérêt des deux pays.

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