Tshisekedi Propose À Trump D’accéder aux Minéraux de la RDC Contre des Partenariats Mutuels ÉConomiques et Sécuritaires

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Tshisekedi Propose À Trump D’accéder aux Minéraux de la RDC Contre des Partenariats Mutuels ÉConomiques et Sécuritaires
Tshisekedi Propose À Trump D’accéder aux Minéraux de la RDC Contre des Partenariats Mutuels ÉConomiques et Sécuritaires

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Congo Kinshasa. Le continent africain s’est transformé en un vrai théâtre d’une concurrence croissante entre les grandes puissances pour les ressources naturelles, notamment les minéraux vitaux indispensables aux industries technologiques et énergétiques propres.

A ce propos, les discussions entre les États-Unis et la République démocratique du Congo, concernant un accord minier, révèlent des dimensions plus larges qui vont au-delà des intérêts économiques pour atteindre des considérations géopolitiques et stratégiques majeures à un moment où la RDC fait face à des pressions politiques et sur le terrain, et ce, en raison des tensions avec le mouvement M23 et également avec certains pays voisins du mouvement, notamment le Rwanda, l’Ouganda et d’autres.

Selon des informations publiées par d’éminents journaux de la presse internationale, tels que le journal new yorkais « « The Wall Street Journal » ou encore le journal britannique « Financial Times », les États-Unis mènerait effectivement des discussions exploratoires avec la RDC concernant un éventuel accord.

Ces discussions seraient les dernières d’une série d’efforts déployés par l’administration Trump pour garantir l’accès aux ressources existantes à l’étranger, notamment en République démocratique du Congo, qui dispose de vastes réserves de cuivre, de cobalt et d’uranium, pour lesquelles le président Félix Tshisekedi a approché le président américain Donald Trump, le mois dernier, avec une proposition d’accord qui offrirait des droits d’exploration aux États-Unis en échange d’un soutien au gouvernement congolais.

Il importe de noter que les responsables congolais espèrent que l’accord minier renforcera le soutien à Tshisekedi alors qu’il est confronté à un conflit armé dans l’Est du pays, où les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda voisin, se sont emparés de vastes étendues de terres riches en minéraux et des deux plus grandes villes de Goma et Bukavu.

• Des pourparlers qui semblent aboutir bientôt à d’importants partenariats

Les discussions avec Washington sont devenues plus sérieuses ces derniers jours, selon des personnes ayant une connaissance directe des discussions, même si de nombreux obstacles subsistent et qu’elles sont encore à un stade relativement précoce.

Les journaux ont rapporté que: « La République démocratique du Congo détient une part importante des minéraux critiques mondiaux nécessaires aux technologies de pointe, et que les États-Unis sont ouverts à la discussion de partenariats dans ce secteur, conformément au programme America First (l’Amérique d’abord) de l’administration Trump ».

On s’attend à ce que de tels partenariats avec des entreprises américaines renforcent les économies des États-Unis et de la République démocratique du Congo, et créent des emplois plus qualifiés et intègrent le pays dans les chaînes de valeur régionales et mondiales.

• Quels sont les objectifs de cet accord ?

Il ne faut pas oublier que le Congo est l’un des pays les plus riches au monde en minéraux de coltan, de cuivre et de lithium, essentiels aux technologies de pointe dans les secteurs de la défense et de l’énergie.

C’est pour toutes ces raisons que l’accès à ces minéraux est un facteur clé dans la rébellion continue dans l’Est de la RDC, sachant que des rapports publiés par les Nations Unies indiquent que le mouvement M23, soutenu par le Rwanda, impose de lourdes taxes sur les activités minières, générant jusqu’à 800.000 dollars par mois de frais pour une seule mine de coltan dans la région de Rubaya, au Nord-Kivu.

Par ailleurs, les rebelles sont accusés de piller et de faire passer en contrebande des minéraux à travers le Rwanda, ce qui génère des sommes importantes d’argent utilisées pour alimenter le conflit.

De facto, le partenariat entre la République démocratique du Congo et les États-Unis vise particulièrement à protéger ses sites miniers des pillages incessants des mouvements rebelles.

Il vise également à mettre fin au chaos et aux combats dans les zones de conflit, car la détérioration de la situation sécuritaire menace l’unité et l’intégrité territoriale de ce pays africain.

De leur côté, les États-Unis cherchent à capitaliser sur les vastes ressources minières de la RDC, à s’implanter en Afrique et à concurrencer la Chine, qui contrôle environ 80 % des opérations minières au Congo.

• Une idée sur les termes de l’accord

Selon des informations émanant de la presse américaine sur le contenu d’une lettre d’un sénateur congolais adressée au secrétaire d’Etat américain aux affaires étrangères, le gouvernement de Kinshasa propose à l’administration Trump l’accès aux sites miniers des régions de l’Est et l’autorisation de contrôler un port dans ses eaux territoriales pour servir de plaque tournante de stockage et d’exportation.

En échange, les forces américaines forment et équipent les forces armées congolaises pour protéger les voies d’approvisionnement en minéraux des groupes armés soutenus par l’étranger.

Selon cette lettre, la coopération militaire avec les États-Unis pourrait remplacer la mission de maintien de la paix de l’ONU, que le gouvernement congolais considère comme une force inefficace.

Récemment, les médias américains ont rapporté que Trump s’apprêtait à nommer un envoyé spécial dans la région des Grands Lacs pour étudier plusieurs questions, notamment l’accord minier avec le Congo.

Les observateurs estiment que l’affirmation concernant la présence de forces américaines est difficile à vérifier, car elle vient en contradiction avec les promesses du président Trump de « rapatrier les troupes ».

Dans sa lettre datée du 8 février 2025 et adressée aux autorités américaines, le président de la RDC a offert des opportunités minières au fonds souverain américain nouvellement créé.

« Votre élection (Donald Trump) a inauguré un âge d’or pour l’Amérique » et « Notre partenariat donnera aux États-Unis un avantage stratégique en leur permettant d’obtenir des minéraux essentiels tels que le cobalt, le lithium, le cuivre et le tantale en provenance de la République démocratique du Congo », a assuré Tshisekedi dans la lettre.

En prédisant que le partenariat avec le Congo renforcerait la compétitivité mondiale des États-Unis dans les secteurs de l’aérospatiale, de l’automobile, des centres de données et de l’intelligence artificielle, Tshisekedi a demandé à Trump de signer un « accord de sécurité formel » pour aider son armée à vaincre les rebelles du M23 soutenus par le Rwanda, qui ont récemment pris le contrôle de grandes villes de l’Est du Congo, riche en minéraux.

La lettre congolaise ne précise pas le type de soutien militaire qu’elle recherche auprès des États-Unis, mais un responsable de la Maison Blanche aurait affirmé qu’aucun détail n’a été divulgué sur la correspondance privée entre les deux présidents.

• Les difficultés pouvant nuire à l’aboutissement de cet accord

Ce n’est point évident qu’un accord final puisse aboutir sans entraves avec les Etats-Unis sur l’exploitation de l’accès aux richesses minières, en échange d’une protection et d’un soutien militaire, car ce partenariat semble se heurter à plusieurs difficultés, dont les plus importantes sont les suivantes:

a) Les États-Unis n’ont actuellement aucune société minière opérant au Congo, et s’ils voulaient tout recommencer, il leur faudrait beaucoup de temps pour préparer la logistique pour pouvoir participer à la compétition.

b) Les États-Unis ne disposent pas de sociétés minières publiques comme la Chine, et si le Congo veut accorder des privilèges spéciaux à l’administration Trump, il devra chercher d’autres moyens, peut-être plus complexes.

c) La plupart des mines riches découvertes dans l’Est du Congo ont déjà été attribuées à des sociétés privées, dont la plupart sont dominées par la Chine. Si les États-Unis veulent participer à la compétition, ils devront peut-être mener de nouvelles études et découvertes, ce qui nécessite d’énormes investissements qui ne garantissent pas de résultats significatifs à l’arrivée.

Toutefois, et malgré ces défis, les États-Unis pourraient être en mesure d’atteindre leurs objectifs dans l’Est de la République démocratique du Congo. Ils ont déjà financé un projet ferroviaire reliant les mines de Zambie et du sud-est du Congo au port de Lobito en Angola. Ce projet vise à renforcer les approvisionnements américains et à contrer l’influence chinoise.

Malgré les difficultés, les responsables américains et congolais cherchent un terrain d’entente pour parvenir à un accord final. C’est ce qu’a exprimé mardi 11 mars dernier, la porte-parole de la présidence congolaise, Tina Salama, qui a déclaré que les négociations progressent dans la bonne direction et qu’elles attendent leur conclusion, pour pouvoir révéler leur contenu.

Pour certains, ces discussions se déroulent à un moment de fragilité politique croissante dans le pays, et la position de Tshisekedi apparaissait vulnérable aux yeux de ses adversaires politiques, qui cherchent à exploiter cette situation à leur avantage.

Quant au Directeur du cabinet de conseil JS Held, Indigo Ellis, il a décrit l’accord proposé comme une « démarche désespérée », affirmant que ceux qui le proposaient essayaient de trouver un moyen d’attirer l’attention des États-Unis.

La Maison Blanche a refusé de commenter ces discussions.

• La Chine dans la lorgnette de Donald Trump

L’implication des États-Unis en République démocratique du Congo devrait renforcer la position de Washington contre l’influence chinoise, car les entreprises chinoises dominent déjà la plupart des principales extractions minières du pays.

« Alors que la Chine a historiquement dominé les chaînes d’approvisionnement en minéraux en République démocratique du Congo, la récente transition politique menée par le président Tshisekedi offre une rare opportunité aux États-Unis d’établir une chaîne d’approvisionnement directe et éthique ». C’est ce qu’on pouvait lire dans la lettre adressée au Secrétaire d’État Marco Rubio, nommé récemment administrateur par intérim de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID).

La République démocratique du Congo n’a pas connu de présence significative de sociétés minières américaines depuis que Freeport-McMoRan Copper & Gold Inc. a vendu sa participation dans la mine de cuivre de Tenke Fungurume, en 2016.

• Scénarios prévisibles quant à cet accord de partenariat

Dans ce contexte, on s’attend à ce que plusieurs scénarios fassent leur apparition dont:

1er Scénario: Le désaccord fondamental sur le déploiement des forces américaines sur le sol congolais pourrait conduire à une impasse dans les négociations.

Le Congo insiste sur la présence militaire américaine pour sécuriser les mines, qui seront exploitées dans le cadre d’une coentreprise, et pour remplacer les forces actuelles de l’ONU. Bien que cette option puisse être acceptable pour Trump, elle pose un dilemme majeur à son administration, qui appelle publiquement à mettre fin aux guerres, et non à les déclencher, ce qui pourrait conduire à des disputes ou des discussions houleuses avec le Congo, et donc à l’échec des négociations.

Dans le même temps, Washington devrait privilégier une approche moins interventionniste de l’accord, en se concentrant sur le soutien logistique et de renseignement et en fournissant du matériel militaire aux forces congolaises plutôt que de déployer des troupes sur le terrain.

2ème Scénario: Les négociations échouent sous la pression chinoise

Le Congo risque de faire face à une pression chinoise importante pour maintenir ses contrats existants avec les entreprises chinoises, qui détiennent entre 75 et 80 pour cent des opérations minières en République démocratique du Congo, notamment dans les secteurs du cuivre et du cobalt, laissant peu de place à un accord plus large avec les États-Unis. Ces pressions pourraient inclure des menaces de retrait d’investissements ou de restriction des échanges commerciaux, ce qui pourrait faire dérailler tout accord américain. La Chine est un partenaire commercial majeur du Congo et exerce une influence considérable dans le secteur minier, ce qui rend difficile pour Kinshasa d’ignorer ses intérêts.

3ème Scénario: Les États-Unis parviennent à signer un accord stratégique.

Si Washington peut offrir au gouvernement congolais des incitations économiques attractives, notamment des investissements dans les infrastructures et les technologies minières durables, un accord pourrait être signé qui accorderait aux entreprises américaines l’accès aux minéraux stratégiques. Cela renforcerait l’indépendance américaine vis-à-vis des chaînes d’approvisionnement chinoises et garantirait un approvisionnement stable pour les industries de la technologie et de l’énergie propre.

4ème Scénario: Le Congo s’oriente vers une politique de diversification des partenariats.

À la lumière de la concurrence géopolitique croissante autour de ses ressources minérales stratégiques, Kinshasa pourrait tenter de tirer le meilleur parti de cette concurrence en adoptant une politique de diversification des partenariats, en signant de multiples accords avec la Chine, les États-Unis et d’autres acteurs internationaux comme l’Union européenne, plutôt que de se ranger du côté d’un seul parti. Cette stratégie vise à assurer le flux d’investissements et de technologies provenant de sources diverses, à renforcer la sécurité économique du Congo et à réduire la dépendance à l’égard d’une seule partie.

• Et le Rwanda dans tout ça ?

Nous croyons savoir que les autorités rwandaises auraient accueilli « favorablement », le dimanche 23 mars 2025, la décision du groupe rebelle M23 de se retirer de la ville minière stratégique de Walikale, ainsi que l’initiative de la République démocratique du Congo (RDC) de suspendre les hostilités dans le conflit en cours à l’Est du pays, ainsi que les discussions « américano-congolaises » au sujet d’un accord minier.

Dans un communiqué rendu publique par le bureau du porte-parole du gouvernement rwandais, on pouvait lire ceci:

« Le Rwanda salue l’annonce du M23 concernant le repositionnement de ses forces à Walikale en soutien aux initiatives de paix en cours, ainsi que l’annonce de la RDC selon laquelle toutes les opérations offensives menées par les FARDC (forces gouvernementales) et les Wazalendo (milices pro-gouvernementales) seront suspendues », en poursuivant « Le Rwanda reste engagé à travailler avec toutes les parties afin de garantir le respect des engagements pris, notamment dans le cadre du processus conjoint du sommet EAC-SADC et d’autres initiatives visant à instaurer une solution politique et sécuritaire durable dans la région ».

Toujours dans le même contexte, le président congolais Félix Tshisekedi et son homologue rwandais Paul Kagame ont appelé, la semaine dernière, à un cessez-le-feu lors de discussions surprises médiatisées par l’émir du Qatar à Doha.

Il s’agit de la dernière rencontre en date depuis que le M23 a pris le contrôle des capitales provinciales de Goma et de Bukavu cette année.

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