Alain Aka – à Abidjan
Africa-Press – Côte d’Ivoire. Exclu, comme Laurent Gbagbo, Guillaume Soro ou encore Charles Blé Goudé, de la liste électorale définitive publiée le 4 juin, l’ancien financier joue sa dernière carte aux Nations unies. Explications.
La confirmation était attendue, elle est désormais officielle. Tidjane Thiam ne figure pas sur la liste électorale définitive publiée ce 4 juin par la Commission électorale indépendante (CEI), bien que son nom apparût encore sur la liste provisoire du 17 mars. Une conséquence directe de la décision judiciaire du 22 avril dernier ordonnant sa radiation.
« La commission électorale indépendante, bête et disciplinée, exécute les ordres de la justice comme la loi le recommande », avait prévenu Ibrahime Coulibaly-Kuibiert, président de la CEI, lors de sa conférence de presse du 2 juin, scellant ainsi le sort électoral du principal opposant.
Réunion en urgence
L’accélération des événements ces deux dernières semaines témoigne de la tension politique croissante. Le 31 mai, lors du meeting de la Coalition pour l’alternance pacifique-Côte d’Ivoire (CAP-CI) à Yopougon, Tidjane Thiam était intervenu par visioconférence depuis Paris. « Il ne faut pas prendre les Ivoiriens pour des idiots », martelait-il face aux milliers de sympathisants, dénonçant une manœuvre pour « annuler [son] élection démocratique à la tête du PDCI [Parti démocratique de Côte d’Ivoire] ».
Deux jours après ce meeting, la CEI annonçait soudainement la publication anticipée de la liste définitive pour le 4 juin, alors qu’elle était initialement attendue « autour du 20 juin », déclenchant immédiatement la riposte du PDCI. Le parti a convoqué en urgence ses cadres le 3 juin, avant de publier un communiqué annonçant la saisine du Comité des droits humains des Nations unies.
Face à l’impasse judiciaire nationale, le PDCI mise donc désormais sur le droit international, « en l’absence de recours en droit interne ivoirien lui permettant de défendre utilement et efficacement ses droits civils et politiques », et justifie cette démarche par la ratification par la Côte d’Ivoire, le 5 mars 1997, du Protocole facultatif se rapportant au pacte international relatif aux droits civils et politiques.
« Attaques contre la démocratie »
Tidjane Thiam a publiquement protesté contre cette exclusion. « Mon élimination de la liste électorale par la Commission électorale indépendante constitue un triste mais éloquent exemple de la dérive de la Côte d’Ivoire vers une absence totale de démocratie », a-t-il déclaré.
« Ces attaques contre la démocratie doivent cesser et le gouvernement doit garantir des élections libres, équitables et inclusives en octobre. C’est le souhait de tous les Ivoiriens et seul cela assurera une véritable stabilité en Afrique de l’Ouest », poursuit-il, dénonçant « l’utilisation de l’appareil d’État pour bâillonner la société civile et empêcher l’opposition de fonctionner ».
« La justice ivoirienne n’offrant aucune voie de recours effective, le président Tidjane Thiam a saisi hier [mardi 3 juin] le Comité des droits humains des Nations unies. Cette action vise à ordonner à l’État de Côte d’Ivoire de prendre toutes les mesures nécessaires pour que l’élection présidentielle se tienne dans des conditions équitables, inclusives et démocratiques, a précisé Me Mathias Chichportich, avocat de Tidjane Thiam. Priver le leader de l’opposition de ses droits politiques par l’effet d’une décision arbitraire, discriminatoire et insusceptible de recours constitue une violation grave des engagements internationaux de la Côte d’Ivoire. »
Gbagbo, Blé Goudé et Soro toujours exclus
La liste définitive comptabilise 8 727 431 électeurs, soit 715 006 nouveaux inscrits. Mais elle consacre l’exclusion d’autres figures majeures de l’opposition, comme Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé et Guillaume Soro qui demeurent radiés en raison de leurs condamnations judiciaires.
Pour Tidjane Thiam, la sanction repose sur l’article 48 du code de la nationalité, qui stipule qu’un Ivoirien « perd la nationalité ivoirienne » en acquérant volontairement une nationalité étrangère. L’ancien ministre avait obtenu la nationalité française en 1987, avant d’y renoncer en mars 2025.
Le PDCI continue par ailleurs de miser sur la mobilisation et « appelle tous ses militantes et militants, l’ensemble des Ivoiriennes et Ivoiriens dans toutes les composantes de la diversité qui compose la nation ivoirienne, à rester mobilisés derrière l’espoir que représente le président Tidjane Thiam ».
Source: JeuneAfrique
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